Pourquoi les banques pourraient supprimer près de 200.000 emplois en Europe

mercredi 11 juillet 2012.
 

Afin de retrouver une rentabilité à deux chiffres, les banques européennes devront économiser 40 milliards d’euros, au cours des quatre prochaines années, selon le cabinet Roland Berger.

Les salariés des banques européennes n’ont pas fini de manger leur pain noir. Celles-ci pourraient supprimer 180.000 emplois sur le Vieux Continent, d’ici à 2016, selon une étude présentée ce mercredi 4 juillet par le cabinet de conseil Roland Berger. Un chiffre qui représente 6% des effectifs du secteur bancaire européen, et qui est deux fois supérieur au dégraissage effectué de 2007 à 2011 (90.000 postes supprimés). Et encore, il s’agit là du meilleur des deux scénarios envisagé par Roland Berger : si la croissance économique ne revient pas dans la zone euro au cours des quatre prochaines années, alors les banques européennes pourraient perdre 360.000 emplois sur les plus de 3 millions que compte le secteur.

40 milliards d’euros de réductions de coûts d’ici à 2016

C’est à ce prix qu’elles seront en mesure de renouer avec une rentabilité des capitaux propres à deux chiffres. Celle-ci, qui s’élevait à 17% en 2007, avant que n’éclate la crise des subprimes (crédits hypothécaires américains à risque), est tombée à 4% l’an dernier, sous le poids de la crise financière. Les banques européennes ont donc pour objectif de ramener leurs coûts de 61% du résultat opérationnel aujourd’hui, en moyenne, à 55% d’ici à 2016. Soit une baisse de 6 points en quatre ans seulement, le double de la diminution réalisée en 15 ans ! Et ce, dans une zone euro promise à une maigre croissance économique, dans les prochaines années, ce qui limitera la hausse des bénéfices opérationnels des banques. Pour parvenir à leur objectif d’un ratio coûts sur résultats de 55% d’ici quatre ans, elles devront donc réduire leurs coûts de 40 milliards d’euros, avertit Roland Berger.

Le front-office perd son statut de vache sacrée

Alors, bien sûr, les banques européennes vont commencer par serrer la vis à leurs prestataires externes, par comprimer les bonus (rémunérations variables) de leurs collaborateurs et, plus largement, les salaires. Mais il leur faudra également tailler encore dans leurs effectifs. Ces coupes claires ont débuté en septembre 2011, quand, crise de la dette oblige, les autorités bancaires ont exigé des banques européennes qu’elles accélèrent le renforcement de leurs fonds propres. Particulièrement gourmandes en capitaux propres, les activités de banque de financement et d’investissement (BFI) ont payé le plus lourd tribut à ce que les banques ont pudiquement appelé des « plans d’adaptation. »

« Nous devrions assister à une deuxième vague de réduction de coûts, très forte, dans la BFI, avec cette fois-ci un impact sur le front-office », pronostique Fabrice Asvazadourian, associé senior chez Roland Berger. Pour qui les traders et autres commerciaux - par opposition au back-office, en charge des tâches administratives - ne sont plus des « vaches sacrées. » Il faut dire que le front office, BFI et banque de détail confondues, représente 60% des coûts d’une banque...

15.000 à 20.000 fermetures d’agences

C’est dire si la sacro-sainte banque de détail va à son tour faire les frais des plans de rigueur des établissements financiers. Roland Berger parie sur 15.000 à 20.000 fermetures d’agences bancaires en Europe, sur un total de 240.000 aujourd’hui, au cours des quatre prochaines années. Une véritable inversion de tendance, les réseaux ayant continué à croître, ces dernières années.

« Les départs en retraite ne seront plus remplacés », prédit Fabrice Asvazadourian. Les services financiers spécialisés, comme le crédit à la consommation, ne seront pas non plus épargnés. « Dans ce domaine, les banques ont multiplié les produits, les canaux de distribution, leur présence à l’étranger, il faut simplifier tout cela », juge Stéphane Potier, associé chez Roland Berger.

18% des salariés âgés de plus de 55 ans

Une nécessité de simplification qui touche également les fonctions support, comme la gestion des risques. Après la crise financière de 2008, « les banques ont créé très vite des systèmes compliqués, onéreux, afin de répondre aux nouvelles exigences réglementaires », rappelle Stéphane Potier. Et d’insister : « Ces fonctions (de gestion des risques) ont été les seules à voir leurs effectifs augmenter, ces dernières années. »

Seule consolation, en France, 18% des salariés des banques sont âgés de plus de 55 ans. Les suppressions de postes s’effectueront donc en grande partie sur la base de plans de départs volontaires. « Nous ne sommes pas dans le schéma de la sidérurgie (et de ses plans de licenciements massifs) mais plutôt dans celui des télécommunications », souligne Stéphane Potier. Avant de nuancer : « Enfin, avant l’arrivée de Free... »

Christine Lejoux


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