Défaite électorale des libéraux au Québec. La gauche en marche, succès des étudiants...

samedi 15 septembre 2012.
 

7) Élections au Québec : Défaite des libéraux et première victoire des étudiants (par Sébastien Polveche, PG)

Les élections provinciales qui viennent d’avoir lieu le 4 septembre ont conduit à la défaite du Parti Libéral du Québec (PLQ), au pouvoir depuis 2003. Le Parti Québécois (centre-gauche, souverainiste) l’emporte de justesse avec 32% contre 31% au PLQ (droite, fédéraliste) et 27% à la Coalition Avenir Québec (centre-droit, fédéraliste). Avec 54 députés sur 125, le PQ pourra former un gouvernement minoritaire. Ces élections ont été marquées par une forte mobilisation des électeurs, avec un taux de participation de 73,7% contre 57% lors des élections de 2008.

Si le PLQ a bien résisté à la percée du Parti Québécois, il essuie une défaite symbolique dans la circonscription du Premier Ministre sortant, Jean CHAREST. Ces élections ont également été marquées par le renforcement du parti de gauche Québec Solidaire, qui obtient 6% contre 3,8% aux élections précédentes. Cette poussée de Québec Solidaire est fortement contrainte par le mode de scrutin majoritaire à un tour et le vote stratégique. Néanmoins, Québec Solidaire progresse fortement dans plusieurs circonscriptions de Montréal (Laurier Dorion, Outremont, Hochelaga Maisonneuve, Sainte Marie Saint Jacques) et y devient la deuxième ou troisième force politique. Ce parti conquiert une seconde circonscription à Montréal : celle de Gouin, voisine de la circonscription déjà détenue par QS à Mercier. Françoise DAVID, co-présidente de Québec Solidaire y bat lourdement Nicolas GIRARD, député sortant et bien implanté du PQ.

Ces élections ont été convoquées durant l’été ; la campagne électorale a duré en tout et pour tout 35 jours. Le gouvernement libéral de Jean CHAREST faisait face depuis la mi-février à une grève étudiante historique contre sa décision d’augmenter les frais d’inscription. Il a cherché à instrumentaliser le conflit avec le étudiants, en prétendant incarner l’ordre contre la chienlit. Jean CHAREST a joué et a perdu les élections...

Le nouveau chef de gouvernement du Québec, Pauline MAROIS, a annoncé qu’elle supprimerait par décret la hausse de 1 625 $ des frais d’inscription et abrogerait la Loi 78 adoptée en toute hâte par le gouvernement CHAREST pour réprimer le mouvement étudiant.

En tout état de cause, les étudiants ont gagné ! Ils ont bloqué la hausse (slogan du mouvement). Durant ses 6 mois de lutte, ce mouvement social est parvenu à coaliser autour de lui de larges secteurs de la société civile : écologistes, syndicalistes, professeurs, militants politiques, familles. Il ne s’est pas posé comme un mouvement catégoriel mais comme un mouvement de toute la société, en remettant en cause l’ensemble de la politique du gouvernement : taxe santé, Plan Nord, exploitation des gaz de schiste, corruption... Les étudiants ont puissamment contribué à réveiller le peuple québécois et à faire renaître la gauche politique au Québec.

Le Parti de Gauche se félicite de la défaite du gouvernement libéral et des résultats encourageants de Québec Solidaire. Le Parti de Gauche adresse également un message de solidarité aux étudiants québécois mobilisés durant plus de 6 mois.

6) Premières leçons d’un scrutin : Un peu la gueule de bois ?

Article de Presse-toi à Gauche, "tribune pour une gauche québécoise en marche"

Nous avons été tant mobilisés et enfiévrés, les uns comme les autres, par la bataille électorale de cet été 2012, que le fait de retomber brutalement sur terre au soir du 4 septembre n’a pas toujours été facile. Notamment pour les militants le plus impliqués de Québec solidaire. Après tout, beaucoup ne se sont-ils pas fait prendre —vaille que vaille— au jeu des apparences : celui d’une scène électorale où tout semblait soudainement possible, laissant ainsi la porte ouverte à nombre d’espoirs immodérés et prédictions fantaisistes.

Or les résultats auxquels nous nous sommes heurtés ont au moins le mérite de nous rappeler quelques incontournables constats.

Premier constat : une droite néolibérale toujours forte

Autant sur la scène sociale, l’hégémonie néolibérale avait été fortement ébranlée lors du printemps Érable 2012, autant sur la scène politique la traduction de ce phénomène n’ a été que partielle, à n’en laisser résonner au fond des urnes que l’écho assourdi et lointain. Certes le Parti libéral passe dans l’opposition (avec 50 députés) et Charest-est-il battu et bien battu dans son comté de Sherbrooke, l’obligeant à la démission (ce qui n’est pas rien !). Mais cette défaite n’est pour le Parti libéral nullement un désastre, puisque, avec 31% des votes obtenus, il se trouve à seulement 1% des péquistes (54 sièges) et reste une opposition officielle très puissante. Et si l’on additionne le pourcentages de la CAQ (27% ; 19 sièges) et des libéraux 31% (= 58%), on réalise très nettement comment le poids de la droite néolibérale dure reste prépondérant sur la scène politique québécoise. Et cela, même si en face d’eux, on plaçait le PQ et on y ajoutait les 2 sièges gagnés par Amir Khadir et Françoise David ainsi que le pourcentages de Qs et Option nationale (32%+ 6% + 1,9% = 39,9%), on serait encore loin du compte.

Deuxième constat : un Parti québécois porté à gouverner à droite

Ce premier constat doit être renforcé par le fait que le PQ n’est quelque part plus que l’ombre de lui-même : navire amiral de la souveraineté échoué sur les rochers néolibéraux ou les récifs de la prudence cauteleuse et du repli identitaire. Désormais parti gouvernemental, mais minoritaire, et fortement minoritaire, il aura toutes les peines du monde à faire avancer le moindre de ses projets progressistes, a fortiori celui de la souveraineté. Et dans la mesure où QS ne peut lui apporter les voix suffisantes qui lui manquent (il lui en faudrait 63), il sera nécessairement porté à gouverner (qu’on pense au futur budget de la province) vers la droite. Le soutien non anodin de Julie Schneider, épouse du milliardaire et très néolibéral Karl Pierre Peladeau, à Pauline Marois à la veille du scrutin est à cet égard plus qu’un symbole !

Troisième constat : un bond non négligeable mais décevant pour Québec Solidaire

Quant à Québec solidaire, il reste encore à la 4ième place, loin derrière les 3 vieux partis avec seulement 2 députés et un 6% des suffrages. Certes bien des facteurs expliquent un tel score (la question du vote, stratégique, les distorsions du vote uninominal à un tour, le parti-pris de médias de masse et en particulier de Radio-Canada). Bien sûr aussi quelques très bons scores ont été effectués dans une dizaine de comtés [1], et partout Qs a fait un bond non négligeable par rapport à 2008 : en gros un doublement des suffrages et de sa députation.

Mais pour bien des militants le résultat peut paraître frustrant, eu égard à certains comtés « prenables » ainsi qu’aux efforts consentis et surtout au professionnalisme et aux capacités organisationnelles et politiques dont a fait preuve Québec solidaire tout au long de cette campagne. Il suffit de penser à ses pancartes électorales (tranchant si fortement avec celles des autres), à son slogan DEBOUT (si en phase avec la période), à ses machines électorales de comté si militantes, et globalement au fait qu’aucun faux pas n’a été fait lors de sa campagne. Sans parler bien sûr de la très bonne prestation de Françoise David lors du débat des chefs et de l’indéniable effet d’entrainement médiatique que cela a produit dans tous les comtés.

Tout en somme pour penser raisonnablement obtenir plus ce 4 septembre !

Une répétition générale

Ce sera là sans doute le seul côté positif de ce résultat quelque peu décevant : nous rappeler que pour un parti comme Qs –parti clairement de gauche et indépendantiste— la lutte n’est pas seulement organisationnelle. Elle est d’abord et avant tout politique. Elle est une lutte de grande ampleur, et ne se joue pas seulement —ne peut pas seulement se jouer— sur la scène électorale, tant celle-ci reste un terrain miné. Pour contrebalancer le pouvoir des élites sociopolitiques et médiatiques, celui si puissant des groupes financiers, Québec solidaire doit compter sur les mouvements sociaux d’origine populaire (groupes communautaires, écologistes, féministes, syndicaux, etc.), sur leur appui résolu et uni ainsi que sur leur engagement sans fausse note à ses côtés sur la scène sociale et politique.

Or il en manque beaucoup pour qu’un tel appui lui soit acquis, et pour que Québec solidaire parvienne à être ce parti autant des urnes que de la rue qu’il aspire à être. À preuve les hésitations et faux fuyants de centrales syndicales comme la CSN taraudées par les doutes du vote stratégique. À preuve aussi ces impossibilités de s’entendre autrement que dans Gouin et Nicolet avec Option nationale ! À preuve ces difficultés du mouvement étudiant à rappeler ses revendications d’une même voix sur la scène électorale !

Gageons seulement que la fragilité du gouvernement minoritaire péquiste et que la probabilité d’une nouvelle bataille électorale dans les 18 à 24 prochains mois, le pousseront à travailler de toute urgence aussi dans cette direction.

Manière de tirer leçon de cette campagne et de faire de ces élections de l’été 2012… une indispensable et salutaire répétition générale.

Notes

[1] Mercier : 46, 73% ; Gouin : 46,15% ; Sainte Marie Saint Jacques : 25,43% ; Laurier-Dorion : 24,34% ; Hochelaga-Maisonneuve : 23,69% ; Outremont : 18,02% ; Rosemont : 14, 52% ; Taschereau : 11,60%.

http://www.pressegauche.org/spip.ph...

5) Les libéraux chassés du pouvoir au Québec

Par ici la sortie pour le Parti libéral québécois. Le parti du Premier ministre sortant Jean Charest a été devancé par le Parti Québécois lors des législatives de mardi au Québec, mais sans obtenir la majorité, ce qui limitera sa marge de manoeuvre.

Avec environ 32% des voix, le Parti Québécois (PQ) enlève 54 des 125 sièges à l’Assemblée nationale du Québec, contre 50 sièges et 31,1% pour le Parti libéral (PLQ) du Premier ministre sortant Jean Charest, selon les résultats quasi définitifs. Troisième, la Coalition Avenir Québec de François Legault (CAQ, centre droit) a obtenu 19 sièges et 27% des voix, tandis que le petit parti de gauche indépendantiste Québec solidaire remporte 2 sièges.

Le PQ reprend le pouvoir à la tête de la province francophone après une éclipse de neuf ans, et Pauline Marois devient la première femme chef de gouvernement de l’histoire de la Belle province. Elle devra diriger un gouvernement minoritaire, sans pouvoir s’appuyer sur une majorité parlementaire. Pour y parvenir, elle devrait avoir au moins 63 députés dans une assemblée comptant 125 membres.

La fin de la hausse des droits de scolarité

"Je crois qu’elle devra modérer les positions qui ont été mises de l’avant, notamment sur la souveraineté, par ses partisans les plus radicaux", estime le politologue québécois François Gélineau. En revanche, elle ne devrait pas avoir de difficulté à revenir sur la hausse des droits de scolarité contre laquelle la jeunesse s’est mobilisée en masse pendant plusieurs mois, puisqu’elle a le pouvoir de le faire par décret exécutif.

Fusillade au Parti québécois. Un homme armé a ouvert le feu dans la salle où Pauline Marois s’adressait à ses partisans après la victoire de son Parti québécois aux élections provinciales, faisant un mort, a annoncé la police mercredi. L’homme a surgi dans l’enceinte du Métropolis tandis que la chef de file des séparatistes québécois se trouvait sur scène et il a ouvert le feu sur deux personnes. L’une d’entre elles est décédée. Pauline Marois n’a pas été touchée. Evacuée de la scène par ses gardes du corps, elle est revenue un peu plus tard. Selon le porte-parole de la police Danny Richer, un homme d’une cinquantaine d’années a été arrêté. Il est également soupçonné d’avoir mis le feu à l’arrière du bâtiment.

Source : http://www.humanite.fr/monde/les-li...

4) Entretien avec le candidat de Québec Solidaire, sorte de Front de Gauche québecois

Québec Solidaire : le Plan Nord, "c’est vraiment l’archétype du paradis néolibéral"

C’est journée d’élection au Québec. Amir Khadir est le candidat du parti Québec solidaire, coalition de la gauche progressiste au Québec, rassemblant notamment le Parti communiste Québécois. Il nous parle de ses ambitions et des enjeux de l’élection.

Des élections se tiennent ce 4 septembre au Québec, plus tôt que prévu. Les étudiants québécois ont-ils entrainé ce mouvement dans la population tel que Jean Charrest, le Premier ministre québécois, a été tenu d’organiser de nouvelles élections ?

Jean Charrest est pris en tenaille entre deux impératifs. L’un, responsable de la tenue un peu plus hâtive d’élections, est la commission d’enquête sur la corruption dans l’administration des contrats publics, attendue depuis deux ans et demi, et que nous avons poussée. Ses travaux ont commencé en mai, et l’essentiel des révélations doivent se produire à partir de la mi-septembre. Ce que voulait faire le gouvernement Charrest, de l’avis de tous les observateurs, c’est déclencher des élections à la fin avril dernier.

Le problème, c’est que le mouvement étudiant l’en a empêché. Le gouvernement était donc pris en tenailles entre ce mouvement étudiant, et les révélations plus compromettantes de la commission d’enquête à venir à partir de la mi-septembre. Ce qui fait que c’est le mouvement étudiant qui a refermé la fenêtre d’opportunité, la dernière dont disposait le gouvernement Charrest, en avril-mai, le repoussant à septembre.

Une question semble revenir au centre du débat : l’indépendance du Québec. Face à la dette du Canada, face à un gouvernement québécois qui s’est discrédité, les Québécois sont-ils en train de se saisir de leur conscience souverainiste ?

Certains, dans le corps souverainiste, aimeraient que ce genre d’automatisme ou de transfert politique s’opère. Malheureusement, pour nombre d’entre nous, ce n’est pas nécessairement de cette manière là que les gens abordent les élections. Je pense que pour l’instant, l’essentiel de l’élection tourne autour des questions d’intégrité, de transparence, de la bonne gestion des fonds publics. D’autres enjeux comme la santé, l’éducation sont des soucis majeurs, permanents d’une élection à l’autre, surgissent avec force. La question de l’indépendance, bien qu’elle soit brandie par le gouvernement Charrest, n’est pas l’objet de l’élection, tout le monde en est conscient. C’est une des raisons pour laquelle la campagne de M. Charrest, qui veut se poser en défenseur de l’unité canadienne, ne fonctionne pas très bien. C’est aussi une des raisons qui expliquent la chute constante des libéraux dans les sondages malgré le fait que M. Charrest brandit cette « menace », plusieurs fois par semaine, devant la population disant : si vous élisez le parti québécois, c’est une autre bataille référendaire qui s’engage sur la souveraineté. Mais ce n’est pas comme ça que la population le perçoit. Bien qu’à mon avis, avec un gouvernement canadien qui adopte des orientations de plus en plus réactionnaires, en porte-à-faux avec les grands consensus sociaux au Québec, le terrain va devenir plus fertile pour les indépendantistes, c’est certain.

Le taux de chômage est de 7,8% au Québec. Charrest a sorti un plan Grand Nord qui comporte une privatisation des biens publics. Les droits de scolarité devaient être augmentés. A votre avis, la population sent-elle une contradiction entre la politique menée et la situation dans laquelle elle est ?

Jusqu’à un certain point. Les problèmes évoqués se rejoignent. On assiste avec le gouvernement Charrest depuis de nombreuses années, à une volonté marquée de diminuer la charge de l’Etat au profit des entreprises, d’alléger la fiscalité des entreprises, mais surtout de faire surgir une fiscalité de plus en plus grande pour les investissements privés. On assiste ainsi, pour la santé, à une privatisation sournoise qui ne dit pas son nom. Le fait de vouloir endetter davantage les étudiants, c’est d’importants bénéfices et marchés captifs solvables pour les institutions prêteuses : il suffit de regarder la manne que cela représente aux Etats-Unis, la 2ème dans les crédits personnels après les hypothèques sur les maisons.

Mais comme le Québec est aussi une espèce de paradis pour les industries extractives, notamment en raison d’une vieille loi excessivement favorable aux investisseurs privés que tous les gouvernements ont échoué à réformer, depuis 150 ans, sauf entre 1874 et 1918 par un Premier ministre Honoré Mercier, très nationaliste. Le gouvernement a tablé majoritairement dessus pour ouvrir un boulevard aux investisseurs privés, pour exploiter le grand Nord à grand frais pour le contribuable puisque cela doit coûter au bas mot 25 millions d’investissements payés par le gouvernement du Québec, donc, par nos poches, pour ouvrir les routes, faire parvenir l’électricité dont ont besoin ses investisseurs pour opérer sur le territoire. C’est vraiment l’archétype du paradis néolibéral à son mieux ! Autrement dit : un Etat complètement au diapason et au service des fonds publics, des investisseurs privés, pour générer de l’activité économique à profit privé. Jean Charrest est un artisan des politiques néolibérales des plus habiles, car il a réussi à les faire sans les gros sabots d’un Nicolas Sarkozy ou les politiques d’affrontement des autres dirigeants que l’on a connues ces 20 dernières années. C’est un type excessivement habile de ce point de vue.

Dans ce cadre, Québec Solidaire progresse mais son ascension est moins forte que ce à quoi on pouvait s’attendre.

Nous sommes victimes du mode de scrutin !

Malgré tout, quels thèmes, parmi ceux que vous défendez, recueillent le plus l’attention de l’opinion publique ?

D’abord, pour plus du quart des Québécois, leur premier ou deuxième choix est quand même Québec Solidaire. Les grands thèmes que nous avons réussis à mettre en avant, tout le monde en débat au Québec : des ressources naturelles, de la nécessité d’une meilleure réappropriation publique de nos ressources… On le doit grandement à Québec Solidaire. C’est un sujet que nous avons évoqué dès notre premier travail à l’Assemblée nationale en janvier 2009. Ce qui fait qu’aujourd’hui comme jamais au cours des 40 dernières années on parle de la nécessité du renvoi de la loi sur les mines et de se réapproprier les ressources naturelles.

Ensuite, les transports collectifs : l’investissement dans le transport électrique collectif, que nous avons mis en avant et que le PQ [NDLR : Parti Québécois, social démocrate et favori de l’élection] a récupéré sans y associer les budgets nécessaires. Comme c’est improvisé, ça ne tient pas la route dans leurs perspectives budgétaires globales.

Nous avons mis en avant la nécessité d’un régime de pension universel qui soit adéquat et réponde aux besoins de toutes les personnes en difficulté. Nous avons aussi mis en avant la nécessité au Québec d’un revenu minimum garanti. Ces deux sujets ne se sont toutefois pas imposés dans les débats actuels. Enfin, il y a la question de l’éducation où il y a un clivage entre nous qui proposons la gratuité de l’université et différents partis qui, à différents niveaux veulent les augmenter, ou les indexer. Bref, c’est pour ces raisons que le QS a l’appui des jeunes.

3) Vers une victoire de la gauche au Québec ?

Les élections au Québec se tiendront le 4 septembre. Louise Beaudoin, députée du Parti Québécois, le parti social-démocrate favori des élections, nous a accordé un entretien dans lequel elle dresse un portrait de l’offre politique à la veille de ce scrutin anticipé.

Les étudiants ont-ils participé à avancer les élections ?

C’est une des justifications que M. Charrest a utilisées pour expliquer ces élections qui sont précipitées. Il aurait dû les faire en décembre ou début 2013. Mais s’il a décidé de les faire là, c’est parce qu’il espérait que son thème de la loi et l’ordre serait prépondérant. Mais il y avait une autre raison plus profonde. Il y a une commission d’enquête sur la collusion et la corruption dans la construction et l’attribution des contrats publics qui commence à siéger le 7 septembre. Ça a beaucoup inquiété M. Charrest qui sait que son parti, le parti libéral, va être épinglé par cette commission. Il voulait faire les élections avant que la commission commence à siéger.

La question du Plan Grand Nord aurait aussi réveillé la conscience collective québécoise au même moment où l’on demandait aux étudiants de payer plus. Les Québécois sont-ils en train de renouer avec la question de l’inégalité sociale, de l’inégale répartition des richesses ?

Sûrement. Cette dimension est également présente. Les étudiants ont sonné le réveil sur la question des inégalités sociales, c’est au cœur leur combat. Il y a eu un mouvement qui a dépassé le printemps érable, la simple question des droits de scolarité et touchait par exemple le Plan nord et la création et la redistribution des richesses.

C’est pourquoi QS (Québec Solidaire, coalition de gauche progressiste) prend un peu d’avance…

QS ne peut pas faire plus de 10% des votes, ils ne peuvent pas former le gouvernement.

Ils captent des voix sur le Parti québécois…

Sans doute. Mais le parti québécois fait une campagne de centre gauche, plus proche du PS que du PC ou de Mélenchon. Le PQ fait une campagne sociale-démocrate mais qui plait à 32-33% des électeurs ce qui lui donne une avance. Sera-t-elle suffisante pour former un gouvernement majoritaire, c’est que l’on verra le 4 septembre. Mais déjà QS a dit que sur un certain nombre de questions, si jamais le gouvernement québécois, du parti québécois, était minoritaire, il pourrait l’appuyer.

M. Charrest a-t-il une possibilité d’être reconduit ?

Ça m’étonnerait qu’il puisse gagner les élections. Mais on peut toujours se tromper car c’est une campagne très compliquée, avec beaucoup de partis et un mode de scrutin uninominal à un tour. Une élection créée pour le bipartisme or nous avons plusieurs partis y compris à droite. Mais Charrest, à mon avis, est en baisse.

Vous êtes confiante pour le PQ ?

Oui ! Mais je suis prudente parce que comme je vous dis, il y a beaucoup de partis, c’est donc difficile à dire. Mais normalement, le PQ devrait être élu.

2) Québec. Après les manifs, la sanction des urnes  ?

Confronté à 
la mobilisation des étudiants, le premier ministre libéral québécois, Jean Charest, est en mauvaise posture aux élections législatives anticipées de 
ce 4 septembre.

Le « printemps d’érable » en cours au Québec depuis février trouvera-t-il une traduction lors des législatives du 4 septembre  ? Balayeront-elles le gouvernement du premier ministre libéral, Jean Charest, au pouvoir depuis 2003  ? C’est ce qu’espèrent les deux principaux partis de l’opposition  : le Parti québécois (PQ, tendance sociale-démocrate) et Québec solidaire (QS, coalition de gauche composée d’écologistes, de socialistes, de communistes, militants associatifs).

« Déclencher des élections anticipées était une stratégie de la part de Jean Charest qui ne voulait pas avoir à affronter le verdict de la commission d’enquête », analyse Yan Smith, candidat de Québec solidaire. Le premier ministre pourrait être, en effet, au cœur d’affaires qui inquiètent la population québécoise. Depuis plusieurs mois, de nombreuses voix s’élèvent pour dénoncer des pratiques et des attributions de marchés publics douteuses. À tel point qu’une commission d’enquête a été mise en place, les premières conclusions seront rendues… après les élections.

Un malaise social profond

Charest a pourtant invoqué un autre prétexte pour justifier la dissolution de l’Assemblée  : les mouvements sociaux au Québec, celui des étudiants en tête. Lorsqu’ils ont appris que le gouvernement voulait augmenter les droits de scolarité de 82 % sur sept ans, ils ont entamé une grève largement suivie, soutenue par une bonne part de la population. Auparavant, un mouvement, Occupy Montréal, avait déjà révélé l’indignation d’une frange importante des citoyens. Face à cette situation révélatrice d’un malaise social profond, Charest a d’abord fait passer la loi 78, criminalisant les rassemblements. Les étudiants n’ont pas cédé. Et si une majorité des Québécois les soutenaient, une importante minorité préférait suivre le premier ministre, et son discours sur le maintien de l’ordre. Des élections en forme de quitte ou double ont donc été décidées début août, histoire de ne laisser à l’opposition qu’une campagne courte.

Elle caracole malgré tout en tête des intentions de vote. Dans ce système traditionnellement marqué par le bipartisme, Charest n’arrive qu’en troisième position, concurrencé sur sa droite par la Coalition Avenir Québec, conservatrice, et sur sa gauche, par le PQ et QS. Car, en réalité, depuis 2003, «  il n’y a aucune amélioration du sort des Québécois  : les emplois sont essentiellement à temps partiel, dans la fonction publique, les contrats de six mois se sont multipliés. La précarité augmente  », explique Yan Smith. Alors que le taux de chômage est de 7,8 %, Charest a mené une politique libérale (privatisations des ressources publiques, affaiblissement des politiques sociales, hausse des taxes, sauf pour les entreprises…). Les inégalités sociales se sont accrues. Parallèlement, la dette de la Belle Province a plus que doublé, de 111,5 milliards de dollars canadiens en 2004, elle s’élève à 245 milliards en 2011.

L’insatisfaction a grandi au fil des ans. QS pourrait renforcer sa place à l’Assemblée même si le scrutin (uninominal majoritaire à un tour) lui est défavorable. Cette coalition a fait campagne sur les questions sociales, de santé, d’enseignement et environnementales. Il est le seul à s’être clairement exprimé contre toute hausse des droits de scolarité dans les universités. Et si le PQ arrivait en tête, mais ne pouvait former qu’un gouvernement minoritaire, «  nous pourrions le soutenir si ses décisions vont dans le sens social, favorable à la population  », dit Yan Smith à l’Humanité.

Fabien Perrier

1) Du mouvement étudiant à la renaissance d’une vraie gauche

Québec : Manifeste des professeur.e.s pour la protection de la démocratie et du droit de protestation étudiant

Québec : Vive la renaissance d’une vraie gauche !

Vers une révolution citoyenne au Québec ?

Québec : Une loi digne d’un Etat totalitaire

Québec : la jeune génération mobilisée

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