Donnons le pouvoir aux citoyens !

samedi 8 septembre 2012.
 

Peut-on se contenter des institutions héritées de la Ve République ?

Appel collectif

L’élection au suffrage universel du président de la République a personnalisé à un point tel le débat politique que celui-ci est désormais sous la dictature des sondages, des petites phrases, des experts et du marketing médiatique. Les citoyens sont réduits à un rôle de simples spectateurs consommateurs d’images. (…) Le présidentialisme est une machine à déresponsabiliser. Nous sommes dans une conception consumériste et non citoyenne de la politique. De ce fait, la politique, ou plus exactement le politique n’inspire plus confiance, mais plutôt le rejet, avec, comme conséquence, une abstention de plus en plus massive aux élections, notamment dans les milieux populaires.

On retrouve aussi, au niveau de nombreuses grandes collectivités, la démarche présidentielle et autocratique de la Ve République, renforcée par la décentralisation telle qu’elle a été mise en oeuvre. La « course aux places » et les enjeux de pouvoir se substituent fréquemment à la bataille des idées, ce qui est aggravé par la spécificité bien française du cumul des mandats. La personnalisation du pouvoir est devenue le coeur de notre démocratie. Le « je » a pris le pas sur le « nous » (…) Dans ces conditions, la participation réelle et active des citoyens à la gestion des collectivités et à la vie publique en général est pratiquement inexistante en France.

Pourtant, la complexité croissante des rapports sociaux, la crise systémique, les enjeux et les défis planétaires rendent indispensable l’intervention de l’ensemble des citoyens, y compris les plus en difficulté, dans tous les aspects de la vie de notre pays. Car ce qui est désormais en jeu, c’est l’émergence d’un autre type de développement, humain, écologique et démocratique, à l’échelle du monde et des territoires (…) Cela appelle des réponses concrètes afin de construire une société plus fraternelle, une société plus respectueuse des hommes, des femmes et de l’environnement. Et ce n’est pas un homme (ou une femme) seul, même président de la République, qui est en capacité de le faire !

Celle-ci ne pourra se construire que dans une mobilisation consciente et collective du peuple citoyen. La participation de tous au pouvoir de décision et d’orientation de la société est le plus fort facteur de cohésion sociale et de dynamisme.

Il est temps de sortir des formules incantatoires sur la démocratie, pour commencer à la mettre concrètement en actes, dans des pratiques de participation citoyenne, aux côtés d’un système représentatif reconstruit et revivifié. C’est crucial pour l’avenir de la démocratie.

Il est impératif :

– De mettre fin au présidentialisme et de refonder la République en mettant un terme à la Ve République, en exigeant la convocation d’une Assemblée constituante afin de construire, avec l’ensemble des citoyens, une nouvelle Constitution pour une VIe République démocratique, laïque, social et écologiste pour donner au Parlement de véritables pouvoirs et le contrôle sur l’exécutif, assurer la participation et le contrôle du peuple sur les lois, repenser l’organisation des territoires et la gouvernance de ceux-ci, développer la démocratie partout, dans tous les domaines et à tous les niveaux.

– De repenser et de revivifier le modèle représentatif, en sortant du carriérisme en politique, en concevant l’engagement électif comme un engagement temporaire au service de l’intérêt général. Ce sera le moyen d’entraîner la participation d’un plus grand nombre à l’exercice d’un mandat d’élu, de favoriser le rajeunissement et la mixité sociale.

Des pistes d’évolution, parmi d’autres, vont dans ce sens : scrutin proportionnel à toutes les élections, interdiction du cumul des mandats et limitation dans le temps de l’exercice du mandat, gouvernance collégiale et partage du pouvoir dans les collectivités, rotation des responsabilités (…), séparation, dans les collectivités, du pouvoir législatif du pouvoir exécutif, interdiction de la présidence de deux exécutifs (…), introduction d’un référendum révocatoire à mi-mandat (…), évaluation, chaque année, de l’action du président de la République, des ministres, des parlementaires, des exécutifs des collectivités, par des jurys citoyens indépendants désignés par tirage au sort, mise en place d’un statut de l’élu (…), parité dans toutes les strates institutionnelles et droit de vote aux étrangers résidants dans notre pays depuis un certain nombre d’années.

– De construire une nouvelle culture politique avec le peuple au centre, renforcer l’intervention des citoyens sur tous les territoires, du local au mondial. La démocratie n’est pas seulement un mode de désignation des représentants, c’est surtout une manière de vivre ensemble, l’expression même de la dignité ; c’est de décider des affaires communes, de les mettre en oeuvre et de se construire un destin commun, basé sur la solidarité, l’équité, la justice sociale, le respect des hommes, des femmes et de la nature, la coopération, l’ouverture au monde et aux autres cultures (…) Ce qui suppose : le droit à la participation citoyenne inscrit dans la Constitution (…), l’instauration de la citoyenneté et de la démocratie dans les entreprises, des dispositifs multiples, notamment droits de pétitions (…), forums participatifs, conférences de citoyens (…) conseils de quartier, droit de saisine (…), des modalités pratiques telles que tirage au sort et/ou panel de citoyens respectant la réalité sociale, la parité et l’échelle des âges (…), et des moyens de communications (…) gérés par des collectifs citoyens dans les territoires de proximité, en toute indépendance.

– D’informer et de former : le renouveau de l’éducation populaire et citoyenne est une exigence, que chaque citoyen devienne maître de son destin. Il faut favoriser l’accès de tous aux informations liées aux politiques publiques, et créer les conditions d’une appropriation collective des questions et des problématiques soulevées par les citoyens (…) Pour ce faire, il est nécessaire de favoriser l’émergence de médias pluralistes et indépendants des groupes de pression, de multiplier les universités populaires et citoyennes (…), de disposer d’une formation initiale qui inclurait des modules de formation à la citoyenneté active (…), de mettre en place une évaluation démocratique des politiques publiques sans laquelle il n’y a pas de citoyenneté active.

Il ne peut y avoir de véritable démocratie participative active si le citoyen n’est pas assuré que les choix faits et discutés avec les décideurs sont bien appliqués, et donnent des résultats ; s’ils correspondent bien aux objectifs de départ, à l’intérêt général, à la cohésion sociale, sociétale et territoriale.

Nous sommes au début d’un long processus et cela d’autant plus que la démocratie entend relier entre elles toutes les échelles, du local au mondial, qu’elle porte sur tous les défis auxquels notre pays est confronté, qu’elle est au coeur de la gouvernance multiniveaux, multi-acteurs et multisecteurs de l’approche territoriale, et qu’elle s’articule avec un projet politique global, constructeur d’autres rapports sociaux, d’autres institutions et d’une autre civilisation.

Il n’y a pas d’autres voies et alternatives pour répondre aux défis planétaires et à la survie de l’humanité.

Alors il est temps d’oser la démocratie !

Premiers signataires :

Paul Ariès, politologue, directeur du Sarkophage ;

Francis Combes, écrivain ;

Jean-Claude Depoil, syndicaliste paysan, responsable agricole FDSEA03 ;

Catherine Gégout, ancienne élue à Paris ;

Marc Lacreuse, coanimateur du collectif national Éducation populaire et transformation sociale ;

Alain Laurent, consultant, président de Territoires responsables ;

Jean-Claude Mairal, ancien président du conseil général de l’Allier ;

Christian Maurel, sociologue, cofondateur du collectif national Éducation populaire et transformation sociale ;

Yannick Monnet, membre du Conseil national du PCF ;

Héloïse Nez, enseignante ;

Patrick Norynberg, DGA développement social et territorial ;

Yves Rémy, directeur du Cidefe ;

Bernard Teper, coanimateur du Réseau d’éducation populaire (REP) ;

Bernard Vasseur, philosophe ;

Pierre Zarka, Association des communistes unitaires


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