François Hollande rend hommage à Jules Ferry

vendredi 18 mai 2012.
 

3) Pour l’éducation, c’est l’heure du changement

François Hollande a livré, dans son premier discours de président, ses ambitions sur l’éducation nationale.

Loin de se contenter d’un hommage, c’est un discours profondément politique qu’a prononcé le président fraîchement investi devant le monument dédié à l’ancien ministre de l’Instruction publique et des Beaux-Arts. Dès les premiers mots, le ton est posé  : « Dans l’histoire de la République, les grandes dates, ce sont les lois. Je suis venu célébrer deux lois (…) que nous devons à l’obstination, à la ténacité, au courage d’un homme, Jules Ferry. » Désignant les lois du 16 juin 1881 (qui rend l’enseignement public et gratuit) et du 28 mars 1882 (qui le rend obligatoire et laïc), le président aura voulu se montrer, sur la question de l’éducation, à la hauteur de l’opiniâtreté de son aîné.

Le choix de François Hollande de placer l’enseignement au cœur de son projet n’est pas anodin  : il veut prendre l’exact contre-pied de Nicolas Sarkozy, qui a, durant cinq ans, été le président de la casse de l’éducation nationale.

Nicolas Sarkozy y a supprimé 70 000 postes depuis 2007  ? François Hollande confirme qu’il en créera 60 000, comme il s’y est engagé depuis la primaire socialiste. Nicolas Sarkozy et son ministre Luc Chatel ont supprimé l’année de formation en alternance pour les enseignants, plongeant les nouveaux arrivés dans l’angoisse de se retrouver sans y avoir été préparés face à leurs élèves  ? François Hollande assure que son gouvernement rétablira la formation professionnelle des enseignants  : « Ferry soulignait la nécessité d’une bonne formation pour ceux qui sont appelés à dispenser l’enseignement  : le savoir est une chose, enseigner ce qu’on sait est une autre chose plus difficile », a-t-il développé.

« La société n’est plus la même et les conditions de l’enseignement non plus, mais les principes, eux, demeurent », a déclaré le nouveau chef de l’État. Des principes comme celui d’égalité ou celui de laïcité « où s’acquiert la liberté de conscience ». Dans ce qui semblait une réponse à une réplique de son prédécesseur, prononcée dans la cathédrale Saint-Jean-de-Latran et restée tristement célèbre (« dans la transmission des valeurs et dans l’apprentissage de la différence entre le bien et le mal, l’instituteur ne pourra jamais remplacer le pasteur ou le curé »), Hollande estime, lui, « qu’une chose est pérenne, une chose est éternelle  : si le savoir n’est pas le monopole du maître, celui-ci doit garder la responsabilité d’en ordonner le sens ». De quoi peut-être commencer à rassurer ceux qui auraient pu être décontenancés durant la campagne par quelques reculs concédés aux représentants de l’enseignement catholique par Vincent Peillon, conseiller éducation de celui qui n’était alors que le candidat socialiste. Assurément, l’éducation sera l’une des clés de voûte du quinquennat à venir. « L’école doit préparer notre pays », a dit le président. Le chantier est ouvert et il est vaste.

Adrien Rouchaleou

2) Jules Ferry, « l’école républicaine », une référence problématique

Par Pierre Boutan, IUFM de Montpellier

Le nouveau président de la République a choisi de rendre hommage au ministre emblématique de la IIIe République, qui est considéré comme le fondateur de l’école républicaine, à travers ses lois de 1879 à 1882, en particulier sur la gratuité, l’obligation et la laïcité de l’école primaire du peuple. On aura remarqué bien sûr le rappel qu’il était aussi le chantre de la colonisation. «  Faute morale  » dénoncée par le président socialiste  : ce fut pourtant au nom du patriotisme que l’entreprise fut menée, et dans le cadre des «  droits et devoirs  » des «  races  » européennes, discours revenu aujourd’hui à la surface par la droite et l’extrême droite. L’école de Jules Ferry était celle de la République, certes, et en ce sens dénoncée par tous les réactionnaires. Mais aussi d’une République bourgeoise, qui venait d’écraser dans le sang la révolte de la Commune de Paris, en mai 1871. Jules Ferry, maire pendant le siège par les Prussiens, avait été surnommé Ferry Famine avant la honteuse capitulation du gouvernement Thiers au début de l’année…

Quelle était donc cette «  école du peuple  » que la légende dorée a édifiée comme créée par ce ministre, qui n’était en effet pas du tout socialiste, comme le rappelle opportunément Christian Laval (http://blogs.mediapart.fr/blog/chri....)  ? Certes, elle sortait des matières obligatoires l’enseignement des religions (catholique, protestante, juive). Certes, elle visait à donner à tous les enfants du peuple un enseignement primaire, mais déjà plus de 90 % des enfants étaient scolarisés. Certes, elle obligeait à la gratuité, mais c’était le cas déjà pour les trois quarts au moins des élèves. Certes, elle prônait à juste titre l’enseignement généralisé de la langue nationale, mais elle contribua à réduire, souvent à combattre, le riche patrimoine des autres langues du peuple. Certes, elle visait à élever le niveau des connaissances des élèves, et donc des maîtres, mais en installant soigneusement une étanchéité complète entre le parcours des enfants du peuple (primaire) et enfants «  bien nés  » (secondaire). Pour ces derniers (moins de 3 % de la population), la scolarité dans les collèges et les lycées était payante, les programmes étaient différents, les maîtres du niveau élémentaire devaient être pourvus d’un diplôme spécial  : c’est dire que la fameuse ascension sociale par l’école était alors rarissime, contrairement à ce qui pourra se passer à partir de la montée de la revendication de «  l’école unique  », qui mettra un siècle à se réaliser, et qui continue toujours à susciter de sérieuses réactions.

En revenir donc à Jules Ferry en matière de référence n’est pas sans ambiguïté. On ne peut que regretter que d’autres choix en la matière n’aient pas été faits, comme ceux de Paul Langevin et Henri Wallon, les deux communistes qui dirigèrent successivement un projet de réforme de l’enseignement à la Libération, malheureusement enterré ensuite par tous les gouvernements de «  troisième force  » d’alliance entre socialistes et droite. Plan dont il est facile de reconnaître le filigrane dans les propositions du Front de gauche, par exemple la scolarité obligatoire portée jusqu’à dix-huit ans… Priorité à l’éducation, dit le nouveau président… Un objectif qu’il faudra faire avancer sérieusement, bien au-delà de Jules Ferry, dont il faut rappeler l’apostrophe d’Engels  : «  le chef de la maison Roublard et Cie  ».

Pierre Boutan

1) François Hollande rend hommage à Jules Ferry et à l’école

Nouvel Obs

A peine installé comme nouveau président de la République, François Hollande a rendu hommage, ce jeudi après-midi, à Jules Ferry, "grand ministre de l’instruction publique". "Les grandes dates, les vraies étapes, ce sont les lois. Je suis venu célébrer deux lois de la République, que nous devons à l’obstination au courage et à la ténacité d’un homme : Jules Ferry. La loi du 16 juin 1881 gratuité, 18 mars 1882 de laïcité."

Ferry le colonialiste

D’entrée, François Hollande tente d’évacuer l’image du Jules Ferry tenant du colonialisme. "En saluant la mémoire de Jules Ferry qui fut un grand ministre de la République, je n’ignore rien de ses égarements politiques, sa défense de la colonisation fut une faute à la morale politique." Dans son droit d’inventaire un peu court, il préfère retenir "le bâtisseur de cette maison commune qu’est l’école publique."

Les grands principes de l’école

Le président de la République met en lumière l’oeuvre de Jules Ferry pour mieux souligner ce que doit être, selon lui, l’école publique. "Je salue l’école...

- "comme lieu d’émancipation. Le goût d’apprendre, le sens de la curiosité intellectuelle sont des trésors que l’école a vocation à préparer"

- "comme lieu de l’égalité, celle des chances, qui ne reconnaît que le mérite, le travail, l’effort"

- comme "lieu d’intégration de tous les enfants". "Cette égalité impose la justice entre les territoires. Comment accepter qu’un enfant est plus de chance de réussir parce qu’il est ici plutôt que là. La justice, c’est la mixité sociale".

L’école doit faire son travail d’éducation, d’inflexion, pour permettre à la génération qui vient de vivre mieux que nous.

Ces prochaines mesures en faveur de l’école

Après avoir rappeler les grands principes qui guident l’école républicaine, François Hollande a réitéré ses engagements de campagne pour l’Education nationale :

- "Priorité sera donnée à celles des quartiers populaires"

- "L’école est l’esprit de la République. Je veux qu’elle recouvre tous les moyens de ses missions"

- "C’est la raison de mon engagement de recruter 60.000 personnels de l’éducation sur la durée de mon mandat"

Je rétablirai la formation professionnelle des enseignants. Je sais pouvoir compter sur le dévouement, le courage de tous les personnels de l’Education national. C’est vers eux que je me tourne, que j’adresse mes premiers mots de président de la république.

Le président conclut en se proclamant "garant de l’école publique, de l’éducation nationale, de la transmission des connaissances, de l’égalité républicaine".


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