Le FBI... une police politique experte en terrorisme

vendredi 8 mai 2015.
 

Analyses scientifiques erronées, témoignages douteux... : le Bureau fédéral d’investigation est épinglé dans un rapport de l’OIG (Inspection générale du ministère de la justice US). 
Une attitude qui a contribué à la condamnation à mort d’au moins soixante prisonniers et à l’exécution de trois d’entre eux.

Le Bureau fédéral d’investigation, plus connu sous son sigle américain de FBI, a l’excuse un peu facile. Pointé du doigt par un rapport de l’Inspection générale (OIG) du ministère de la Justice au mois de juillet, il vient de répondre avec une désinvolture confondante, qui cache mal les pratiques de ce service, longtemps bras politique du pouvoir, particulièrement lorsque le FBI était dirigé par le sinistre et très anticommuniste J. Edgar Hoover.

Selon ce rapport de l’OIG, la condamnation à mort d’au moins soixante prisonniers, dont trois ont été exécutés, pourrait avoir reposé sur des analyses scientifiques erronées et des témoignages douteux. L’un des trois prisonniers, exécuté au Texas en 1997, n’aurait pas encouru la peine capitale sans les éléments à charge défectueux. Un autre détenu a été innocenté vingt-sept ans après sa condamnation et au moins cinq autres verdicts ont été annulés, après que les «  analyses erronées et les témoignages scientifiquement intenables  » d’un analyste du FBI ont été mis au jour. Dans ses recommandations au ministère de la Justice, l’OIG a listé des condamnés dont les dossiers ont été revus par des scientifiques indépendants afin que les autorités puissent réexaminer les pièces à conviction et «  prendre des mesures immédiates pour s’assurer que ces accusés soient bien alertés que leur peine a pu être entachée par des analyses et des témoignages peu fiables  ».

Des musulmans américains ciblés

De son côté, le FBI reconnaît des manquements par le passé dans ses analyses scientifiques. Mais qu’on se rassure  : le Bureau promet que cela n’arrivera plus et s’engage à réparer ses erreurs chaque fois que c’est possible. La police fédérale admet ainsi des «  erreurs de scientifiques du FBI dans l’analyse de cheveux au microscope ou de rapports de laboratoires  » dans des affaires criminelles. Mais plus de risque d’erreurs. Le FBI emploie désormais «  les analyses ADN mitochondrial (transmis par la mère) des cheveux en plus des analyses au microscope  », selon un communiqué conjoint du ministère de la Justice et du FBI dont il dépend. «  Le ministère et le FBI s’engagent à s’assurer de la véracité des futures analyses de cheveux ainsi que de l’application de la plus grande rigueur dans les analyses criminelles  » et déploient «  des moyens considérables  » à cette fin. Ouf  !

Le hic est qu’en 1997, un premier rapport de l’OIG avait pointé des irrégularités graves commises dans des enquêtes judiciaires par treize analystes du laboratoire du FBI à Quantico, Virginie (est). Dix-sept ans plus tard, le même OIG accuse donc le FBI de ne pas en avoir tiré les leçons et d’avoir traité à la légère les affaires de peine de mort dans les huit années qui ont suivi. Les autorités locales, la défense ou l’accusation n’ont pas été alertées, rendant impossible une révision des peines, et trois hommes ont été exécutés, soulignait le rapport.

En juillet dernier toujours, un autre rapport montrait le FBI sous un jour aussi sombre. L’ONG Human Rights Watch (HRW) dénonçait un FBI qui a «  encouragé, poussé et parfois même payé  » des musulmans américains pour les inciter à commettre des attentats, au cours d’opérations de filature montées de toutes pièces. Selon HRW, dans beaucoup des plus de 500 affaires de terrorisme conduites par les tribunaux américains depuis le 11 septembre 2001, «  le ministère américain de la Justice et le FBI ont ciblé des musulmans américains dans des opérations clandestines de contre-
terrorisme abusives, fondées sur l’appartenance religieuse et ethnique  ». Selon HRW, le FBI a souvent ciblé des personnes vulnérables, souffrant de troubles mentaux et intellectuels. Des informateurs ou policiers infiltrés auraient alors interagi avec elles en élaborant le plan d’attentat, en fournissant les ressources pour le mettre en œuvre, puis en persuadant, voire en faisant pression sur la personne pour qu’elle y participe. Le but étant de gonfler le nombre d’arrestations et de pouvoir justifier aux citoyens américains les efforts de lutte contre le terrorisme. L’histoire du FBI est remplie de comportements de ce type, de la surveillance d’écrivains ou d’acteurs, se comportant tout simplement comme un service de renseignements.

Pierre Barbancey

L’Humanité


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