Tsipras hausse le ton et respecte sa parole

vendredi 27 mars 2015.
 

Le nouveau gouvernement grec de la gauche radicale a fait voter, hier, un projet de loi contre la pauvreté malgré les réticences de la Commission européenne.

Alexis Tsipras l’avait promis, le Parlement grec l’a fait. Un projet de loi contre la pauvreté – une des mesures phares proposées par le leader de la gauche radicale pendant la campagne des législatives– a été adopté hier à la Vouli. Les 149 députés de Syriza et ses 13 alliés des Grecs indépendants mais aussi, plus surprenant, le parti de la droite conservatrice Nouvelle Démocratie (du premier ministre sortant Antonis Samaras), ainsi que les sociaux-démocrates du Pasok, ont donné leur voix à ce projet.

Cette première de la mandature Tsipras prévoit, notamment, la fourniture d’électricité gratuite aux ménages qui en ont été privés suite aux mesures drastiques et inhumaines prises par les derniers gouvernements de droite et du Pasok sous l’injonction de la troïka (Banque centrale européenne, Commission européenne et Fond monétaire international). Des bons d’alimentation (pour environ 300 000 personnes), des billets de transport et l’accès gratuit aux soins pour les plus défavorisés font aussi partie du paquet de mesures sociales inscrites dans cette loi.

Ce vote est un signe fort envoyé par le gouvernement grec non seulement à ses concitoyens, mais aussi aux institutions européennes qui, mardi soir encore, faisaient grise mine. Par la voix du représentant des créanciers de la Commission européenne, Declan Costello, Bruxelles avait fait part de son scepticisme sur le vote de cette loi demandant une consultation préalable. Declan Costello estimant par ailleurs cette action parlementaire comme «  unilatérale  » de la part du gouvernement grec et «  allant à l’encontre de l’accord signé lors de l’Eurogroupe du 20 février dernier  ». Une réponse aux créanciers et technocrates

En guise de réponse, Alexis 
Tsipras, qui a livré un discours très musclé avant le vote, a souligné que son «  gouvernement de salut national  » avait rempli son premier contrat. «  Cette loi répond avec détermination à certains de nos créanciers et technocrates qui essaient de nous effrayer avec des ultimatums  !  » s’est indigné le premier ministre. «  Certains nous ont demandé de geler ces lois, mais nous répondons en procédant au vote de ces lois. Au nom de quelle Europe ose-t-on parler d’action unilatérale lorsqu’il s’agit de lutter contre la pauvreté  ?  » a-t-il interrogé.

Devant le fait accompli, le 
commissaire européen aux Affaires économiques et monétaires, Pierre Moscovici, a dû calmer le jeu. «  La Commission défend pleinement l’objectif d’aider les plus vulnérables et n’oppose pas un quelconque veto aux mesures prises pour les plus pauvres  », a ainsi tempéré l’ancien ministre de l’Économie de François Hollande qui doit, comme ses camarades de la Commission, se soumettre à la force de la démocratie.

Car pour le peuple grec, c’est bien d’une victoire dont il s’agit. Outre les aides alimentaires 
et énergétiques, environ 30 000 foyers vont recevoir une allocation logement de 70 à 220 euros mensuels. La loi prévoit également des mesures pour les personnes sans emploi et privées de sécurité sociale (plus de 30 % des Grecs).

Dans le même temps, un secrétariat général pour la lutte contre la corruption devrait être mis en place dans les prochains mois. Il sera chargé de «  contrôler les organes gouvernementaux et de renforcer leur rentabilité  », stipule le texte adopté hier au Parlement. Un premier pas concret vers les réformes demandées par les institutions européennes en échange du versement des 7 milliards d’euros promis à la Grèce le 20 février dernier.

Les effets des politiques d’austérité en Grèce En 2014, en Grèce, 2,5 millions de personnes se trouvaient sous 
le seuil de pauvreté (25 % de la population). 3,8 millions 
de personnes sont menacées de basculement dans la pauvreté 
à cause de la privation matérielle et du chômage. Une baisse 
de 31,3 % de ménages ayant accès au chauffage central 
entre 2013 et 2014 a été constatée. Le chômage des jeunes entre 15 et 24 ans a atteint 52 %.

Stéphane Audouard, L’Humanité


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