Les bavures policières en progression constante depuis 2002...

vendredi 9 mars 2007.
 

Le rapport annuel de la Commission nationale de déontologie de la sécurité (CNDS) remis ce jour relève une augmentation des plaintes pour des "bavures" policières. Elle juge également que certaines méthodes de la police comme la fouille à corps et le menottage sont utilisées abusivement.

Ainsi, la CNDS a transmis sept affaires aux parquets pour des poursuites pénales contre des policiers, et quinze au ministère de l’Intérieur pour des poursuites disciplinaires.

En 2006, les saisines de la CNDS ont augmenté de 25% par rapport à 2005 avec 140 dossiers enregistrés, contre 108 dossiers en 2005. La majeure partie des plaintes sur l’année 2006 portent sur l’action de la police nationale, notamment concernant les fouilles au corps.

La CNDS demande au ministre de l’Intérieur, Nicolas Sarkozy, d’instaurer enfin l’obligation pour l’officier de police d’exposer dans un procès-verbal les motifs de la fouille à corps. En effet, la commission relève que les policiers auraient tendance à menotter des personnes dans des circonstances où cette procédure ne s’impose pas, voire est illégale. Elle rappelle "que l’usage de la coercition implique nécessairement, selon la jurisprudence en vigueur, le placement en garde à vue".

La CNDS est une instance administrative indépendante créée en 2000 par le Gouvernement Jospin. Le président de la CNDS est Philippe Léger, un magistrat, nommé par Jacques Chirac.

(Articles de "LIBERATION") Menottages et fouilles côté policier Entre le 17 janvier 2006 et le 15 janvier 2007, 102 dossiers ont été instruits par la Commission nationale de déontologie de la sécurité (CNDS). Sa notoriété croissante va de pair avec l’augmentation des cas. Elle a enregistré 140 dossiers l’an dernier, soit une hausse de 25 % des saisines (1). 2006 confirme, encore une fois, une tendance de fond : la majorité des plaintes (69) concerne la police nationale, contre 14 attribuées à l’administration pénitentiaire (en forte augmentation), 8 à la gendarmerie nationale, 2 à la police municipale, 2 pour la police aux frontières et les centres de rétention. Un dossier relève de la sécurité privée.

Les cas se concentrent en Ile-de-France (59), Midi-Pyrénées (11) et Rhône-Alpes (10). Au chapitre de la police nationale, la CNDS égrène des dérives déjà pointées dans ses rapports : la fouille à corps trop souvent banalisée ; le menottage systématique ; des violences illégitimes graves. Elle revient sur l’audition du rescapé du transformateur de Clichy-sous-Bois, en 2005. « Alité dans la salle de réveil collective réservée aux polytraumatisés graves, [...] M. A., 17 ans, a été entendu par deux fonctionnaires de la PJ de Bobigny (93), dix-huit heures seulement après l’accident, dans un cadre juridique flou. »

Comme les policiers ou gendarmes, les surveillants de prison font l’objet de plaintes de plus en plus nombreuses auprès de la Commission nationale de déontologie de la sécurité (CNDS). Même si le mode de saisine de l’instance (via un député ou un sénateur) est encore moins évident pour un détenu. Dans son rapport 2006, publié aujourd’hui (lire ci-contre) et dont Libération dévoile l’essentiel, la CNDS donne un coup de projecteur sur ces plaintes contre l’administration pénitentiaire, qui représentent 14,9 % des dossiers reçus depuis 2001 (71 sur 474), et dresse une sorte de bilan de son action dans ce domaine.

Prisons : le retour de bâton

« Complaisance ». De 3 dossiers en 2001 (sur 19), on est passé à 22 en 2006 (sur 140), relate la commission. Dans la dernière fournée, 5 plaintes visent le seul centre pénitentiaire de Liancourt (Oise). Elles ont déjà fait l’objet d’avis extrêmement sévères de la part de l’instance, qui a réclamé des sanctions disciplinaires et pénales contre plusieurs surveillants de la maison d’arrêt

( Libération des 14 décembre 2006 et 22 janvier 2007).

Tabassages, humiliations... A Liancourt, un petit groupe faisait régner un « climat de terreur » sous la houlette du premier surveillant, B. C., qui « semble avoir exercé un pouvoir illégitime, arbitraire, de par la passivité, si ce n’est la complaisance, du directeur adjoint M. H. », écrit la CNDS.

Deux surveillants ont été suspendus en janvier, après avoir été condamnés par la justice (quatre mois de prison avec sursis pour violences). L’audience du 20 février devant leur instance disciplinaire a été reportée. L’administration pénitentiaire explique qu’elle attend l’issue de deux plaintes pénales visant d’autres surveillants pour statuer. Ce qui risque de prendre plusieurs mois. Dans l’un des cas, il y a eu mort d’homme : Olivier T., 32 ans, s’est pendu après un tabassage qui l’avait conduit à l’hôpital. Tous les dossiers ne sont pas aussi lourds, mais la commission explique qu’en six ans, elle a traité douze décès (dont sept suicides, notamment en quartiers disciplinaires). Les réclamations concernent les maisons d’arrêt, plus nombreuses et peuplées que les autres établissements. Toutefois, la CNDS signale que le pavillon E2 de l’hôpital Pasteur de Nice (Alpes-Maritimes) a été l’objet de deux saisines, pour un problème récurrent : l’annulation d’examens médicaux, faute d’escorte pour accompagner les détenus.

Cantines. Autre source de tensions entre détenus et surveillants : la gestion des « cantines » (vente de produits, notamment alimentaires) est souvent défaillante, surtout dans les établissements récents, où elle est confiée à une société privée. Les fouilles de cellules ou les fouilles corporelles intégrales fournissent leur lot d’avis critiques. « M. X... a été mis à nu et fouillé, ce qui ne semblait pas s’imposer au regard des dispositions du code de procédure pénale. » La phrase revient sans cesse, et suggère que les surveillants utilisent le procédé pour brimer les détenus identifiés, à tort ou à raison, comme des fauteurs de troubles.

La CNDS évoque aussi les placements en cellule disciplinaire de détenus très malades, ou les abus du recours à l’isolement. Au chapitre « usage disproportionné de la force », elle se penche sur les interventions musclées des groupes d’intervention de la police ou de la gendarmerie nationale (GIPN et GIGN) et des bataillons de surveillants créés en 2003 : les Eris (équipes régionales d’intervention et de sécurité). Elle relève, par exemple, l’utilisation d’un pistolet à impulsions électriques (Taser) sur une détenue. « Cette intervention faisait suite à la dénonciation d’un prétendu projet d’explosion de sa cellule à l’aide de l’extracteur d’oxygène dont elle disposait pour des raisons de santé », commente la commission, qui regrette que personne n’ait pensé à privilégier la parole.

Représailles. L’envoi de ces unités casquées, bottées, encagoulées ne s’impose pas, non plus, pour changer de cellule un détenu agité, remarque la commission. Surtout sans avoir tenté d’identifier la raison de son agitation : de multiples transferts l’éloignant un peu plus de sa famille.

Un détenu qui saisit la CNDS peut-il faire l’objet de mesures de rétorsion ? C’est ce qu’affirme l’un d’entre eux, A. A., qui avait dénoncé des violences subies à Moulins, en 2003, à la suite d’une prise d’otage. Dans une nouvelle plainte, il dit essuyer commentaires, menaces et punitions injustifiées, de prison en prison.


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