À qui va profiter le marché de la couverture complémentaire ?

samedi 30 janvier 2016.
 

Nathalie Hiraux Présidente de l’Union nationale alternative mutualiste (Unam)

La généralisation de la couverture santé pour les salariés est présentée par le gouvernement de François Hollande comme une avancée sociale aussi importante que la création de la CMU. Au 1er janvier 2016, les 20 millions de salariés que compte la France doivent avoir une couverture complémentaire. C’est obligatoire. Est-ce à dire que jusqu’à maintenant ils n’en bénéficiaient pas  ? La plupart d’entre eux avaient souscrit des couvertures individuelles auprès de mutuelles de proximité, non loin de leur habitation, et bénéficiaient ainsi de services tiers payant, d’accès aux soins dans des réalisations mutualistes locales (centres dentaires ou optiques). Mais voilà, ce marché de 15 millions de personnes libres de leur choix en matière d’assurance complémentaire échappait aux appétits financiers des grandes sociétés d’assurance privées et des institutions de prévoyance.

Marisol Touraine leur a offert sur un plateau d’argent un festin de roi en généralisant la couverture complémentaire santé par le biais des conventions collectives nationales. Car les opérateurs recommandés ne sont autres que les grands groupes financiers de l’assurance. Qu’importe à madame la ministre socialiste le service rendu par les mutuelles de proximité, que lui importe également le tiers payant local, la relation humaine mutuelle-assuré social mutualiste qui brise l’isolement des individus.

Si le souhait du gouvernement de François Hollande avait été réellement la recherche du bien-être des salariés, il aurait mieux valu généraliser la couverture prévoyance en matière de maintien des revenus (salaires) afin d’assurer aux 20 millions de salariés un revenu constant en cas de longue maladie.

Mais le marché de la couverture complémentaire santé est plus juteux car les cotisations sont plus élevées et génèrent davantage de flux financiers. Ainsi les financiers du monde de l’assurance seront bien les seuls qui tireront leur épingle de ce jeu de dupes. Car les accords de branche sont signés sur la base de niveaux de prestations peu élevés, obligeant les salariés à souscrire des garanties surcomplémentaires sur lesquelles il n’y a pas de participation de l’employeur. Conséquence, les employeurs dépensent moins, les familles de salariés dépensent plus, les assurances privées et les institutions de prévoyance encaissent un maximum.

Et puis, dès lors que les salariés vont être corsetés dans des contrats obligatoires avec les financiers de l’assurance, qui s’opposera à de nouveaux désengagements de la Sécurité sociale dans le remboursement des soins et des médicaments  ? Le boulevard sera ouvert pour aller vers une Sécurité sociale bis, totalement privée, telle qu’elle existe aujourd’hui en Allemagne, financée par les assurés sociaux eux-mêmes et non plus par les cotisations 
patronales.


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