Arrogance impériale des dirigeants allemands

lundi 4 mai 2015.
 

Cette arrogance vient encore de se manifester à plusieurs reprises depuis une semaine. Une étrange accélération qui ressemble à de la surenchère. Un signe de la tutelle qu’ils considèrent exercer sur la Commission européenne. Ainsi quand plusieurs d’entre eux ont rappelé à l’ordre le Commissaire français Pierre Moscovici pour ses prises de position internes au congrès du PS français. Le président du groupe PPE au Parlement européen, Manfred Weber, par ailleurs membre de la CSU pro Merkel, a ainsi déclaré : « que le commissaire français européen aux affaires économiques et monétaires se joigne à cet appel idéologique est une provocation ». Et il a ajouté cette phrase énigmatique : « nous attendons de lui un engagement clair pour la stabilité politique de la Commission ». Comme si le fait d’être membre d’un parti politique dans son pays d’origine était un facteur d’instabilité ? Cette expression renvoie directement à l’ordolibéralisme dont l’Allemagne impose la doctrine partout en Europe par-delà les élections. Pour les dirigeants allemands, la Commission étant un des centres d’application de l’ordolibéralisme, elle doit être étrangère à toute influence politique autre que celle de la doctrine libérale. Quoi que disent les urnes. Un autre député européen allemand, Markus Ferber a d’ailleurs parlé à propos de Moscovici de « précédent choquant ». Comme si un dogme avait été ébranlé. Bien sûr l’acte politique de Moscovici n’ébranle en rien l’édifice libéral européen. Les Allemands le savent bien, mais ils ont saisi ce prétexte pour donner à voir la laisse par laquelle ils tiennent Moscovici. Loin de leur tenir tête ou de les ignorer, Moscovici a d’ailleurs fait acte de contrition en regrettant d’avoir signé un texte dans le congrès du PS. Puis il prétendit n’avoir pas lu le texte. Enfin il alla même jusqu’à rappeler servilement que sa candidature au poste de Commissaire avait été soutenue par l’Allemagne.

La Grèce a aussi subi une nouvelle salve d’arrogance allemande. La charge était destinée à préparer le nouveau chantage fait au gouvernement Tsipras lors de la réunion de l’euro-groupe tenue vendredi 24 avril. Le commissaire européen Günther Oettinger, membre de la CDU d’Angela Merkel a ainsi accusé la Grèce de retarder les négociations. Et il a dénoncé « L’attitude peu coopérative du gouvernement grec vis-à-vis des représentants de la Troïka, qui sont actifs à Athènes ». C’est appuyer une fois de plus sur un point dont tous les dirigeants allemands savent qu’il est en tête des engagements de Syriza : ne plus subir à domicile les injonctions de la Troïka. Le rappeler est une manière de continuer à nier le résultat des élections grecques et des précédentes discussions. Et le Commissaire allemand de conclure en forme d’ultimatum : « le temps pour la Grèce arrive à expiration », « en mai Athènes sera financièrement de manière définitive au pied du mur ». La tactique allemande est toujours la même depuis que Tsipras a été élu le 25 janvier : intimider et faire pression jusqu’à la capitulation.

Cette arrogance est d’autant plus insupportable que chaque jour amène son lot de révélations sur le rôle de l’Allemagne dans la descente aux enfers de la Grèce depuis 2010. La chaîne Arte a diffusé dimanche 26 avril une enquête qui montre comment la Troïka européenne est intervenue en Grèce au profit des entreprises allemandes.

Ceux qui avaient encore des illusions sur l’indépendance de la Commission européenne et de la Banque centrale verront à quel point elles sont enchaînées aux intérêts allemands jusque dans les détails de leur action. A ainsi été révélé qu’en l’échange d’un des premiers plans d’aide de mai 2010, la Grèce avait été forcée d’acheter des armements allemands. Et en particulier deux sous-marins pour la somme de 175 millions d’euros. Un comble pour un État au bord de la faillite. Et une preuve absolue de cynisme de l’aide européenne, dont les versements ont donc servi à acheter du matériel allemand. Les mémorandums accompagnant les plans « d’aide » ont aussi été orientés pour profiter à l’Allemagne. Ainsi la privatisation des aéroports régionaux grecs a-t-elle bénéficié pour un prix dérisoire à la société allemande Fraport dont l’État allemand est actionnaire à plus de 50 %. On mesure ici à quel point l’intérêt financier allemand est contradictoire avec l’objectif d’aider la Grèce à rembourser sa dette ! On avait déjà observé le même circuit cynique avec l’argent injecté par la Banque Centrale Européenne pour racheter des titres de dette grecque et ainsi permettre le remboursement des banques allemandes qui les détenaient !

A ces manipulations cyniques de l’aide européenne se sont ajoutées d’énormes malversations de grandes entreprises allemandes en Grèce. Mercedes et BMW ont bénéficié de fraudes massives à la TVA sur les grosses cylindrées. Cela a facilité leurs ventes en faisant perdre une somme estimée à 600 millions d’euros à l’Etat grec. Des pots de vin versés pour l’obtention d’un contrat de télécommunication pour la firme Siemens ont aussi alimenté un vaste système d’évasion fiscale et de blanchiment. Les responsables de ces fraudes sont aujourd’hui protégés par le gouvernement allemand qui refuse de les extrader ou même juste de transmettre les listes de fraudeurs au gouvernement grec. Que savons-nous de tout cela dans la grande presse française ? Rien. Rien sinon le cynisme consternant de « Libération », presse vautour, qui titre sur « les cent jours qui n’ont pas changé la Grèce ».


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