Adresse des ouvrières de Lejaby à Nicolas Sarkozy

mardi 24 janvier 2012.
 

Monsieur le Président,

Nous avons décidé, nous les 93 salariés de l’entreprise LEJABY à Yssingeaux en Haute-Loire denous adresser à vous pour vous faire part de notre indignation.

Nous allons recevoir toutes et tous, nos lettres de licenciement après des dizaines d’années de travail au rendement pour des salaires voisins du SMIC. Nous sommes victimes des délocalisations des productions et de la recherche permanente de la baisse de la rémunération du travail.

Pour nous, le licenciement signifie, non seulement, la précarisation et l’angoisse mais aussi la marche inexorable vers les minima sociaux. Et nous avons bien conscience que nous ne sommes pas les seuls. Notre situation est semblable à des centaines de milliers de nos compatriotes.

Nous ne l’acceptons pas pour nous, nos familles et notre territoire.

Nous refusons cette perspective qui conduit à toujours plus de chômage et toujours moins de salaire !

Nous refusons les licenciements et voulons continuer à gagner notre vie en travaillant. Pour cela, nous demandons le redémarrage de notre atelier et la ré-industrialisation du site.

Beaucoup d’entre-nous ont plus de 35 ans d’ancienneté. Nous préférons être préretraités plutôt que chômeurs ou percevoir le RSA. Nous demandons donc la mise en place d’une préretraite à 55 ans, surtout à un moment où notre jeunesse est sans emploi.

Après une vie de travail, le chômage c’est la précarité. Au lieu de primes de licenciement dérisoires, nous voulons une prime de licenciement à la hauteur de la prime précarité, soit 10 % de nos salaires travaillés.

Unis et solidaires, nous attendons des réponses concrètes, pas des promesses, ni des discours.

Nous resterons mobilisés jusqu’à la réponse à ces exigences. Notre détermination est à la hauteur de notre colère contre l’injustice qui nous est faite. Et c’est un devoir de s’opposer à l’injustice.

En espérant être entendus, recevez nos salutations respectueuses.

Assemblée générale du personnel LEJABY d’Yssingeaux, le 23 janvier 2012.

2) Raymond Vacheron de la CGT Textile : "La logique du profit a tué l’entreprise"

Au-delà de 
la fermeture 
de la dernière usine Lejaby, comment expliquez-vous 
le phénomène de la désindustrialisation  ?

Raymond Vacheron. On est dans 
une logique où il faut toujours faire plus de profit au détriment de l’emploi. À Lejaby, les salariées produisent sept soutiens-gorge 
de l’heure, et sur un soutien-gorge 
qui se vend 80 euros dans 
le commerce, seulement 2 euros servent à rémunérer le travail  ! 
Ils vont économiser quoi en délocalisant  ? Quarante ou cinquante centimes  ? C’est ridicule  ! Je ne veux pas faire l’apologie du capitalisme à l’ancienne, mais à l’époque 
de Maurice Bugnon (PDG de Lejaby de 1966 à 1995 – NDLR), le taux 
de profit était de 2 à 3 % par an, 
et cela suffisait à construire 
une industrie. Maintenant, il faut 15 % de profit, et on perd de plus 
en plus d’activité. Derrière 
le consortium de repreneurs 
Alain Prost, Christian Bugnon 
et Isalys, présentés comme 
des entrepreneurs, c’est un fonds de pension italien – Fiduciaria San Babila – qui est en réalité acquéreur  !

Xavier Bertrand explique qu’il faut baisser le coût du travail pour maintenir nos industries, que pensez-vous 
de cette analyse  ?

Raymond Vacheron. C’est un non-sens. Quand on connaît les filles de Lejaby, on sait bien qu’elles ne pouvaient pas 
se payer les produits qu’elles fabriquaient. Alors, si on diminue encore le pouvoir d’achat des salariés, ils pourront encore moins acheter 
ce qui est produit. La question, 
ce n’est pas le coût du travail, mais c’est de savoir s’il y a une vraie volonté politique de garder une industrie. La fermeture de l’usine d’Yssingeaux, c’est la mort du territoire de la Haute-Loire.

Propos recueillis par L. N.

3) Le "J’accuse" des ouvrières de Lejaby

Les salariées du fabricant de lingerie Lejaby ont accusé jeudi les pouvoirs publics de leur avoir "menti", au lendemain de l’annonce de la fermeture de leur dernière usine à Yssingeaux (Haute-Loire), érigée en symbole d’une industrie française en crise et soumise aux délocalisations.

"Les pouvoirs publics ont fait semblant de nous soutenir, nous ont menti, ont préféré les déclarations d’intention à l’action pour garder l’emploi", écrivent les "Lejaby" dans une motion adoptée en assemblée générale. "Ils ont laissé prendre le contrôle du groupe Lejaby par un fond de pension italien et l’arrêt des productions en France. C’est inacceptable et c’est l’exemple de l’échec du sommet social" de la veille à l’Elysée, dénoncent-ils.

Plusieurs salariés ont passé la nuit de mercredi à jeudi dans l’usine, après l’annonce par le tribunal de commerce de Lyon d’un repreneur, Alain Prost, ex-PDG de l’Italien La Perla, associé au sous-traitant de Lejaby en Tunisie. Il s’est engagé à garder 195 des 450 salariés en France, mais a prévenu que l’usine d’Yssingeaux fermerait. "Notre lutte est le symbole de ce que subissent aujourd’hui les salariés. Nous refusons de baisser les bras", mettent en garde les salariés d’Yssingeaux, qui réclament "un plan de réindustrialisation" de leur site.

Ils ont également dénoncé jeudi le "bluff" de Xavier Bertrand, annonçant que 98% de leur rémunération nette serait maintenue pendant un an en vertu du contrat de sécurisation professionnelle, alors qu’il ne s’agit que du dispositif légal. "C’est pas qu’un effet d’annonce, c’est un bluff total !", a déclaré Raymond Vacheron, responsable textile à la CGT, présent à l’assemblée générale d’Yssingeaux.

Pour le Parti communiste, "Lejaby est le symbole cruel de l’incompétence gouvernementale" au lendemain du sommet "social". Il accuse les pouvoirs publics d’avoir "menti" et "fait semblant de les soutenir". "Le PCF exige des mesures concrètes contre les plans sociaux, les délocalisations et la précarité", ajoute-t-il dans un communiqué.

Les salariés de Lejaby sacrifiés par le tribunal de commerce Communiqué du NPA.

Sinistre coïncidence : le jour de la comédie du sommet social, le tribunal de commerce de Lyon actait la fermeture de Lejaby, entrainant le licenciement de 255 salariés, la fermeture de l’entreprise d’Yssingeaux.

Le repreneur désigné, Alain Prost, ne fait pas mystère de sa volonté d’achever la délocalisation en Tunisie de la totalité de la fabrication. Auparavant, les actionnaires américains qui s’étaient succédé avaient fermé sept sites de production licencié 400 salariés.

Avec Yssingeaux fermé c’est 93 salarié-e-s qui sont à la rue dont 90 sont des femmes. Ils et elles ont fait toute leur carrière chez Lejaby et leur espoir de retrouver un travail est quasi nul.

Le NPA, et son candidat P. Poutou, sont révoltés par ce véritable massacre de l’emploi et partagent la rage et la colère des salariés de Lejaby.

L. Wauquiez et X. Bertrand essayent d’estomper la responsablité des pouvoirs publics et du gouvernement en déclarant notamment que les licenciés auront un an de salaire garanti, exactement 80% du salaire brut. Mais c’était déjà prévu et rien ne remplace un emploi perdu.

A Yssingeaux, le personnel entend occuper l’entreprise.

Le NPA est totalement solidaire des actions menées par les salariés de Lejaby pour protester contre la liquidation décidée par le tribunal de Lyon et la délocalisation de la production.


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