Smic à 1500 euros : une hausse légitime et réaliste (par André Laignel, Parti Socialiste)

vendredi 2 mars 2007.
 

La vocation du Smic est de permettre à chaque salarié d’avoir un salaire suffisant pour accéder à des conditions de vie décentes et pour bénéficier d’une participation au développement économique de la nation.

La hausse du Smic à 1500 euros n’est pas seulement légitime, elle est réaliste. Elle doit aussi encourager une dynamique de revalorisation de l’ensemble des bas et moyens salaires, des retraites, des minima sociaux.

La situation de bas salaires et de précarité qui sévit dans notre pays et qui a été sensiblement aggravée ces dernières années, constitue un grave handicap pour la croissance, qui repose, avec l’investissement, pour l’essentiel sur la consommation des salariés, et donc pour l’emploi.

Pour s’opposer à la revalorisation du Smic, l’argument tiré de la concurrence internationale est irrecevable. On sait, en effet, que les secteurs les plus concernés par le Smic ne sont pas ceux qui sont le plus exposés à la concurrence internationale, comme les services aux personnes, les cafés restaurants, ou encore les branches du commerce. Aujourd’hui, le Smic net se situe encore à moins de 1000 euros par mois. C’est nettement insuffisant.

Pour 12 dirigeants de sociétés du CAC 40 déjà en poste en 1999, on a pu calculer que la moyenne de leur salaire est passée entre 1999 et 2005 de 744 000 euros (59 fois le Smic) à 3 235 000 euros (221 fois le Smic). Les hausses qu’ils se sont octroyés sont 20 fois supérieures à celle du Smic, mais c’est pourtant la hausse du Smic qu’il faudrait freiner.

On prétend que la hausse du Smic horaire a pénalisé les entreprises. Cela est faux. Celles-ci ont bénéficié, à côté de gains de productivité importants, d’une substantielle augmentation des allègements de cotisations sociales. Désormais, 26% du Smic brut est pris en charge par l’Etat sous forme d’allègement de cotisations.

L’appauvrissement des salariés, des retraités et pensionnés, des bénéficiaires de minima sociaux, est une réalité et les inégalités ne cessent de se creuser. Pourtant, les statistiques officielles font état d’une progression du pouvoir d’achat des salaires et du Smic qui masque cette réalité. Il y a plusieurs raisons à cela.

Les évolutions sont calculées par rapport à l’indice des prix de l’Insee qui ne reflète pas la réalité de l’évolution du coût de la vie, telle qu’elle est vécue. L’exemple des loyers est significatif. Alors que cela représente souvent plus de 30 % d’un budget de salarié, le loyer n’intervient que pour 6,10 % dans l’indice Insee.

Selon la Fnaim (Fédération Nationale de l’Immobilier), les loyers ont augmenté de plus de 25% de 2000 à 2006. De la même manière, un grand nombre de postes de dépenses auxquelles on ne peut pas échapper ont connu de très fortes hausses. Ainsi, le fioul domestique, le gaz, les carburants, l’eau, les médicaments-non remboursés - qui sont de plus en plus nombreux et coûtent de plus en plus cher.

Ceux qui prônent une limitation de l’évolution du Smic feraient bien de s’interroger sur les conditions de vie de ces 3 millions de salariés contraints de se contenter de moins de 1000 euros par mois, et sur les conséquences catastrophiques qui en découlent, du point de vue de la cohésion sociale, de la considération dont peut encore jouir le travail et de la motivation des salariés.

Sur une année pleine, le passage du Smic à 1 500 euros pour quelque 3 millions de salariés représente un transfert en faveur des salariés de l’ordre de 9 milliards d’euros, soit 0,6% de la richesse créée dans le pays. Cet argent reviendrait dans le circuit économique sous forme de consommation, de moyens nouveaux de financement de la protection sociale, tandis que les dépenses publiques liées à la gestion de la crise sociale (surendettement, aides sociales etc.) seraient réduites.

En 2005, les dividendes versés aux actionnaires des sociétés du CAC 40 ont augmenté de 8 milliards d’euros (+ 50 %) atteignant à présent 24 milliards. 8 milliards de plus en faveur des actionnaires ou 9 milliards en faveur des salariés les moins favorisés tel est en effet le choix.

Il existe des données qui ne trompent personnes, d’autant qu’elles sont fournies par la Commission européenne elle-même : Entre 2000 et 2007, 172 milliards d’euros ont été prélevés des salaires afin de rémunérer le capital financier. Au nom de la concurrence, et du libéralisme, les gouvernements se sont lancés dans une course aux bas salaires avec des conditions de travail les plus flexibles c’est-à-dire précaires.


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