François Hollande choisit Gallois plutôt que Jaurès

dimanche 18 novembre 2012.
 

Réagir à chaud sur la conférence de presse du président de la République n’est pas chose simple. Sachant que la nouvelle majorité présidentielle et parlementaire n’est en place que depuis six mois, on se voudrait mesuré, résolument critique lorsqu’il le faut, mais approbateur dans les domaines où pourraient apparaître des orientations de gauche. Sauf que, ce mardi 13 novembre sera inévitablement reçu, par le peuple français, comme l’aveu d’abandons en cascade.

Ainsi, François Hollande a-t-il nié tout virage de sa politique, mais il est resté sourd aux mises en garde qui montent de la gauche et du mouvement syndical pour persévérer dans la voie des concessions aux forces de l’argent.

Il avait pourtant promis de tenir la dragée haute au monde de la finance et de rétablir le principe républicain d’égalité. Durant deux longues heures, nos concitoyens se seront surtout vus parler d’un pacte supposé de compétitivité faisant la part belle aux logiques de rentabilité financière de court terme, lesquelles ne peuvent qu’appauvrir encore le pays, le plonger dans la récession, le faire glisser sur la voie calamiteuse d’un chômage et d’une précarité aggravés.

Il s’était engagé à renégocier le traité d’austérité européen. Il a passé sa rencontre avec les journalistes à revendiquer sa bonne relation avec Madame Merkel et à anticiper les désidératas de la droite conservatrice allemande, des élites libérales de l’Union européenne, des marchés avides de toujours plus de profits. Terrible déni de réalité, au moment où, de Berlin ou de Bruxelles, on enjoint les vainqueurs de mai et juin de mettre en œuvre ce qu’on appelle des « réformes » dont le courage prétendu n’a d’égal que la négation de toute disposition orientée vers les besoins de la population.

Aussi, lorsque s’éteignirent les projecteurs et que furent rangés micros et caméras, avait-on le sentiment que François Hollande venait de troquer la référence à Jaurès pour celle à Louis Gallois. Le nom de ce personnage, symbole d’une technostructure au service de la finance, aura été répété à trop de reprises pour que cela soit innocent. À entendre le nouveau locataire de l’Élysée, on ne pouvait mettre plus de 24 heures à appliquer ses recettes… Tant pis si celles-ci sont puisées dans le vieux fond de commerce d’un néolibéralisme dont la faillite éclate chaque jour un peu plus, à mesure que l’Europe s’enfonce dans la crise, que des millions d’hommes et de femmes en sont réduits à vivre d’expédients, que l’emploi est toujours davantage sacrifié sur l’autel de la course aux profits, que 60 ans de droits conquis par le monde du travail sont piétinés pour permettre aux classes possédantes de sortir aux meilleures conditions de la crise qu’elles ont elles-mêmes provoqué.

Il faut le redire sans crainte de se répéter : l’urgence à gauche est au rassemblement de toutes les énergies qui ne veulent pas voir mis à mort le changement promis. Le "parti du capital" a su, depuis l’éviction de Nicolas Sarkozy, mettre avec succès sous pression le nouveau pouvoir. C’est dorénavant la mobilisation de la justice et du nombre, celle du monde du travail pour le dire autrement, qu’il faut opposer aux privilégiés de la naissance et de la fortune. Les manifestations intersyndicales de ce 14 novembre en seront le premier acte.

Le temps presse, si l’on veut conjurer la déception d’un peuple qui attendait une autre politique en débarrassant la France d’une droite cynique et arrogante.


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