Présidentielles : IL Y A LE FEU AU LAC

vendredi 9 mars 2007.
 

Il y a le feu au lac, je n’hésite pas à le dire. Pourtant une certaine esthétique politique recommande de rester impavide quoiqu’il arrive. Je n’y ai jamais souscrit par méfiance d’instinct contre les étranges aptitudes à l’auto hypnose qu’impliquent certains prétendus sangs froids. La montée en puissance de Bayrou dans les sondages (j’inclus leur dimension manipulatoire dans mon analyse) menace bel et bien de jeter tout le paysage politique cul par-dessus tête et il est bien temps de réagir.

Il y a quinze jours devant le bureau national du PS cette question a été débattue. Il s’est bien sûr trouvé un musclé du sang froid pour recommander à toutes les autres mauviettes participantes de « garder leur calme » quand bien même ne l’avions-nous nullement perdu. Puis nous fumes invités à une virile indifférence, bien sûr vigilante, mais détachée, qui ne « donne pas de prime à nos adversaires en parlant d’eux » et tuti quanti. L’antienne s’acheva dans l’indépassable invitation à « s’en tenir à nous même, à nos propres propositions », pour « obliger tous les autres à se déterminer par rapport à nous ». D’habitude, c’est la façon de parler de tous les chevaux de Troie. Mais ce n’était pas le cas cette fois-ci où seule l’arrogance était en œuvre. Pour ma part, j’ai dit, je persiste et signe, que cette sorte de « sang froid », toute proportion gardée, a déjà démontré sa nullité face Le Pen jusqu’au jour où celui-ci nous est passé devant. J’ai donc recommandé qu’on en tire les leçons.

Commençons par éviter de diaboliser Bayrou. D’abord pour tenir compte du fait que les diables sont devenus sympathiques en politique depuis quelques temps... Ensuite parce que la diabolisation est une paresse de l’esprit qui ne convainc personne. Enfin pour qu’on se souvienne combien cette campagne est nécessairement, obligatoirement, incontournablement, une campagne d’éducation populaire en direction des désorientés et désemparés face auxquels il ne suffit pas d’agiter des excommunications pour emporter la décision. Car ceux là constituent l’essentiel des français à ce jour. Et ce n’est pas la peine de se demander trop pourquoi ils sont tellement nombreux si l’on veut éviter de s’entendre montrer, citation à l’appui (comme cela m’est arrivé sur le plateau d’ITV), comment les principaux acteurs de la scène ayant eux-mêmes brouillé les clivages qui organisaient la pensée collective dans notre pays (ah ! Sarkozy citant Jaurès et Blum !), ils récoltent dorénavant à foison la confusion qu’ils ont semé si généreusement.

Faisons court. La gauche est menacée d’être éjectée du second tour par monsieur Bayrou (Sarkozy aussi, et on verra d’ici peu que c’est tout autant). Le nier est irresponsable si l’on tient compte de ce que nous entendons et constatons autour de nous. Pour l’essentiel Bayrou est surtout un problème à droite où il pioche l’essentiel de son électorat. Mais il est aussi un problème pour nous dans certaines catégories sociales, inutile de le nier. Il faut donc colmater la brèche là où elle est ouverte. Non pas en général mais au cas particulier.

Je pense en particulier aux enseignants. C’est d’ailleurs dans l’éducation que la supercherie de monsieur Bayrou fonctionne le plus grossièrement. Je crois qu’il faut en faire la démonstration méthodique. Il est tellement révoltant de voir quelqu’un qui a voté contre la loi sur les signes religieux ostentatoires à l’école se draper dans les plis du drapeau de la laïcité ! Et plus insupportable encore que l’abrogateur de la loi Falloux puisse faire des mouvements de menton en défense de l’école publique sans qu’on lui éclate de rire au nez ! Et ainsi de suite. Mon dossier déborde d’arguments. Je me suis mis au travail.

J’ai intégré l’équipe de campagne socialiste à l’heure où il semble bien compris qu’on a besoin de tout le monde pour la bataille de gauche puisque ça va moins bien que prévu.... Ceux qui menaient les opérations n’ont pas eu tout le succès qu’ils étaient en droit d’espérer. Le coup de main expérimenté est indispensable.

Au Sénat, le président du groupe socialiste, Jean-Pierre Bel qui coordonne l’action, m’a confié l’animation de la cellule des argumentaires. Une vingtaine de personnes se réunissent pour faire le travail de fouille et de mise en forme des arguments à rendre disponibles pour ceux qui veulent les propager et convaincre autour d’eux.

J’ai rencontré Jean-Louis Bianco co-directeur de la campagne et notre rencontre a été assez concrète, je dois dire. A chacun sur le terrain je recommande d’en faire autant.

Quel que soit votre choix à gauche, et surtout si vous êtes socialistes ou communistes, aidez plutôt que commentez, agissez plutôt que soupesez. Ce qui nous menace si le Parti Socialiste est absent du deuxième tour et si le Parti communiste est humilié est une catastrophe qui va plus loin qu’un simple revers électoral. Un changement d’époque politique où la gauche serait condamnée à hésiter entre collaboration et figuration.


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