L’université en résistance

lundi 7 juillet 2014.
 

François Fillon indiquait cette semaine dans The Telegraph que les universités françaises sont « des foyers de marxisme » ! Quand on sait combien il est difficile depuis trois décennies de défendre la seule idée d’y faire un cours sur Marx, on comprend combien l’ancien premier ministre a manifesté en une phrase son ignorance complète du dossier de l’enseignement supérieur et de la recherche (ESR). Mais on saisit en même temps combien il fut, à sa manière, le « Margareth Tatcher de l’ESR ». L’autonomie des universités, c’est-à-dire la libéralisation du service public de l’ESR et la mise en concurrence des universités, pour lui, c’est clair, there was no alternative !

Pendant ce temps, dans le monde réel (celui qui subit les politiques d’austérité), la colère du « peuple » universitaire grandit depuis quelques semaines. Un appel retentissant, quelques jours avant le remaniement ministériel, a rassemblé plus de 11000 signataires, pour un réel changement, ici et maintenant, dans l’ESR. En réponse la re-nomination de Madame Firoraso a fini de cristalliser le mécontentement.

Le malaise est en effet immense en raison d’une déferlante qui, jour après jour, détricote un peu plus violemment un service fondamental pour notre avenir commun en imposant, comme dans tous les autres secteurs publics, les mêmes punitions et les mêmes faux remèdes : regroupements territoriaux, mutualisations, « rationalisation », « économies d’échelle », restrictions budgétaires, précarisation des personnels, pression manageriale, la même ritournelle inefficace et destructrice depuis des années, venue tout droit du privé à l’heure du nouveau management public, envahit les universités comme elle s’est emparée du rail, de l’énergie, des hôpitaux, des bureaux de poste, des écoles et même plus récemment des collectivités territoriales.

A quand une convergence des luttes pour la défense des services publics ? A l’image des cheminots et des intermittents, les universitaires se mobilisent. Un grand colloque pour « repenser l’autonomie » a réuni le 10 juin dernier tous ceux qui veulent avancer en ne se soumettant pas à l’arbitraire du dogme libéral au sein de l’université. Un appel du 18 juin a même été lancé cette semaine pour marquer la nécessité de résister ouvertement aux regroupements à marche forcée en cours.

La vraie révolte qui vient n’est pas là où François Fillon la voit. Elle n’est pas dans le désir de moins d’Etat, dans des attaques sans cesse renouvelées contre la puissance publique en vue de la réduire à sa plus faible expression. Universitaires de tout le pays, unissez-vous !, pourrait être le mot d’ordre d’un appel à défendre le service public de l’ESR qui réunirait bien au-delà de la poignée de marxistes ayant survécu dans la paysage universitaire, et rassemblerait tous ceux qui n’ont pas renoncé à exercer leur mission de service public.

Christophe Miqueu


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