"Le système installé ne veut pas voir le mouvement citoyen en marche" (François Delapierre)

mercredi 18 avril 2012.
 

A dix jours du premier tour de la présidentielle, le Front de gauche continue d’occuper le terrain (meetings de Marseille samedi, puis de Paris jeudi 19) et de susciter des attaques de toute part contre son succès populaire. Directeur de campagne de Jean-Luc Mélenchon, François Delapierre a répondu point par point, lors d’un point presse ce jeudi.

A deux jours du meeting de Marseille, la mobilisation populaire autour du Front de gauche est-elle toujours aussi forte ?

François Delapierre. Vous nous voyez portés par la vague du meeting de Toulouse, avec les 70.000 personnes présentes. Au départ, nous voulions couvrir l’ensemble du territoire. En réalité, nos rendez-vous ressemblent à des journées de grève. Et chaque événement porte le suivant. Le Capitole va rebondir sur Marseille, qui va rebondir sur notre multi-meeting de la Porte de Versailles à Paris le 19, diffusé partout en France sur des places, dans des cafés, des appartements… Puis ce sera le premier tour.

Mais ce processus est en grande partie évacué par les commentateurs avisés. Il y a une totale disproportion entre la réalité sur le terrain et la place qui lui est faite dans les médias. Pour parler du candidat et de ce qu’il pense du permis de conduire, ça oui, il y a de la place. Mais la radicale nouveauté qu’est cette révolution citoyenne en cours est tue. Pourtant, on n’a jamais vu un tel mouvement citoyen durant une campagne, qui emprunte aux indignés, aux luttes sociales. Un mouvement qui émerge mais que le système installé ne veut pas voir.

Comment cela se traduit-il ?

François Delapierre. Ca donne lieu à un grand mouvement lancé par Laurence Parisot, qui prend pour cible le Front de gauche, avec des argumentaires provenant de l’Institut de l’entreprise, qui passent de rédactions en rédactions. On retrouve aussi des argumentaires du Front national dans de grands organes de droite ou socio-démocrates. On assiste à des viols de l’éthique journalistique.

La palme revient au Nouvel Obs, journal de la deuxième gauche brejnévienne, qui représente Jean-Luc Mélenchon sous les traits d’une caricature, avec les yeux bridés et la peau foncée pour en faire le croisement d’un singe et d’un Chinois. Aucune photo de lui à l’intérieur, si ce n’est en ombre chinoise. Je sais reconnaître là un instrument de propagande.

Cela a-t-il un impact sur la campagne du front de gauche ?

François Delapierre. Notre conviction est que ces attaques vont produire le même effet que ce qui s’est produit lors du référendum sur le traité européen de 2005. Quand on décrit des électeurs comme des drogués attirés par un gourou, c’est un mépris du peuple qui s’exprime. Comme en 2005, ces arguments vont se retourner contre ceux qui les ont utilisés.

François Hollande a indiqué mercredi soir qu’il ne négocierait pas entre les deux tours avec le Front de gauche. Qu’en pensez-vous ?

François Delapierre. Non, il n’y en aura pas. François Hollande l’a déjà dit. S’il a une qualité, c’est bien sa constance. Nous voyons bien nos désaccords. Quand nous parlons d’augmenter les salaires pour relancer la croissance, lui dit : croissance d’abord et peut-être ensuite coup de pouce pour les salaires. Sur l’Europe, Hollande ne parle pas de remettre en cause le traité de Sarkozy et Merkel, mais de le compléter par un volet de croissance. Mais comment compte t’il avoir de la croissance quand la rigueur contrôle tous les budgets. Tout cela n’est pas sérieux et impossible. Partout en Europe, les socio-démocrates se sont soumis à l’austérité jusqu’à leur propre perte. En Grèce, en Espagne, même en Allemagne ou ils ont préféré perdre les élections que de s’allier à Die Linke. Pour nous, le combat continue. Il sera d’autant plus facile à mener que Sarkozy aura été rejeté du pouvoir.

Olivier Besancenot a appelé ce jeudi à un rendez-vous de la "gauche radicale", avec le NPA, le Front de gauche, LO et d’autres. Qu’en pensez-vous ?

François Delapierre. Nous sommes une force autonome. Notre rassemblement est ouvert à tous. Le NPA a sa place mais en a décidé autrement. Dans ses rangs, sa stratégie est discutée.

Y a-t-il des dissensions au sein du Front de gauche comme le sous-entend certains articles de presse récents ?

François Delapierre. Des argumentaires circulent pour diviser le Front de gauche. On a eu droit à "attention, Mélenchon fait une OPA sur le PCF". Puis à l’inverse, Mélenchon héritier du stalinisme. Nous avons toujours fait face avec beaucoup de sang froid. Ceux qui spéculent sur une division du front de gauche sur je ne sais quelle circonscription se trompent. Nous savons que le Front de gauche est en train de bouleverser le champ politique. Ca va continuer après la présidentielle. Les ArcelorMittal ne vont pas rentrer chez eux parce que Nicolas Sarkozy aura été défait. Ils rentreront lorsqu’ils obtiendront des garanties pour leurs emplois. Pareil pour les gens qui manifestent pour des postes d’enseignants dans les écoles. Pour obtenir ces postes, il faudra mener un bras de fer contre les agences de notation après ces élections.


Signatures: 0
Répondre à cet article

Forum

Date Nom Message