Le MEDEF ne se sent plus d’arrogance !

mercredi 12 septembre 2012.
 

Laurence Parisot avance aussi que le projet de taxation à 75% des revenus supérieurs à un million d’euros « comporte de sérieux risques » ! On frémit. Et elle prévient : « une telle taxation ne doit en aucun cas s’appliquer sur les cessions d’entreprises ou de parts d’entreprises ». C’est noté Jean-Marc ? Oui c’est noté. Dès le lendemain Pierre Moscovici rassurait les masses patronales inquiètes. Il suffisait de demander.

Le premier ministre, qui voit bien l’inquiétude des experts rejoindre le diagnostic du Front de Gauche, recourt donc à une désinformation poussive. Il a affirmé avec cet air de bedeau préoccupé qui n’appartient qu’à lui : « il n’y a pas d’inscription dans le marbre de l’obligation d’équilibre budgétaire ». C’est à se demander si Jean-Marc Ayrault a lu le traité ! En tout cas, il ferait bien de relire l’article 3. C’est celui qui institutionnalise la règle d’or, car il interdit tout déficit public de plus de 0,5% de la richesse d’un pays. En novlangue bruxelloise, ça donne cette merveille : « la situation budgétaire des administrations publiques d’une partie contractante est en équilibre ou en excédent ; [cette] règle est considérée comme respectée si le solde structurel annuel des administrations publiques correspond à l’objectif à moyen terme spécifique à chaque pays, avec une limite inférieure de déficit structurel de 0,5 % du produit intérieur brut. ». Le traité prévoit donc que la Commission européenne propose un calendrier pour que chaque Etat parvienne à cet objectif. Il prévoit aussi qu’un « mécanisme de correction » soit déclenché « automatiquement » en cas de non-respect de la limite de 0,5%. En un mot, le traité grave la règle d’or dans le marbre, quoiqu’en dise Jean-Marc Ayrault. Il le sait. Comment pourrait-il ne pas le savoir ?

C’est d’ailleurs pour cela que sa nouvelle amie Laurence Parisot, la présidente du MEDEF, soutient ce traité de toutes ses forces. Dans Le Monde du 28 août, elle déclarait « on ne doit pas se poser la question de la ratification du traité européen : il faut le signer des deux mains ». Si je vous parle de Laurence Parisot c’est pour montrer à quel point la danse du ventre de Jean-Marc Ayrault et de dix ministres à l’université d’été du MEDEF est lourde de sens. Le MEDEF est plus que jamais à l’offensive. Dans la même interview, Laurence Parisot multiplie les provocations libérales. Ainsi, elle réclame : « le gouvernement doit avoir une stratégie pro-business, favorable aux entreprises. Pour cela, il doit travailler à réduire les dépenses publiques deux fois plus qu’il n’augmente les recettes. Pour un effort de 30 milliards d’euros en 2013, il faut 20 milliards de réduction de la dépense publique et 10 milliards au maximum de recettes supplémentaires, ce qui serait déjà très lourd ».

Ces recettes supplémentaires où les trouver ? « Avec justice » annone Ayrault. On connait notre réponse. Il faut taxer les revenus du capital comme ceux du travail. D’ailleurs dans la phase où il nous collait à la culotte, François Hollande avait repris cette idée dans ses engagements. Forte du défilé des bourgeois de Calais ministériels à son université d’été, madame Parisot ne sens plus aucune gêne à avancer ses pions sans fard ! C’est ainsi qu’elle s’est senti libre d’affirmer sans autre démonstration : il « serait également néfaste d’aligner la fiscalité du capital sur celle du travail ». Tel quel. Un des fondements de l’égalité républicaine c’est l’égalité devant l’impôt. Elle le balaie d’un revers de main. Ce n’est pas tout. Elle avance aussi que le projet de taxation à 75% des revenus supérieurs à un million d’euros « comporte de sérieux risques » ! On frémit. Et elle prévient : « une telle taxation ne doit en aucun cas s’appliquer sur les cessions d’entreprises ou de parts d’entreprises ». C’est noté Jean-Marc ? Oui c’est noté. Dès le lendemain Pierre Moscovici rassurait les masses patronales inquiètes. Il suffisait de demander.

Sur cette lancée pourquoi s’arrêter ? Elle défend donc avec acharnement les privilèges des grands patrons. Voici comment. Elle s’oppose ainsi à ce que les biens professionnels soient soumis à l’impôt de solidarité sur la fortune : « ce serait un hara-kiri de l’économie française ! Il faut au contraire préserver l’exonération d’ISF dont bénéficie l’outil de travail ». De quoi parle-t-elle ? Quel est cet « outil de travail » aujourd’hui exonéré d’ISF ? Un exemple. Médiapart nous apprend que Liliane Bettencourt ne payait pas l’impôt sur la fortune (ISF) sur les actions « L’Oréal » qu’elle détient parce qu’elles sont considérées comme des « biens professionnels ». Le résultat est que Liliane Bettencourt n’est pas assujettie à l’ISF sur ces 14 milliards d’euros. Son ISF n’est calculé que sur un patrimoine de 2,2 milliards d’euros alors que sa fortune est estimée à 17 milliards d’euros !

Décidément, quel est le résultat de la visite d’Ayrault au MEDEF ? Madame Parisot ne fait même pas semblant de prendre en compte ce que le premier ministre est censé incarner après la défaite de Nicolas Sarkozy. Dès lors en reprenant ses poncifs éculés et refrains de toujours, son propos fonctionne comme un camouflet. Ainsi quand recommencent les pleurnicheries pour « baisser le coût du travail ». Elle défend l’idée d’une baisse de cotisations sociales qui serait compensée par une hausse de la TVA et de la CSG ! Encore plus fort que Sarkozy qui ne proposait « que » la TVA ! Enfin, dans la discussion sur la « sécurisation » des salariés, elle exige que soit proposée davantage de « flexibilité pour les entreprises » ce qui en est l’exacte négation. Bref, Laurence Parisot s’oppose à tout partage des richesses et tout rééquilibrage des droits entre patronat et salariés. La campagne électorale n’a pas eu lieu, les citoyens n’ont pas voté. La droite n’a pas perdu. Les droites passent, les gouvernements changent, pas le MEDEF, état-major du vrai pouvoir aujourd’hui intact : celui de l’argent.


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