Grèce : Comment les nouvelles mesures d’austérité vont accentuer la dette ?

samedi 1er août 2015.
 

par ​Catherine Mathieu, économiste 
à l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) répond à cette question

L’accord du 13 juillet impose la poursuite de l’austérité budgétaire, en continuant d’appliquer les recettes qui ont conduit la Grèce à perdre 25 points de PIB depuis 2008, à un taux de chômage de 25 % et à un taux de pauvreté record. À partir du 15 juillet, le système de TVA doit être réformé pour apporter des recettes supplémentaires d’un point de PIB (soit un taux normal de TVA à 23 %, y compris sur la restauration  ; le gouvernement grec a réussi à maintenir un taux réduit à 13 % sur l’alimentation, l’énergie, l’eau et l’hôtellerie, et un taux super-réduit de 6 % sur la pharmacie, les livres et le théâtre)  ; les réductions de TVA dans les îles devront être supprimées. Non seulement cette hausse de la TVA va peser sur les ménages, mais elle va aussi frapper l’activité touristique, principale source de recettes de l’économie grecque.

La Grèce devra nettement réduire le niveau des retraites, en supprimant progressivement la prestation complémentaire versée aux retraites les plus faibles, en désindexant les retraites complémentaires, en augmentant les cotisations sur les retraites, au total d’un point de PIB. Elle devra équilibrer son système de retraite d’ici à octobre 2015 (ce qui est impossible). Les aides à l’agriculture devront également être nettement réduites.

La Grèce a dû s’engager à dégager un excédent public primaire (hors charges d’intérêts) d’un point de PIB cette année, à le porter à 2 points de PIB en 2016, 3 points de PIB en 2017 et 3,5 points de PIB en 2018. Si ces objectifs (impossibles à atteindre) ne sont pas atteints, les dépenses publiques devront automatiquement être réduites. Cela pèsera de nouveau sur la croissance et réduira les rentrées fiscales, ce qui obligera la Grèce à un nouvel effort budgétaire. Au total, à un pays qui a déjà fait un effort budgétaire de 28 points de PIB, on demande au moins 6 points supplémentaires… C’est, une fois de plus, le cercle vicieux de l’austérité que l’on impose à la Grèce  : les mesures portant sur les ménages (et surtout les plus pauvres et les plus fragiles) induiront une baisse de la production et une inéluctable montée du ratio dette/PIB.

L’accord ne fait aucune référence au solde public structurel, qui est pourtant l’un des critères inscrits dans le marbre du traité budgétaire  : or, en 2014, la Grèce avait le deuxième plus fort excédent public structurel de la zone (1 % du PIB), juste après l’Allemagne, selon les estimations mêmes de la Commission. Au plan d’austérité exigé aujourd’hui, s’ajoute la mise en place d’un conseil budgétaire indépendant, supposé savoir mieux gérer la politique budgétaire qu’un gouvernement démocratiquement élu. Les institutions européennes (CE et BCE) ainsi que le FMI continueront de surveiller le gouvernement et l’administration grecs. L’accord du 13 juillet met la politique budgétaire grecque sous leur tutelle. Sans vouloir jouer les Cassandre, on ne peut que craindre qu’en 2018, l’économie grecque ne soit dans un état pire encore qu’aujourd’hui.


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