Arabie saoudite : blogueurs fouettés, femmes mineures à vie, migrants frappés et expulsés – L’un des plus grands exécuteurs de la planète

samedi 22 juillet 2017.
 

Lundi 21 septembre, la nomination de l’Arabie saoudite à la tête d’un groupe consultatif qui propose des experts pour le Conseil des droits de l’homme des Nations unies est rendue publique ; jeudi 24, elle devrait décapiter, puis crucifier Ali Mohammed Al-Nimr, un opposant chiite de 21 ans, dont le corps, monté sur une croix, sera exposé publiquement jusqu’au pourrissement de ses chairs.

La nomination du royaume wahhabite au sein de ce groupe – qui n’est pas la présidence du Conseil des droits de l’homme contrairement à ce qui a pu être écrit ici ou là – n’a pas manqué de placer les Nations unies sous le feu des critiques tant l’Arabie saoudite ne brille pas – c’est peu dire – par son exemplarité en matière de droits de l’homme.

L’un des plus grands exécuteurs de la planète

Depuis le début de l’année, le royaume a déjà exécuté 134 condamnés, soit 44 de plus que l’an dernier. Entre janvier 1985 et juin 2015, au moins 2 208 personnes ont été victimes de la peine de mort, parmi lesquelles plus d’un millier d’étrangers, des mineurs et des handicapés mentaux.

En mars 2015, Amnesty International s’était inquiétée du nombre de décapitations pour des affaires de stupéfiants – la moitié des exécutions. Riyad affirme appliquer la peine capitale pour les crimes graves, sur la base de la charia, la loi islamique : meurtre, viol, trafic de drogue, vol à main armée, enlèvement, mais aussi apostasie (refus de la religion), adultère et « sorcellerie ».

Des blogueurs fouettés

Dix ans de prison, dix ans d’interdiction de sortie du territoire et mille coups de fouet pour « insulte à l’islam » : le blogueur Raïf Badaoui a payé cher ses appels à réformer le royaume. Farouche défenseur de la liberté d’expression, il avait demandé sur son site Internet la fin de l’influence religieuse dans les décisions du gouvernement.

Mais en Arabie saoudite, toute critique contre la famille royale, les institutions religieuses et l’islam est passible de poursuites. Sous couvert de lutte contre la cybercriminalité, de nombreux militants ont été condamnés et leurs comptes ont été fermés.

Des femmes mineures à vie

Pas à une contradiction près, le royaume a ratifié en septembre 2000 la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, sans être tenue de respecter toute disposition contraire à la loi islamique. On a peine, au final, à voir laquelle elle respecte, même si on peut constater une – très – lente évolution sur ce sujet.

Si les femmes ont ainsi acquis en 2015 le droit de voter et d’être éligibles aux élections municipales, elles restent traitées en éternelles mineures : citons l’obligation du recours à l’autorisation d’un tuteur masculin pour voyager, se marier, accéder à des études supérieures, etc. Elles ne peuvent en outre toujours pas conduire une voiture.

Des migrants frappés et expulsés…

Passages à tabac, conditions de détention déplorables : la campagne d’expulsion de centaines de milliers de travailleurs migrants « sans papiers » menée depuis 2013 a entraîné un grand nombre d’abus, selon un rapport de l’ONG Human Rights Watch.

« Un grand nombre d’entre eux sont retournés dans leurs pays démunis, incapables d’acheter de la nourriture ou de payer pour le transport vers leurs régions d’origine, dans certains cas parce que des fonctionnaires saoudiens ont arbitrairement confisqué leurs biens personnels. »

« De nombreux migrants ont été renvoyés vers des lieux où leur sécurité est menacée », note l’ONG, à l’image des Somaliens renvoyés à Mogadiscio.

En moins d’un an, l’Arabie saoudite a expulsé 36 000 Somaliens, 163 000 Ethiopiens et 613 000 Yéménites, selon l’Organisation internationale des migrations.

Ceux qui sont en « règle » le sont en vertu de la Kafala, un système qui oblige les migrants à travailler sous l’égide d’un parrain, en général leur employeur. Ce système empêche les employés de changer librement de patron, même quand les conditions de travail sont devenues inacceptables pour eux, mais aussi de quitter le pays – leur passeport leur étant souvent « confisqué » à leur arrivée pour n’être rendu qu’au terme de leur période de travail. En 2014, 90 organisations non gouvernementales avaient appelé les pays du Golfe à réformer ce système.

Madjid Zerrouky Journaliste au Monde


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