Les siècles d’or du Moyen Âge africain

dimanche 2 mars 2014.
 

À l’encontre du funeste discours de Dakar de Sarkozy, l’historien François-Xavier Fauvelle-Aymar, par une belle mosaïque de la mémoire africaine, montre le vivant Moyen Âge du continent.

Le Rhinocéros d’or, Histoires du Moyen Âge africain, de François-Xavier 
Fauvelle-Aymar. Éditions Alma, 2013, 320 pages, 26 euros. L’Afrique n’est pas ce continent des origines qui, de Toumaï au temps des colonies, aurait à peine évolué. On se souvient du discours de Dakar dans lequel, sous la plume d’Henri Guaino, Nicolas Sarkozy avait, entre ignorance et mépris, soutenu en 2007 que « l’homme africain n’est pas assez entré dans l’Histoire ». Le dernier ouvrage de l’historien François-Xavier Fauvelle-Aymar permet de revenir sur cette méconnaissance.

L’africaniste y montre que, entre l’Afrique des pharaons ou de Carthage et celle des explorateurs et missionnaires européens, il y eut de grandes civilisations. Si elles n’ont pas développé de traces écrites, si elles se sont appuyées sur des traditions orales, de nombreuses traces non textuelles permettent, selon lui, d’en retrouver les contours  : découvertes archéologiques, fresques, bâtiments et tombeaux, mais aussi témoignages de voyageurs chinois, persans, arabes, jusqu’à ceux de Marco Polo ou Théodore Monod.

Ainsi, des rivages atlantiques du Sahara jusqu’à Madagascar, en passant par la Corne de l’Afrique, il y a bien eu un vivant Moyen Âge africain, dont «  les siècles oubliés et retrouvés ont la brillance et la fugacité d’un reflet d’or  », souligne François-Xavier Fauvelle-Aymar. En trente-quatre tableaux exposés selon un ordre chronologique s’étendant du VIIIe au XVe siècle, l’historien parvient à faire revivre ces sociétés et cultures enfouies.

Ainsi, le raffinement du rhinocéros d’or, statue du XIIIe siècle qui donne son titre à l’ouvrage, exhumée dans l’actuelle Afrique du Sud au cours de fouilles archéologiques, atteste de la vitalité d’une société disparue. Superbement illustré et enrichi de nombreux documents, l’ouvrage met l’accent sur l’importance des échanges commerciaux entre ces sociétés du croissant d’or du Moyen Âge africain et le monde arabo-musulman voisin. Ces échanges ont permis de retrouver des traces de ces cultures passées, alors que, dans les autres régions du continent africain subsaharien, l’historien ne trouve pas de sources sur lesquelles s’appuyer.

Au terme de cette lecture, le lecteur verra renouvelée sa vision de l’histoire de l’Afrique, conformément au souhait de l’africaniste, selon qui «  il faudra se défaire de l’image d’une Afrique “éternelle”, de l’Afrique des “tribus”, de l’Afrique “miroir des origines”  ». Grâce à la belle mosaïque de la mémoire africaine que compose François-Xavier Fauvelle-Aymar, les «  siècles obscurs  » dont parlait l’un des premiers africanistes français, Raymond Mauny, pourront être requalifiés de «  siècles d’or  ».

Nicolas Mathey dans L’Humanité


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