Municipales et PCF Paris : Retour forcé à la crise du logo

samedi 22 février 2014.
 

Le matin de mon retour de Bergerac, il y avait une grande agitation sur les listes de discussion du parti. L’affiche officielle d’Anne Hidalgo à Paris venait de sortir, ornée du logo Front de gauche. Elle est vécue dans nos rangs comme une gifle très dure. Après quinze jours d’attente, nous avions eu la publication d’un texte cauteleux, en pur charabia, dont on nous a d’abord annoncé que son application rendrait tout plus clair. Ensuite, lundi, Marie Pierre Vieu prenait des engagements fermes au nom de la direction communiste, devant les responsables communistes parisiens, devant Eric Coquerel, secrétaire national de notre parti, et Martine Billard, notre co-présidente. Le logo ne serait pas mis sur les documents officiels de la campagne socialiste. C’est-à-dire aucune affiche officielle, profession de foi, bulletin de vote. Une confirmation écrite était annoncée pour le lendemain. Cette disposition ne serait pas étendue à toutes les villes, mais elle le serait cependant là où les communistes font liste commune avec des ministres du gouvernement. Certes, c’était là une réponse à minima, mais elle permettait de tourner la page. En fait la réponse écrite et « claire » de la direction communiste est bien venue le mercredi. Elle a été publiée sur les murs de Paris : sous le visage de la candidate du PS, sur l’affiche officielle, on peut voir le logo du « Front de gauche ». Retour à la case départ, mais cette fois ci avec une duperie organisée. A cette heure, j’avoue ma perplexité. « La crise est derrière nous », avait pourtant déclaré Pierre Laurent. Je ne m’attendais pas à ce retour volontaire dans la crise. Pourquoi ce revirement ? J’essaie de le comprendre.

Pitoyable direction du PCF de Paris qui n’ose plus s’afficher sous son seul nom, ni assumer ses choix politiques sous son propre drapeau. Mais que le dépit ne nous égare pas. Je dis que le piège, ce serait de confondre ce pauvre avatar parisien avec le parti informel des communistes que je rencontre partout sur le terrain. Ceux-là tiennent parole, et restent faits de fraternité, d’honnêteté et de courage individuel. Le devoir d’unité et l’exigence de clarté peuvent marcher de pair. Avec tous ceux qui le veulent, de quelqu’horizon qu’ils viennent à gauche, il faut continuer à ouvrir la marche sur cette ligne de crête.

Pour le reste, à quoi bon discuter encore ? Je pense que nombre de citoyens qui s’intéressent au sujet se sont fait leur idée sur ce naufrage. Le problème, ce n’est plus tant l’exécutant de la manœuvre. Le problème vient plutôt des commanditaires à qui cette manœuvre profite. Madame Hidalgo le sait parfaitement : ce n’est pas le Front de gauche qui est sur sa liste. Doit-on en déduire qu’elle veut utiliser notre sigle pour détourner des électeurs en les trompant ? Madame Hidalgo est la bénéficiaire de cette tentative de détournement de suffrages. Mais l’a-t-elle sollicité ? Voilà la question qu’il faut se poser. Il ne faudrait pas accuser et découvrir ensuite que chacun, et même elle, aura été manipulée. Pour ma part, je n’imaginais pas Anne Hidalgo dans ce rôle médiocre. Ce n’était pas l’idée que je me faisais d’elle. De toute façon, la réplique viendra.

Elle viendra dans les urnes. Tout le monde le sait. D’où la hargne des socialistes et de leurs supplétifs sur le terrain. Le résultat nous sera acquis à proportion de la difficulté que nous aurons surmontée. La construction politique, qui résultera du travail accompli sous notre drapeau indépendant, élargit les rangs des têtes dures et l’influence de nos idées. D’ores et déjà nous sommes la troisième force dans les enquêtes, si orientées qu’elles soient. Oui, c’est dur pour nous. Nous affrontons toutes les difficultés habituelles plus une armée de tireurs dans le dos. Et la tenaille est de retour. D’un côté, des sondages aux questions bien orientées, où n’est jamais évoqué le nom du Front de gauche (le staff d’Hidalgo y veille avec soin) ni le mien, qui appuie pourtant très visuellement la liste de Danielle Simonnet. Celle-ci est présentée comme « liste PG », comme si nous étions seuls en lice. De l’autre côté de la pince, c’est de nouveau la mise à l’écart médiatique et le harcèlement de la bien pensance. Tous jouent la bienveillante cécité avec un PS parisien donné gagnant d’avance, pour qui cette élection est vécue comme une formalité.

Mon principe est le suivant : les dirigeants communistes parisiens font bien ce qu’ils veulent, c’est leur droit le plus strict. Mais ils n’ont pas le droit de nous impliquer dans des combinaisons avec les socialistes dont nous ne voulons pas. La conclusion qui s’impose c’est qu’il ne sert à rien de continuer à travailler comme nous le faisons, car nous sommes les dupes de ce système. Il n’a rien à voir avec la méthode de la révolution citoyenne dont il est l’antithèse. Et ce qui nous intéresse, nous, c’est tout ce qui, dans le processus électoral, permet la marche de la révolution citoyenne. C’est-à-dire tout ce qui fait avancer la conscience et la maitrise par le grand nombre du processus politique pour sortir de la « crise économique ». Certes, nous allons avoir de belles percées locales sur notre ligne là où nous sommes présents en tête de liste ou derrière un communiste, un NPA ou un Vert. Mais, globalement, le résultat est illisible pour l’alternative que le Front de gauche avait pour objet d’incarner, du fait de ces municipales à géométrie variable. Quelle image reste-t-il de notre sigle après un tel traitement ? Je ne sais pas. Je sais seulement pourquoi et comment on en est arrivé là. Tous nos niveaux d’action doivent donc en discuter. Cela n’est pas réservé aux militants des partis concernés. Les citoyens engagés devraient y prendre leur part. En tous cas, les organes de coordination comme notre Conseil national de ce week-end vont y réfléchir. Comment reprendre le fil de la construction politique pour laquelle nous avons fait tant d’effort depuis cinq ans ? Comment trancher les divergences d’analyses et de stratégies dans une coalition comme le Front de gauche sans une organisation commune ouverte à toute personne qui en fait le choix, sans être pour autant membre d’un de nos partis ? Bref, comment la stratégie qui a présidé à la construction du Front de gauche peut-elle reprendre son cours en dépit des blocages d’appareil ?


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