Papandréou, Berlusconi... La technique libérale du coup d’Etat

samedi 19 novembre 2011.
 

Et deux de plus. Après l’irlandais, vite oublié, avant peut-être l’espagnol à l’issue de ce dimanche électoral, les premiers ministres grecs et italiens ont du faire leur valise. Cela ressemblerait presque à un « qu’ils s’en aillent tous » européen. Sauf que faute de révolution citoyenne capable d’arrêter leur offensive, ce sont les spéculateurs privés qui font tomber les gouvernements pour mieux rester, eux, bien en place.

Il faut étudier sérieusement le déroulement de ces coups d’état financiers. Car la France est déjà sur la liste des comploteurs. Notre dette publique est harcelée en ce moment même par les éléments les plus hardis et voraces de la bande. Comme ceux-ci ne sont pas inquiétés, voire sont accueillis par certains illuminés néolibéraux comme un châtiment mérité, le gros de la troupe suivra le moment venu, une fois sûre de son affaire.

Repérons donc quelques ingrédients d’un coup d’état financier réussi. Bof, « les marchés » font tomber des dirigeants déjà bien usés, relativisent de nombreux commentateurs. Mais quel gouvernement en Europe ne l’est pas ? Sarkozy n’était-il pas encore récemment considéré comme le président de la République le plus impopulaire de la Cinquième ? Tous sont usés parce que tous mettent en œuvre les mêmes politiques qui tout ensemble échouent et exaspèrent. Ces dirigeants dociles vis-à-vis de la finance s’isolent sans cesse de leur peuple en appliquant les plans d’austérité imbéciles. Ils tiennent tant qu’ils peuvent, contre la rue, contre les élections intermédiaires, contre leurs propres troupes. Sans jamais manquer du soutien des « marchés » enthousiastes devant tout ce courage qu’il y aurait à martyriser son propre peuple. Puis quand le pays n’en peut plus, parce qu’ils risquent de tout perdre, leurs maîtres les jettent dehors pour des garde-chiourmes plus neufs ou plus énergiques. La première condition n’est donc pas de trouver un chef usé, c’est de frapper un chef docile qui ne peut plus résister à ceux qu’il a servi. A l’inverse, la finance épargne les têtes dures : on notera que les rares chefs d’Etat et de gouvernement qui lui ont résisté sont souvent toujours en place…

Autre clé d’un coup d’état réussi, il faut des gens dans la place, pour appeler sur leur pays la colère des marchés ou légitimer leur coup de force. En France c’est Raffarin qui dit que les hommes politiques doivent affronter le verdict des agences de notation autant que celui des électeurs. Le putsch est justifié d’avance ! Plus tordu, cet article du Monde considère que les Bourses ont été plus efficaces pour faire partir Berlusconi que des millions de manifestants, électeurs, intellectuels, artistes engagés contre lui. Si la toute-puissance brutale et sans âme de la finance fait peur à beaucoup, elle en fascine aussi. Enfin, pour habiller le putsch rien ne vaut le recours aux « techniciens ». Ces personnages ont en fait des convictions politiques. Mario Monti, ancien commissaire européen, en est une illustration saisissante. Mais la violence de leur foi néolibérale les a souvent rendus impropres au suffrage universel. Leurs carrières sont passées par Goldman Sachs et non le Parlement. Avec une bonne dose d’antiparlementarisme, voilà l’appartenance au cénacle de la finance mondialisée devenue gage de rupture avec la classe politique qui en était le fondé de pouvoir. Mais comme disait Machiavel, la première forteresse des tyrans reste l’inertie des peuples. Ce n’est pas pour rien la conclusion de notre programme l’Humain d’abord.


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