A gauche, avançons SEPAREMENT MAIS DANS LE MEME SENS, D’UNE VAGUE A L’AUTRE

samedi 10 février 2007.
 

Je n’aime pas beaucoup ce que j’observe sur le terrain. Beaucoup de gens sont tellement peu loquaces que je ne suis pas tranquille du tout. Par exemple quand je regarde les résultats des petites élections partielles par ci, par là. Ensuite quand je vois le résultat des éléctions aux chambres d’agriculture. Là, c’est le paradoxe de ce moment politique en concentré. 80 % des aides vont à 20% des agriculteurs. 10 % vivent sous le seuil de pauvreté. Et pourtant. La majorité va voter à droite. Et sinon à l’extrème droite. Quelques zozos pensent trouver la clef de l’explication en jettant des pierres sur José Bové à propos du recul de la Confédération paysanne. Ridicule. Pour moi la cause est plus profonde. En milieu rural, comme ailleurs, l’alternative au libéralisme parait hors de portée. Et aucune force politique de gauche n’est en état de faire le travail d’éducation populaire de masse que cela nécéssite pour ramer contre le courant.

Là comme ailleurs les logiques pourries de l’individualisme, du chacun pour soi et des "valeurs" de pacotille de l’industrie de l’information et du spectacle pénétrent en profondeur. J’ai souvent répété que la gestion des patrimoines éléctoraux était une façon de faire de la politique totalement en dehors du temps réel. La pire illusion étant de croire que la masse captive du "vote utile" peut, à elle seule, faire l’élection.

Le problème posé à la gauche est celui de la reconquête idéologique. Faute de quoi, dans la confusion des mots, des valeurs, des symboles, le noyau central, le socle s’effrite, se disperse. Une partie s’éparpille en divers composants de plus en plus élémentaires, réduits à deux ou trois identifiants, symboles, fidélités familiales et logos. Le reste se disperse en tourbillons d’incertitudes. Et une bonne part passe à l’état gazeux se dissipant dans tous les interstices des blocs voisins.

Attention camarades, il y a très grand danger en ce moment. Non seulement la frange est largement entamée mais le noyau central donne des signes d’implosion. Voir des vieux élécteurs socialistes me dire qu’ils vont voter Bayrou comme au vieux temps des alliances pourries de la SFIO et du MRP, entendre des militants de culture d’extrême gauche me parler des socialistes comme le faisaient les staliniens de la troisième période, voila qui me glace.

Je ne suis pas rassuré quand je vois le niveau d’invectives de ce qui circule sur la toile entre gens et groupes de gauche. Je suis bien conscient que la sphère internet est un monde à part, bien typé, avec un effet de loupe très déformant. Mais quand même ! Non seulement ça tire à vue, mais il est interdit de refuser de participer au carnage. Je me fais donc allumer parce que "à force de vouloir être gentil avec tout le monde".... je "refuse de dénoncer".... ceux qui devraient l’être. Naturellement les dénonciations recommandées changent selon les signataires.

C’est consternant. C’est suicidaire. C’est follement dangereux. Tout ce sectarisme va nous couter très cher à l’heure des additions. Et pourquoi faire ? Dénoncer, montrer du doigt, accuser, mettre au pied du mur, pourquoi faire ? Arracher une voix de gauche d’ici pour l’attirer là, quelques centimètres de convictions plus loin. Et cela au prix de clameurs et d’insultes qui en dissuadent vingt autres de s’intéresser à des enjeux portés par de tels violents ? Et sans faire une seule prise sur la masse confuse des indifférents , des désorientés, des désemparés que ces batailles de chiens au jargon incompréhensible repoussent de l’autre côté où l’on parle clair et cogne sans vergogne d’abord ses adversaires. Quand j’y pense je me dis que les hétitiers désinvoltes ont fini de manger l’héritage des années du programme commun et de la gauche structurée.

Tous les démagogues anti parti, anti programme, à qui les médias hystérisants avaient collé de belles ailes de notoriété ont tout saccagé pour complaire à leurs admirateurs des déjeuners en ville. A présent où sont passées les sotnias d’adhérents au rabais, ignorants et arrogants comme des peignes ; sur quel marché voit-on les donneurs de leçons tracter ? faire le porte à porte ? coller des affiches ? préparer des mobilisations et toute cette patiente école quotidienne de la gauche pour arracher les consciences à leurs enfermements de révolte sans horizon, de colère aveuglée ou de résignation épuisée ? Mais pour être franc : où le leur propose-t-on ? Bon. Stop.

La suite qui me vient sous la plume me facherait encore avec un nombre de personnes qui ne sont pas dans mes moyens à cette heure. Maintenant la campagne socialiste va entrer dans la phase où il s’agit de construire une opinion de gauche informée et motivée. J’éspère que ceux qui l’organisent au PS garderont la mémoire du vent de panique de cette semaine et du nom de ceux qui étaient déjà cachés sous la table avant même d’avoir reçu un seul coup de canon. Une campagne ne consiste pas à ramasser des voix comme les abbés d’ancien régime allaient à la messe dans leur "bénéfice" exotique, une fois par an, tondre leurs ouailles.

A l’exception de la campagne de 1988 que nous avons mené au pas de course la baïonnette au fusil, toutes les autres présidentielles ont été menées sous une ample et constante mitraille. Jeudi la gauche sociale va sortir dans la rue. Puis nous allons avoir foule le 11 au meeting de Ségolène Royal. Le cahier des propositions sera sans aucun doute consistant. La gauche des gens simples n’aime pas l’ambiance d’assassinat médiatique contre elle. Les gens sont inquiets. Ils veulent donner un coup de main. Ils vont le faire. S’ils le font ils submergeront de nouveau tout ce que les appareillons auront prévu. Ce sera moment de fête. Mais aussitôt que Ségolène Royal va avoir parlé les adversaires vont se déchaîner. Il va pleuvoir de la boue. Les médias et les porte plume du fiel vont se "lacher" comme ils disent ! Donc attention. Gare à la vague de revers ! Les pleutres vont de nouveau avoir le tournis.

Quand je me tourne vers mes autres camarades du non de gauche, je me rassure aussi en voyant la campagne sérieuse et pédagogique de Marie George Buffet en direction des secteurs les plus fragiles de l’opinion de gauche. Le papier de "l’Humanité" hier sur les quartiers miniers du Pas de Calais était un modèle de lucidité et d’énergie militante. Seuls les sectaires les plus bornés peuvent se réjouir de voir la candidate communiste enterrée vive dans le silence des médias au moment où elle fait ce travail indispensable ! Une autre chose que tout le monde devrait noter, car cela atteste des réserves de colère du pays, c’est le nombre de gens qui se déplacent pour assister à ses meetings. Et les têtes qui s’y trouvent ne sont pas celles qui viennent chez les autres. Peut-on faire sans eux ? Tant mieux s’ils se remobilisent.

Je crois qu’un bon militant socialiste (les autres ne sont pas exclus du tout) devrait aussi avoir à portée de main le programme des communistes pour le connaitre, dialoguer et dès fois (mais oui ça arrive aussi, vous le savez bien !) le donner à quelqu’un d’autre qu’il ne parvient pas à convaincre.

Voila ce que je crois : la campagne commence seulement. N’écoutez pas les blaireux médiatiquement conditionnés qui reniflent les trous d’air. C’était quoi en 1981 entre janvier et mars ? D’ailleurs le vieux était parti s’oxygéner en Chine fin février début mars ! C’est stupide de se faire dicter son rythme et son calendrier par les autres. La, on a pris un coup ? Entre l’explosion de l’autre gauche et les revers de Ségolène Royal la gauche a trébuché. Et alors ? Ca permet de sortir de l’euphorie nombriliste. Il y aura de multiples rebonds. La tâche des ces jours ci est de stopper le rouleau compresseur qui nous déferlait dessus. Les socialistes doivent faire leur travail et ils vont le faire. Mais l’autre gauche de même. A gauche, il faut un cessez le feu entre factions pour faire face, certes chacun de son côté mais tous dans le même sens.


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