9 mars 2016 : Cette fois, ça déborde

lundi 16 mai 2016.
 

Il s’est passé quelque chose ce mercredi 9 mars. On sentait depuis plusieurs semaines la température sociale monter. Encore fallait-il le vérifier. C’est chose faite. 450 000 manifestant-e-s dans toute la France selon les organisations syndicales : on n’avait pas vu une telle entrée en matière depuis très longtemps. La mobilisation a été supérieure à celle du 7 février 2006, première journée d’action contre le CPE, dernier mouvement de masse à avoir rassemblé jeunes et salarié-e-s contre une loi de régression sociale. Dernier mouvement victorieux également.

Mais, au-delà du nombre, c’est le caractère pris par ces manifestations qui a marqué les esprits. Les défilés étaient combattifs, fiers de leur force. Les slogans, repris en masse, ont pris le pas sur les musiques de fond trop souvent utilisés ces deniers temps pour masquer les insuffisances de nos défilés. Et puis, surtout, se sont retrouvés, unis, des cortèges d’étudiant-e-s, de lycéen-ne-s, de salarié-e-s derrière leurs syndicats, de citoyen-ne-s venus transformer leur signature pétitionnaire sur internet en un acte bien concret : celui de marcher sur le pavé, bras dessus, bras dessous.

Manuel Valls, qui a décidé de monter en ligne avec le ton martial que l’on lui connaît le week-end dernier, a désormais un problème de taille devant lui. Comme Alain « droit dans ses bottes » Juppé en novembre 1995 ou Dominique de Villepin en 2006, il a assuré qu’en dehors d’éventuelles modifications cosmétiques, il était hors de question qu’il retire la loi. La 5ème République a ses us et coutumes en pareil cas : quand la loi visée par les manifestant-e-s saute, le fusible auto-désigné la suit généralement. Manuel Valls a donc mis sa tête sur le billot.

Bien sûr la gravité de la loi El Khomri suffit déjà en elle-même pour justifier pareille mobilisation, mais il y a autre chose : tout se passe comme si cette agression contre le code du travail était la goutte d’eau de trop. Longtemps, la frustration et la colère accumulées se sont fracassées sur un mur de désillusions et de résignation mêlées. Cette fois la digue paraît pouvoir sauter. Chacun-e le sent bien. Cela ne fait que décupler les énergies. Le gouvernement aura beau lâcher sans nul doute quelques concessions aux syndicats qui acceptent de négocier le contenu de la loi, rien n’y fera. Puisant encore plus d’énergie dans cette première journée réussie, le mouvement de mobilisation va inévitablement s’amplifier. Les dates sont déjà posées : 17 mars prochaine mobilisation de la jeunesse, 31 mars journée d’action syndicale et des mêmes jeunes. Depuis le début de la semaine, plusieurs AG de centaines d’étudiant-e-s ont eu lieu dans les facs, comme justement on n’en avait pas vu depuis 2006. On parle déjà d’une coordination nationale étudiante pour l’après 17 mars. Le 9 mars, plusieurs centaines de lycées se sont mobilisés. Là encore on relate des AG sérieuses où la loi a été disséquée, commentée jusqu’au vote de la participation à la journée de mobilisation. Une nouvelle génération entre dans la lutte par la grande porte de l’insoumission. C’est déjà en soi une très bonne nouvelle. Jusqu’à la victoire ? Tout le monde sent qu’elle est à portée de main. La penser possible change déjà l’atmosphère dans le pays. L’obtenir changerait réellement la donne.

La condition ? L’unité autour d’un seul mot d’ordre : le retrait de cette loi El Khomri. Et ne surtout pas croire que tout est gagné. Si les sondages laissent entendre une opinion majoritairement opposée à la loi, il faut aux acteurs de ce mouvement naissant se tourner plus que jamais vers l’extérieur. Chacun-e se doit d’expliquer les nocivités de cette loi dans les amphis, les salles de classes, à la sortie des CFA, dans les entreprises, dans les quartiers, dans son voisinage, sa famille même. Le 31 mars il faudra être au moins le double dans la rue et continuer ainsi jusqu’à faire courber l’échine à ce gouvernement qui pratique une politique de droite avec un naturel confondant.

Les militant-e-s du Parti de Gauche prendront toute leur part dans cette bataille.

Eric Coquerel

Coordinateur politique du Parti de Gauche


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