Consultation au PCF : participer au gouvernement, une idée qui ne fait pas recette

dimanche 24 juin 2012.
 

Appelés à voter sur l’éventualité d’entrer ou pas au gouvernement Ayrault, les adhérents du PCF en ont débattu un peu partout dans le pays. Reportage dans trois sections locales, alors qu’à la conférence nationale du PCF réunie aujourd’hui, les communistes ont voté à une écrasante majorité leur refus d’entrer au gouvernement.

Le Conseil national du PCF, réuni lundi, a soumis aux adhérents un bulletin de vote qui leur propose d’adopter trois décisions  : refuser, dans les conditions actuelles, d’entrer au gouvernement  ; poursuivre le combat pour une vraie politique de changement  ; et poursuivre et amplifier la démarche citoyenne engagée avec le Front de gauche.

À Gentilly, continuer le Front de gauche sans entrer 
au gouvernement

«  Je ne veux pas de ministres communistes au gouvernement. C’est clair et net.  » C’est Marcel qui le dit. Et tant d’autres après lui. Pas un seul militant du PCF, à Gentilly, Arcueil, Cachan et au Kremlin-Bicêtre, dans le Val-de-Marne, présents, lundi soir, à l’assemblée des adhérents, ne veut en entendre parler. «  Je me demande même pourquoi la question se pose  », souligne-t-il, particulièrement suspicieux à l’égard de la direction qui a lancé la consultation sur ce thème. Lisant et relisant certains des passages à haute voix du texte accompagnant le bulletin de vote, les intervenants sont nombreux à s’interroger sur «  l’ambiguïté de la formulation  ». «  À partir de quelle concession du PS estime-t-on que les conditions sont réunies pour entrer au gouvernement  ?  » s’interroge Philippe. La perte du député sortant Pierre Gosnat, éliminé par Jean-Luc Laurent (MRC), «  tout simplement parce qu’il a posé à côté de Hollande sur l’affiche électorale  », laisse un goût amer. D’autant que le Front de gauche progresse en voix et en pourcentage sur l’ensemble de la circonscription. Mais ce n’est pas la déception qui guide le choix des militants. Eux veulent que continue l’aventure du Front de gauche. «  Avec la campagne nationale, à la présidentielle, on a ouvert une voie sur ce qu’est notre avenir, celui du mouvement révolutionnaire en France  », explique Patricia. Or, pour elle et d’autres participants, occuper un fauteuil ministériel cela équivaudrait à «  entrer dans le jeu  » du gouvernement socialiste. Lequel «  veut neutraliser jusqu’au bout le Front de gauche qui entend rompre avec le capitalisme  », poursuit Patricia. Comme elle, beaucoup préfèrent continuer «  à porter le drapeau du Front de gauche. Je ne vois que ça comme solution  ». Visiblement, les adhérents avaient davantage envie de s’exprimer sur l’avenir du PCF et du Front de gauche que sur l’entrée ou non dans l’équipe Ayrault. Il n’empêche, plusieurs d’entre eux ont signalé leur incompréhension face à un bulletin unique englobant, à leurs yeux, des questions aussi diverses.

À Montpellier, 
on se focalise sur la mise en mouvement des citoyens

Lundi, quelques heures après la tenue du Conseil national du PCF, les militants de la section de Montpellier étaient appelés à donner leur avis lors d’une assemblée générale. «  C’est une AG exceptionnelle centrée sur ce que les communistes doivent décider  », introduit Claude Avenante, secrétaire de section, avant de donner lecture des trois points du bulletin de vote adopté par le CN. Si certains estiment que «  le PCF est un parti de gouvernement  », la porte laissée ouverte, dans le texte, à une participation sous certaines conditions ne fait pas l’unanimité. «  Quelles seraient les conditions favorables à notre entrée au gouvernement  ? s’interroge un jeune militant. Une hausse du Smic de cent euros  ?  » Un ancien analyse  : «  On reste polarisé sur les problèmes parlementaires. La stratégie du Front de gauche n’est pas là. Il faut une mise en mouvement politique des gens. On a fait bouger le paysage et il faut rassembler le peuple français sur des positions radicales.  » Jean enchaîne  : «  Le rapport de Pierre Laurent est clair quand il dit que “la bataille du changement recommence maintenant sans attendre”. Il faut enclencher une démarche de futur. Sur le bulletin de vote, la question la plus importante est la troisième  : “pérenniser le Front de gauche”. C’est sur ce point qu’il faudrait travailler.  » Pour Annie, «  notre action au Parlement est limitée. Il faut amener les gens dans la rue. Le premier paragraphe du texte ne dit pas autre chose. Si on veut le changement, il faudra aller dans la rue  », insiste-t-elle. «  C’est impossible qu’on réussisse si on ne fait pas évoluer le Front de gauche  », poursuit une autre militante. «  Nos idées sont maintenant ancrées dans la tête des gens. Les conditions pour entrer au gouvernement ne pourront jamais être réunies, c’est pour résoudre ce problème qu’on a créé le Front de gauche  », conclut-elle.

À Marseille, 33-0 après une heure 
et quart d’échanges consensuels

Il est 19 h 50. À la Maison du peuple, boulevard de la Jamaïque, le dépouillement express vient de prendre fin. Score sans appel  : 33 oui au projet de résolution, zéro non, aucune abstention. La section communiste du sud du 15e arrondissement de Marseille (125 adhérents), dans les quartiers Nord, a statué après une heure et quart de débat tout en consensus sur les trois points soulevés. Celui portant sur la participation au gouvernement a occupé une bonne partie des échanges, sans conflictualité des points de vue, même si des conclusions similaires ont résulté parfois d’approches différentes. «  Qu’est-ce qu’on pourrait bien aller faire dans un tel gouvernement avec un PS majoritaire à la Chambre des députés  ?  » se demande Jackie, tandis que son voisin prédit  : «  Je vous fiche mon billet que d’ici à la fin du quinquennat, Hollande mènera une politique à la Merkel.  » «  J’entends dire  : la gauche est au pouvoir. Non, c’est le PS qui est au pouvoir. Hollande fera-t-il la même politique que Jospin pendant la gauche plurielle  ? Notre rôle doit être celui d’une sentinelle  », poursuit Jo, dans la même veine. Henri réunit, dans sa réflexion, les trois points soulevés par le Conseil national  : «  Il y a des urgences sociales et je veux que mon parti y réponde parce que je veux que la majorité de gauche réussisse. C’est justement parce que les propositions de Hollande ne répondent pas à ces urgences sociales que je veux que mon parti garde son libre arbitre et qu’il poursuive la démarche du Front de gauche.  » Ce dernier point fait l’unanimité des intervenants. La déception, après un scrutin législatif marqué par des résultats en deçà des espérances dans cette circonscription qui fut celle de François Billoux et Guy Hermier, n’amène pas à remettre en cause une stratégie qui sera «  de longue durée  », comme le rappelle Joël, le secrétaire de section.

Les communistes ont, sans surprise, voté à une écrasante majorité leur refus d’entrer au gouvernement de Jean-Marc Ayrault, lors d’une conférence nationale des délégués PCF réunis à la Mutualité. Les quelque 500 délégués PCF, représentant les militants qui ont débattu pendant deux jours de cette question, ont voté à main levé. Il y a eu seulement 4 votes contre le texte proposé par la direction et 16 abstentions. Pierre Laurent, secrétaire national du PCF, avait dès lundi devant le Conseil national du parti, estimé que les conditions n’étaient aujourd’hui "pas réunies" pour que des communistes entrent au gouvernement.

Christophe Deroubaix (à Marseille), Mina Kaci (à Gentilly) et Nicolas Séné (à Montpellier)


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