Manuel Valls et François Hollande agissent en pyromanes

vendredi 5 février 2016.
 

Taubira s’en va ? Elle est dégoûtée. Selon le mot d’un démocrate-chrétien belge des années 70 qui savait de quoi il parlait : « quand les dégoûtés s’en vont, il ne reste que les dégoûtants ». De fait, le rétrécissement de la base gouvernementale est spectaculaire. Sa sectarisation l’est non moins. Le désarroi est si grand dans les milieux socialistes que Christiane Taubira a été instantanément canonisée par l’opinion proche du PS.

Mais aussi par la presse, qui l’a aussitôt affublée du qualificatif de « gauche du PS », ce qu’elle ne dit pas elle-même à son sujet ! On voit l’arrière-pensée de ce commentaire : obliger Hollande à assumer sa nouvelle identité de droite. Mais le fait est que la nomination d’Urvoas comme Garde des Sceaux a sonné comme une confirmation de ce que sous entendait le départ de Taubira ! Cet homme proposait en 2011 la fusion des ministères de l’Intérieur et de la Justice. Il était un des champions les plus exaltés de la loi sur le renseignement. Il traitait récemment les frondeurs de son propre parti de « djihadistes »…

Et cela au moment où l’introduction de la déchéance de la nationalité dans la Constitution est aggravée ! Tous les signes envoyés par ce gouvernement convergent vers le pire. J’en viens à me poser des questions que je ne me posais pas, je le reconnais. De quoi cette équipe calamiteuse est-elle le nom ? Ce n’est pas seulement le courant démocrate de l’internationale socialiste qui l’a emporté en France. C’est quelque chose de plus grave de plus dangereux, de plus étranger à l’histoire de la famille progressiste.

Le pire est toujours certain avec Hollande

La nouvelle version de la révision constitutionnelle est pire que le projet initial concernant la déchéance de nationalité. Les binationaux seront bien traités différemment des autres Français. François Hollande et Manuel Valls essayent de camoufler cette réalité, ajoutant l’hypocrisie et la lâcheté à l’affront républicain. Pire, la déchéance sera étendue aux auteurs de « délits » et non plus seulement de crimes. Quand je formulais cette hypothèse en annonçant qu’un gouvernement de droite extrême ou d’extrême droite pourrait le faire, on m’accusait d’exagération. Mais c’est le gouvernement de la « gôche » qui l’a fait ! C’est ce que demandait Nicolas Sarkozy. Le texte n’est pas encore voté que la surenchère redoutée a déjà commencé.

Après cette révision, les binationaux nés français ne seront plus totalement des Français comme les autres. C’est ce qu’ont décidé François Hollande et Manuel Valls. J’ai déjà dit qu’ils créaient deux catégories de Français en réservant deux punitions différentes pour les mêmes faits. En prévoyant de pouvoir déchoir de leur nationalité des Français de naissance au motif de leur ascendance, ils valident l’idée qu’existeraient des Français « de souche » et des « étrangers de souche ». Devant la levée de bouclier, le gouvernement avait promis de chercher une autre formulation pour rendre cette idée plus acceptable. C’était mission impossible. Rompre avec l’identité républicaine du pays et la conception égalitaire de la nationalité ne sera jamais acceptable pour nous. Si la République est une et indivisible c’est parce que son peuple l’est !

Le résultat est pire que dans la première version. L’effet sera le même. Seul l’emballage change, ajoutant l’hypocrisie à la réalité. La version initiale de la révision faisait explicitement référence aux binationaux en indiquant que la loi fixe les règles concernant « la nationalité, y compris les conditions dans lesquelles une personne née française qui détient une autre nationalité peut être déchue de la nationalité française lorsqu’elle est condamnée pour un crime constituant une atteinte grave à la vie de la Nation ».

La nouvelle version aggrave les choses. L’amendement du gouvernement dit désormais que la loi fixera les règles de « la nationalité, y compris les conditions dans lesquelles une personne peut être déchue de la nationalité française ou des droits attachés à celle-ci lorsqu’elle est condamnée pour un crime ou un délit constituant une atteinte grave à la vie de la Nation ». Manuel Valls fanfaronne en disant les binationaux ne sont plus explicitement visés. Menteur ! Car dans le même temps, il affirme que la France ne créera pas d’apatride et même qu’elle ratifiera la convention de 1954 qui engage à ne pas faire de nouveaux apatrides. C’est donc qu’il ne veut pouvoir déchoir que des binationaux. Les binationaux sont donc bien traités différemment des autres Français, même si le gouvernement enfume hypocritement le sujet pour permettre à ses députés de se déshonorer sans l’assumer

Les binationaux nés français pourront être déchus de leur nationalité française, pas les autres Français. Eux seront « seulement » déchus « des droits attachés » à leur nationalité comme le droit de vote, d’éligibilité, la protection consulaire à l’étranger etc. Pour les mêmes faits, deux Français ne seront pas condamnés à la même peine. L’inégalité est toujours là.

L’hypocrisie n’est pas la seule aggravation du nouveau texte. Pour s’assurer les voix de la droite, le gouvernement a repris l’une des principales revendications de Nicolas Sarkozy. Il va désormais plus loin que dans la première version du projet de loi. La déchéance pourra s’appliquer à des personnes condamnées pour des « délits » et pas seulement pour des crimes. Bien sûr, dans l’immédiat, Manuel Valls jure la main sur le cœur que les crimes en question seraient « l’association de malfaiteurs, le financement direct du terrorisme ou l’entreprise terroriste individuelle, tous punis d’une peine de 10 ans d’emprisonnement ». Mais la boîte de Pandore est ouverte. Rien n’empêchera demain d’étendre la liste des crimes, mais aussi des délits, qui permettent de déchoir de sa nationalité un citoyen français.

D’autant que le garde-fou est bien mince. C’est une simple loi qui pourra modifier la liste des crimes et délits concernés, et les conditions d’application de la déchéance. Il suffira de classer dans la loi de nouveaux crimes et délits comme portant une « atteinte grave à la vie de la nation » pour pouvoir déchoir leurs auteurs s’ils sont binationaux. Le 30 décembre, par la voix de Florian Philippot, le Front National s’est dit favorable à un élargissement de la liste des crimes et délits permettant de déchoir de sa nationalité un binational. Manuel Valls et François Hollande agissent en pyromanes.


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