Faire naître un printemps de la gauche  !

mardi 19 janvier 2016.
 

... Écraser la République sociale, au profit d’une République de «  l’ordre  », jusqu’à faire glisser notre État de droit vers la pente savonneuse déjà expérimentée outre-Atlantique après le 11 septembre 2001 d’un «  État de sécurité  », sans résultat aucun dans la lutte antiterroriste, est plus que dangereux. Là-bas, c’est l’émergence d’un phénomène aussi inquiétant que la candidature Trump aux primaires républicaines. Ici, c’est l’extrême droite. L’actuel pouvoir, comme le précédent, cherche une réponse autoritaire à la crise de notre République causée par son insertion continue dans le capitalisme financier et mondialisé, et une construction européenne antisociale et antidémocratique. Pour y parvenir plus facilement, il cherche la désagrégation du clivage entre la gauche qu’il détruit et la droite qui glisse vers de nouveaux rivages plus droitiers. La République, son contenu, les valeurs qu’elle porte sont donc placés au cœur d’un débat politique et idéologique féroce. Les nombreuses balafres qu’elle a subies imposent de se remobiliser pour une République qui soit fondée réellement sur ses grandes institutions sociales, garantes de l’égalité face aux besoins fondamentaux du travail, de la santé, du logement, de la mobilité, de l’éducation et de la culture.

Alors que se mettent en place les instruments d’un État autoritaire, les forces de l’argent reprennent l’offensive pour que le pouvoir abaisse encore les droits des salariés. De fait, le gouvernement engage plusieurs initiatives autour de l’apprentissage, la formation des chômeurs, la révision du Code du travail, le service civique et on parle d’une nouvelle loi dite «  Macron  »

Le MEDEF est à l’offensive pour réclamer dans la savoureuse novlangue à laquelle il nous a habitués un «  contrat de travail agile  » qui n’est autre qu’un contrat de précarisation qui peut être rompu pour «  des motifs liés à la situation de l’entreprise ou la réalisation d’un projet  » et autoriserait un «  plafonnement des indemnités prud’homales  ». Bref, un contrat de sécurité pour le capital et d’insécurité pour les travailleurs. Avec un milliard d’euros à la clé qui viendra s’ajouter aux 100 milliards déjà transférés aux entreprises ces trois dernières années, avec les résultats que l’on sait en matière d’emploi, de précarité et de pouvoir d’achat. Le monde du travail, celui des retraités et des chômeurs, celui de la culture ne peuvent laisser le patronat agir à sa guise.

L’étouffement de la question sociale ne saurait perdurer dans une société qui compte plus de 6 millions de chômeurs, qui fait face aux défis nouveaux de la révolution du numérique, de la transition écologique, de leurs impacts sur le travail et alors que grandit l’aspiration à une véritable sécurité sociale professionnelle. Il revient aux forces progressistes d’animer et de favoriser la réflexion, de travailler à l’émergence d’un mouvement social réunissant travailleurs, créateurs et retraités. Un mouvement suffisamment puissant et uni pour imposer l’inversion du cours des choses jusqu’à remettre dans le débat public la question d’un nouveau contrat républicain et progressiste.

Pour sortir du marasme actuel, des initiatives voient le jour à gauche pour tenter de faire vivre une perspective. Des clubs se forment, des gens se regroupent, des débats s’organisent, des personnalités lancent l’idée de réunions citoyennes et de choix d’un candidat de gauche à l’élection présidentielle de 2017 avec des «  primaires  ». Autant de preuves, à la fois, de l’ampleur des difficultés à surmonter et de la conscience qu’il est possible d’y parvenir, apportées par des citoyens et des personnalités qui, comme nous, refusent le retour de la droite, la montée de l’extrême droite et la destruction de la gauche, déjà bien entamée par les tenants de «  la révolution copernicienne  ».

Patrick Le Hyaric

Editorial de L’Humanité Dimanche (extrait)


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