Cocktail détonnant

jeudi 27 septembre 2012.
 

Le 13 septembre dernier, Les Echos publiaient une synthèse sans appel. Les instituts de conjoncture économique abaissent les uns après les autres leurs prévisions de croissance pour 2013. 0,3 % en moyenne alors que le gouvernement base son budget sur une estimation de 0,8 %. La banque Natixis est plus optimiste que ses consœurs. Son conjoncturiste l’explique : « Notre scénario n’intègre à ce stade que les mesures déjà votées et j’attends la présentation du budget pour le réactualiser. Si la France devait à tout prix tenir son objectif de 3 %, ma prévision de croissance ne serait plus de 0,7 % mais probablement inférieure à 0 %. » Oui vous avez bien lu ! Les services de prévision des banques estiment eux-mêmes que la politique qu’elles réclament tue la croissance. Dès lors, faute de dynamisme de l’activité, seul un institut sur 18 prévoit que la France atteindra l’objectif de 3 % de déficit en 2013.

Le lendemain 14 septembre, le sommet des ministres de l’économie de la zone euro à Chypre décide de donner plus de temps au Portugal pour atteindre ses objectifs de réduction des déficits. Cette fois, c’est Le Monde qui raconte. Le Portugal « fait, de l’avis général, son maximum » mais « les recettes fiscales du Portugal ont baissé davantage qu’attendu, en raison de la faible demande intérieure, alors que les dépenses publiques progressaient pour cause, entre autres, de chômage de masse. » N’avions-nous donc pas raison de dire que l’austérité aggrave le déficit ? Oui, l’avouent-ils avec une soudaine franchise. « Le pays doit donc bénéficier d’un peu de temps pour tenir ses objectifs budgétaires, sans prendre les mesures supplémentaires d’économies qui pourraient s’avérer fatales au retour de la croissance, après deux années de récession. Si nous ne regardons que la consolidation budgétaire sans tenir compte du ralentissement économique, nous risquons de nous enfoncer dans la récession », observe le ministre belge des finances. On croirait du Front de Gauche dans le texte.

Si l’austérité tue l’activité et qu’il s’avère, même en « faisant son maximum » impossible de tenir les engagements de réduction des déficits négociés avec la Troïka, pourquoi faut-il le TSCG ? Ce traité européen aggrave des objectifs déjà imbéciles et intenables et punit de sanctions automatiques les pays qui ne les atteignent pas. Pourquoi les chefs d’Etat ont-ils approuvé un renforcement du carcan austéritaire à l’heure où leurs gouvernements décident de l’assouplir ? Pour quelle raison les « marchés financiers » exigent-ils la ratification d’un texte dont ils anticipent des effets récessifs ? Tous ces gens sont intelligents. Leur objectif ne peut donc être la réduction des déficits. Le plus important pour eux ce sont plutôt les « efforts » que leur prétendue « règle d’or » est censé justifier aux yeux des peuples. Le TSCG est un instrument au service de la mise aux normes du profit des sociétés européennes. Cette modification du rapport de forces s’exprime économiquement, socialement mais aussi politiquement à travers le dessaisissement du pouvoir budgétaire des Parlements qui constitue l’aboutissement ultime du TSCG. Pour imposer leurs vues les détenteurs du capital financier doivent retirer au peuple le pouvoir qui lui reste. C’est ce qu’ils appellent dans un incroyable retournement de sens le fédéralisme ! Le 30 septembre sera donc à la fois une marche contre l’austérité et un épisode dans la grande bataille qui se mène pour la défense et la reconquête de la souveraineté populaire. Un cocktail qui s’est toujours avéré détonant.


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