La bombe à fragmentation des lois retraite

vendredi 2 décembre 2016.
 

Selon une étude de la Drees ( Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques), le taux de remplacement du salaire 
par la retraite recule au fil des générations. Conséquence directe 
des contre-réformes libérales.

Entre pension et dernier salaire, l’écart se creuse

Tout salarié approchant du départ en retraite se pose la question  : quel sera le montant de ma pension  ? Et donc, de quelle ampleur sera ma perte de revenu, comparé à mon dernier salaire. Car, si les besoins du retraité diffèrent de ceux de l’actif, ils ne sont pas nécessairement moins gourmands en pouvoir d’achat. Des postes de dépenses comme celui de la santé (la part non remboursée des soins et médicaments, la cotisation à l’assurance complémentaire) ou celui du chauffage augmentent même souvent. C’est dire tout l’intérêt de l’indicateur taux de remplacement du salaire perçu en fin de carrière par la retraite. Un taux élevé signifie un décrochage de revenu limité. C’est aussi un moyen de conforter la confiance dans le système par répartition, et de résister à la promotion des fonds de capitalisation.

De ce point de vue, les résultats de l’étude de la Drees (direction de la recherche au ministère des Affaires sociales) publiés dernièrement ne sont pas rassurants (*). Ils montrent en effet que l’écart se creuse au fil des générations entre les derniers salaires et la pension. Pour les retraités de la génération 1946, le taux de remplacement médian du salaire net moyen de fin de carrière par la retraite (pension de base plus complémentaire) s’élève à 74 % pour les hommes et 72,5 % pour les femmes. Ces chiffres recèlent de grandes disparités. Ainsi 10 % des retraités perçoivent une pension correspondant à seulement 53,4 % de leurs derniers salaires. Et pour un quart de ces retraités de la génération 1946, le taux de remplacement plafonne à 64 %.

Yves Housson, L’Humanité

Les effets néfastes de la réforme Balladur de 1993

Mais l’enseignement le plus significatif de l’étude de la Drees est que, au fil des années, le différentiel salaire-pension s’accroît sensiblement. Entre les générations 1936 et 1946 de retraités ayant effectué une carrière complète, le taux de remplacement médian est tombé de 80 % à 75 %. Une baisse plus forte encore pour les anciens salariés du service public (– 9,5 %). La principale raison de ce décrochage  : la réforme Balladur de 1993. Jusqu’alors, la retraite était calculée sur la base des «  dix meilleures années  » de salaire de la carrière. Depuis 1993, progressivement, cette base a été élargie aux «  vingt-cinq meilleures années  ». Ce qui mécaniquement inclut davantage de moins bonnes années, et fait donc baisser le salaire moyen servant de référence. De même, la réforme Balladur a institué l’indexation des salaires portés au compte sur les prix, en lieu et place du salaire moyen (référence plus avantageuse), ce qui pèse aussi sur le taux de remplacement. À quoi s’ajoutent enfin les coups de boutoir donnés par le patronat aux régimes complémentaires (Arrco, Agirc), sous forme de mesures d’économies qui ont consisté à faire baisser la valeur du point. Donc le rendement des régimes. Une tendance que le patronat cherche encore à aggraver dans les négociations actuelles sur l’Arrco et l’Agirc. Alors que le système de retraite ne fixe aucun objectif de taux de remplacement, la CGT revendique une garantie de 75 % pour tous.


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