Le Brexit sonne le début de la fin d’une époque pour l’Union européenne

jeudi 30 juin 2016.
 

- A) L’heure du Plan B sonne en 2017 ! (Jean-Luc Mélenchon)

- B) Après le Brexit : se mobiliser pour une autre Europe ! (Attac France)

- C) L’ampleur du désaveu doit conduire à la refondation de l’UE (Pierre Laurent, président du PGE)

- D) Après le référendum britannique (Ensemble, FDG)

A) L’heure du Plan B sonne en 2017 ! (Jean-Luc Mélenchon)

http://melenchon.fr/2016/06/24/luni...

Le Brexit est le cri du petit peuple du Royaume-Uni contre tout ce qui est la réalité quotidienne de l’Europe des traités : pauvreté, précarité, privilèges pour les riches et ultra-riches, arrogance des donneurs de leçon de flexibilité et autres loi El Khomri, tyrannie sans visage des comptables de la Commission européenne, talon de fer des troïkas et autres proconsuls pillant les pays comme la Grèce.

Le Brexit, c’est le début de la fin d’une époque. L’idée d’une Union européenne a été tuée par la caste des eurocrates et la politique d’austérité imposée par le gouvernement allemand avec la complicité active des deux présidents français qui, depuis 2005, ont violé le vote de notre peuple.

La leçon est que l’Union européenne, on la change ou on la quitte. Comme d’habitude, les eurocrates préparent déjà depuis plusieurs mois en secret avec madame Merkel un nouveau traité pour 2017 qui ne tiendra compte d’aucune des leçons évidentes de la situation.

L’heure du plan B va sonner. Ma candidature pour l’élection présidentielle est celle de la sortie des traités européens. Plus que jamais, l’intérêt de notre pays est celui d’une politique de coopération sur le vieux continent et avec le monde plutôt que le libre-échange et la concurrence libre et non faussée.

Bien sûr, la caste des eurolâtres ne tiendra aucun compte de ce qui vient de se passer et continuera de fustiger les « extrêmes », le « repli sur soi » et l’amour des peuples pour leurs libertés et dignité sociale. Plus dure sera leur chute. L’élection présidentielle de 2017 en France en est l’occasion.

B) Après le Brexit : se mobiliser pour une autre Europe ! (Attac France)

« Nous soutenons ceux qui luttent en Grande-Bretagne pour la solidarité, la démocratie, contre le racisme et l’extrême droite »

La décision de la Grande-Bretagne de quitter l’Union européenne est un coup de semonce pour les dirigeants européens. Elle exprime une défiance à l’égard d’institutions non élues, au service des intérêts des multinationales et des marchés financiers, ainsi que la volonté des citoyen·ne·s de faire entendre leur voix. L’incapacité de l’Union européenne à répondre aux exigences démocratiques des peuples européens est une des causes de la crise sans précédent qu’elle traverse. L’alternative est claire : l’Union européenne doit changer radicalement ou risquer la désintégration.

« Il faut créer une nouvelle Europe à l’écoute des peuples » a déclaré aujourd’hui Manuel Valls. Mais quel crédit donner aux propos d’un Premier ministre qui impose, en France, une loi Travail contre la volonté populaire en réprimant grèves et manifestations ? Cette déclaration donne toute la mesure du cynisme et de l’irresponsabilité d’une classe politique qui ne cesse d’imposer, en France comme en Europe, un agenda sur mesure pour les milieux d’affaires ; et qui est largement responsable de la faillite de l’Union européenne.

Le vote du peuple britannique exprime une colère populaire légitime. Mais la campagne pour la sortie de l’Union européenne, au Royaume-uni, marquée par un racisme et une violence extrême, a aussi été l’occasion pour l’extrême-droite et les courants xénophobes d’instrumentaliser cette colère en désignant réfugié·e·s et immigré·e·s comme boucs-émissaires. Or ce sont les ravages de l’austérité, la remise en cause de la démocratie, la destruction des services publics qui sont responsables des maux des peuples européens, pas les réfugié·e·s et migrant·e·s !

Le réseau des Attac d’Europe réaffirme aujourd’hui « son engagement à lutter avec les mouvements sociaux partout en Europe pour reprendre le contrôle de nos économies, de nos sociétés et de nos vies ». Nous appelons à rompre radicalement avec l’orientation actuelle des politiques européennes : en finir avec l’austérité, développer les services publics, organiser la transition écologique et sociale et réduire ainsi les inégalités, notamment entre les femmes et les hommes. Il faut abandonner les projets d’accords commerciaux non démocratiques tels que le TAFTA et le CETA et prendre des mesures drastiques pour remettre le système financier et les multinationales sous contrôle, en particulier en luttant contre l’évasion fiscale. De Lampedusa à Calais il est urgent de penser une politique d’accueil des réfugié·e·s et migrant·e·s.

Seules des mesures de cette ampleur permettront d’enrayer le naufrage de l’Union européenne. Nous soutenons ceux qui luttent en Grande-Bretagne pour la solidarité, la démocratie, contre le racisme et l’extrême droite. Nous luttons avec eux pour faire survenir cette autre Europe que nous appelons de nos vœux.

Attac France, 24 juin 2016

C) L’ampleur du désaveu doit conduire à la refondation de l’UE (Pierre Laurent, président du PGE)

Les citoyens britanniques viennent de voter à 51,9 % pour sortir de l’Union européenne. C’est un nouveau choc révélateur de l’ampleur du désaveu populaire vis à vis de l’UE néolibérale. Le temps est venu de refonder l’UE, de construire une Union de peuples et de nations libres, souverains et associés, tournée vers le progrès humain et la justice sociale. Cette nouvelle Union, et les nouveaux traités qu’elle appelle, doivent se construire sous le contrôle des peuples européens.

Le déni répété de cette exigence depuis le référendum de 2005 sur le Traité constitutionnel européen jusqu’au coup d’État financier contre la Grèce, a conduit l’Europe dans le jusqu’au-boutisme libéral et donné des ailes à l’extrême droite. La stratégie de David Cameron et l’accord passé avec la Commission européenne ciblant les populations immigrées ont libéré les forces les plus xénophobes au Royaume Uni. Même dans sa formation politique, Cameron a été pris à son propre jeu. Pour les classes populaires britanniques, le changement de gouvernement qui s’annonce à l’automne, encore plus à droite, veut dire plus d’austérité, plus de soumission aux marchés, plus de tensions et de racisme dans la société.

Nous refusons le faux dilemme imposé par les partisans de l’austérité, entre l’enfoncement dans la crise sociale et l’autoritarisme, ou la dislocation sur fond de rivalités nationalistes. Il y a une autre option, celle de la reprise en main du projet européen par la gauche. Une lutte cruciale pour notre avenir à tous est engagée entre la droite ultralibérale de Boris Johnson alliée à l’extrême droite de Marine Le Pen et l’alliance de toutes les forces de gauche et de progrès qui refusent l’austérité. Nos regards se tournent vers l’Espagne, ou le résultat de dimanche pourrait ouvrir un espoir dans le camp progressiste. Les communistes français seront plus que jamais au côté des peuples, de la gauche du Royaume Uni et d’Irlande, dans la période complexe et instable qui s’ouvre. Avec nos alliés, nous travaillerons sans relâche à la construction de l’Europe du développement social, économique et écologique, respectueuse des souverainetés nationales.

La campagne présidentielle et législative de 2017 doit être l’occasion d’un grand débat populaire sur la politique de la France en Europe. Il n’y a rien à attendre de Hollande et Sarkozy qui ont été les artisans de l’Europe austéritaire. La question du changement politique à gauche, dans un grand pays comme le nôtre se pose plus que jamais. Le PCF entend y contribuer dès maintenant, en construisant un pacte d’engagements commun qui contienne une politique concrète et offensive pour un gouvernement de la France qui soit au combat sur la scène européenne.

Pierre Laurent, Secrétaire national du PCF, Président du PGE,

D) Après le référendum britannique (Ensemble, FDG)

https://www.ensemble-fdg.org/conten...

51,9% des électeurs et des électrices britanniques se sont donc prononcés pour la sortie de l’Union européenne. Sans surprise, en France comme en Europe, la classe politique et médiatique se lamente et présente le choix du Brexit comme un triomphe des « populistes et des nationalistes », de l’extrême droite. Qu’en est-il vraiment ?

Ce qui est absolument indéniable est que, à l’occasion de ce référendum, la campagne pour la sortie de l’UE s’est déroulée totalement sous influence de l’extrême droite (notamment l’UKIP, le Parti pour l’indépendance du Royaume-Uni) et de la droite extrême eurosceptique (celle du Parti conservateur). La rhétorique dominante a été celle du retour à la souveraineté du Royaume-Uni, voire à la réaffirmation de l’identité britannique. De même, on ne peut que constater que la question de l’immigration a été au cœur de la confrontation. Pas seulement sous forme de la fermeture ou de l’hostilité vis-à-vis des migrants et des réfugies. Mais aussi vis-à-vis de l’immigration « communautaire », des « travailleurs déplacés » considérés comme responsables de la pression à la baisse sur les salaires.

Pour autant, on ne peut analyser le résultat du référendum simplement à l’aune d’une déferlante populiste et xénophobe sur l’opinion publique : il s’agit d’abord et avant tout d’un désaveu populaire de l’Union européenne, d’une condamnation de cette machine bureaucratique construite pour détruire les acquis sociaux. Le fait que les questions sociales et démocratiques n’aient pas été au cœur du débat référendaire ne signifie pas qu’elles n’ont pas pesé lourdement dans les urnes, bien au contraire ! Après tout, même dans la bouche des partisans de droite du Brexit, celui-ci était présenté non seulement comme un défi à Bruxelles, mais aussi « aux banques et aux multinationales ».

Il est sans doute trop tôt pour se risquer à une analyse des suffrages en termes de catégories sociales et de classe : il faudra attendre que politologues et sociologues travaillent et fournissent des études de ce type. Il serait aussi intéressant de savoir comment se sont répartis les votes en fonction des classes d’âge et si, comme l’affirment assez péremptoirement beaucoup de commentateurs, les jeunes auraient voté pour rester dans l’Union européenne alors que les gens plus âgés auraient voté pour la sortie. Pour autant, ce n’est pas s’aventurer beaucoup que de dire que le vote pour le Brexit a été prioritairement un vote des classes populaires victimes de la crise, des politiques d’austérité impulsées par l’UE (et intensifiées par le gouvernement Cameron). Et, inversement, tout montre que le maintien dans l’UE a eu la faveur des élites.

Au-delà du sujet lui-même – l’Union européenne – les résultats du référendum révèlent une société britannique profondément divisée. Selon les tranches d’âge et selon les catégories sociales, comme on l’a évoqué. Mais il y a plus spectaculaire encore : la décision globale au niveau du Royaume-Uni recouvre en fait des réalités contrastées selon les nations qui le constituent. En Angleterre et au Pays de Galles, la majorité des électeurs s’est prononcée pour le Brexit. Mais, en Irlande du Nord et surtout en Ecosse, des majorités encore plus nettes ont voté en faveur du maintien dans l’Union. Premier Ministre d’Ecosse et dirigeante du Parti national écossais (SNP), Nicola Sturgeon l’a clairement indiqué : l’avenir de l’Ecosse est dans l’Union Européenne et le résultat du référendum sur l’UE pose la question d’un nouveau référendum sur l’indépendance de l’Ecosse par rapport au Royaume-Uni.

La gauche s’est également divisée lors de ce référendum. Ainsi, la gauche progressiste – la gauche du Parti travailliste (dont Jeremy Corbyn), les Verts, le SNP en Ecosse de même que Plaid Cymru, l’organisation indépendantiste galloise – a milité pour le "Remain". De même que la gauche radicale la plus "ouverte" : Left Unity (organisation fondée par Ken Loach, membre du Parti de la Gauche européenne), le Parti socialiste écossais (SSP) ou encore Socialist Resistance (Quatrième Internationale). Cette orientation s’est matérialisée dans la campagne « Une autre Europe est possible ». Force est de constater que cette campagne n’était pas sans ambiguïté : elle regroupait des courants porteurs d’une critique radicale de l’Union européenne, de ses institutions et de ses politiques, mais convaincus que dans les circonstances présentes, une sortie de l’Union européenne se ferait au profit de l’extrême droite. Mais elle regroupait aussi des courants qui pensent que l’Union européenne est réformable et, plus précisément, qu’elle est réformable de l’intérieur. Ce qui est un acte de foi que plusieurs décennies d’existence de l’UE n’ont pas permis de valider… Surtout, cette campagne pour un maintien « de gauche » n’a en rien entamé l’hégémonie (sur la campagne globale « Remain ») des néolibéraux, du patronat, du cœur de la classe dominante britannique et de l’oligarchie européenne.

De manière symétrique, le « Lexit » - la campagne de gauche pour la sortie de l’UE – qui regroupait un secteur (majoritaire) de la gauche révolutionnaire n’a nullement entamé l’hégémonie de la droite et de l’extrême droite sur la campagne pour le Brexit. Au-delà de la critique de la construction capitaliste de l’Europe incarnée par l’UE, l’un des arguments mis en avant consistait à affirmer qu’une victoire du Brexit provoquerait une crise de la classe dirigeante britannique et du gouvernement conservateur. Ce qu’illustre effectivement l’annonce de la démission de David Cameron. Certes… mais reste à savoir sur quoi débouchera cette crise ! Si, comme cela est parfois évoqué, cela se traduit par l’arrivée au premier plan de Boris Johnson (droite conservatrice) ou Nigel Farrage (extrême droite), la conséquence en serait surtout une aggravation autoritaire de la politique d’austérité.

Plus globalement, cet évènement interpelle en profondeur la gauche radicale sur la manière dont elle a appréhendé l’Europe, la construction européenne, l’Union européenne. Et dont elle doit le faire à l’avenir.

Car c’est, à l’évidence, une question d’avenir : en effet, le vote britannique – outre qu’il ouvre la voie à l’indépendance de l’Ecosse – constitue précisément le précédent que l’oligarchie craignait par-dessus tout. Même si les conditions du référendum britannique, la tonalité de la campagne et les motivations des électeurs peuvent prêter à débat, même si les conséquences du Brexit (au Royaume-Uni comme en Europe) sont encore largement indéterminée, un fait s’impose : oui, il est possible de sortir de l’Union européenne…

Et cela, quoique l’on en pense, modifie radicalement les conditions du débat. En général et au sein de la gauche de transformation sociale.

François Coustal


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