Ukraine : ma position noir sur blanc

mercredi 12 mars 2014.
 

Je crois donc utile de préciser noir sur blanc ma position. Je le fais à gros traits pour que les esprits avancés des salles de rédaction puissent comprendre. Je le fais donc dans leur langue. Je dis ce que « je soutiens » et ce que « je condamne ». Comprenez-moi bien : mes lignes ici seront un panneau de signalisation pour les Mickey de la sphère médiatique. Allons-y : je ne soutiens pas Poutine. Ni les autorités de fait de l’Ukraine actuelles, ni les kleptocrates du gouvernement constitutionnel précédent. Mais, au contraire de Daniel Cohn-Bendit, je ne suis pas partisan de la guerre avec la Russie ! Et si je crois que les Russes n’ont rien à faire hors de leurs bases en Crimée, je condamne la tentative d’encerclement de la Russie par l’Otan qui en est la cause. Je condamne l’antisémitisme néonazi des ministres de fait au pouvoir en Ukraine, et je souhaite qu’ils soient rapidement expulsés de ce gouvernement.

Je le fais conformément aux recommandations de la résolution adoptée par le Parlement européen le 13 décembre dernier. J’en profite pour signaler que cette résolution « à propos de l’Ukraine » émane des sociaux libéraux, de la droite et des Verts, dont Daniel Cohn-Bendit. Elle dit sans aucune ambiguïté : « le Parlement s’inquiète de la montée du sentiment nationaliste en Ukraine, qui s’est traduit par le soutien apporté au Parti « Svoboda », lequel se trouve ainsi être l’un des deux nouveaux partis à faire son entrée à la Verkhovnaz Rada ; rappelle que les opinions racistes, antisémites et xénophobes sont contraires aux valeurs et principes fondamentaux de l’Union européenne et, par conséquent, invite les partis démocratiques siégeant à la Verkhovna Rada à ne pas s’associer avec ce parti, ni à approuver ou former de coalition avec ce dernier ». Ainsi, voilà ce que Cohn-Bendit en personne a signé et voté. Soutenait-il Poutine à cette occasion parce qu’il condamnait les néo nazis Ukrainiens ? Non, évidemment ! C’est pourtant ce qu’il me reproche d’avoir fait.

Ce n’est pas fini. Je condamne aussi les provocations du gouvernement de fait de l’Ukraine que sont sa demande d’adhésion à l’OTAN ou le retrait du russe comme une des langues officielles de l’Ukraine, d’ailleurs parlée majoritairement dans le Donetz et la Crimée. Je pense que les Etats-Unis n’ont rien à faire dans cette zone, et je condamne leur activisme belliqueux.

Bref, mon camp est celui de la paix contre la guerre. Car la guerre sur le vieux continent entraînant tout le monde comme par un enchaînement est redevenue possible. L’une des manières de l’éviter est de refuser de jouer avec des allumettes dans cette poudrière. C’est pourtant ce que font les va-t-en-guerre traditionnels de ce type de situation. Loin de faire le bilan des guerres qu’ils ont provoqué ou réclamé depuis 20 ans, ils en redemandent. L’Irak, la Lybie, l’Afghanistan, le Kosovo : ils n’ont rien appris, et ne veulent rien apprendre. Leur intérêt ce n’est pas la paix ou la guerre. C’est leur tropisme atlantiste fanatique. En attendant, les faits ne sont pas ceux que vendent les marchands de papier va-t-en-guerre. Ainsi concernant la présence militaire des russes. Elle ne comporte aucune illégalité selon le Général français Vincent Desportes qui le déclare sur BFM TV, le 2 mars 2014. Il dit : "La Russie ne viole aucune loi, qu’elle soit internationale ou autre. Selon les accords signés avec l’Ukraine, la Fédération est autorisée à disposer d’une force de 25 000 hommes sur le territoire ukrainien. Actuellement, même avec les derniers mouvements de troupes, les forces russes ne s’élèvent pas à plus de 15 000 hommes en Crimée, nous sommes encore loin du compte. Et l’Ukraine ne fait ni partie de l’UE, ni de l’OTAN ; de ce fait, ni l’UE ni l’Otan ne sont disposées ou autorisées à intervenir en Ukraine. "

Se mettre à distance du gouvernement de fait de l’Ukraine ce n’est pas en faire autant avec le mouvement insurrectionnel qui a renversé le pouvoir kleptocratique précédent. Au contraire. Pour moi, ce mouvement est riche de rebondissements, qui seront autant d’opportunités pour les forces qui pourront constituer une alternative. J’approuve les manifestations et l’insurrection de masse qui s’est dressé contre le pouvoir en place. Que les éléments les plus discutables aient pris la tête du processus contre les pouvoirs en place est tout simplement un fait de lutte commun à toutes les périodes révolutionnaires. Ce n’est peut-être qu’un mauvais moment à passer. Car il semble bien que les Ukrainiens de toutes les couleurs politiques conservent une grande énergie révolutionnaire intacte. Déjà plusieurs séquences révolutionnaires se sont enchainées sans que cette énergie se disperse. Or, que se doivent de faire les nouvelles autorités ? Une politique impopulaire au plus haut point pour rembourser la dette et faire face aux obligations du pays ?

Ne croyez pas que la situation va se détendre. Les intérêts engagés sont trop importants. Anglais, Français, Autrichiens, Allemands : les premières économies de l’Europe sont lourdement engagées en Ukraine et, en Russie, de toutes les façons possibles, les principales. Et j’ai bien noté qu’il est dorénavant accepté en Europe de chasser à coup de bâton un président élu et son gouvernement quand il est impopulaire, qu’il y a des ministres corrompus et que le peuple subi des sacrifices indignes tandis qu’une petite minorité s’enrichi indécemment. Je peux attester du fait que le message a été bien reçu sur le terrain ! En effet, dans la manifestation des cheminots européens à laquelle j’ai participé à Strasbourg, je ne compte plus ceux qui m’ont lancé : « alors il faut faire comme en Ukrainien pour être entendu ? ». C’est la première fois de ma vie politique depuis trente ans que j’ai entendu des travailleurs se référer à une insurrection populaire en cours hors de nos frontières. Que les révoltés ukrainiens en soient remerciés du fond du cœur !

Retour aux Mickeys des médias. Voici ma position en résumé. La révolte populaire Ukrainienne était légitime. Elle a été confisquée par un gouvernement illégitime et illégal dans lequel l’extrême droite a quatre ministres. L’énergie révolutionnaire des Ukrainiens n’est pas épuisée. La prochaine vague sera anti-européenne, c’est-à-dire hostile aux politiques que l’Union Européenne veut imposer là-bas pour récupérer sa mise bancaire et financière.

A l’heure actuelle l’enjeu numéro un est d’éviter la guerre. Cela signifie empêcher par-dessus tout la partition du pays : on ne touche pas aux frontières en Europe ! Ni ici, ni nulle part. La France devrait être un médiateur. Au lieu de cela, elle est enchainée derrière Merkel et les Etats-Unis. Elle s’est discréditée en s’alignant contre ses propres intérêts sur la position atlantiste. Le régime actuel est très provisoire. Il va discréditer la politique de l’union européenne sur place et provoquer de nouvelles vagues révolutionnaires. Mieux vaut être atteint par l’onde de choc d’une révolution populaire que par celle de la guerre.


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