Laurence Parisot couronnée « reine des rapaces »

dimanche 27 novembre 2011.
 

Laurence Parisot couronnée « reine des rapaces » le 9 novembre à Paris dans la « Nuit des rapaces » animée par « Fakir », François Ruffin, « Là-bas si j’y suis », Daniel Mermet, et « Siné mensuel »

« La vie, la santé, l’amour sont précaires, pourquoi le travail ne le serait-il pas ? » C’est la maxime préférée de Laurence Parisot. Elle sonne comme un menuet. Mais c’est l’apologie de la barbarie. Car l’histoire de l’humanité, c’est celle de la lutte contre la précarité : depuis 50 siècles, depuis l’âge des cavernes, nos ancêtres les plus anciens ont lutté contre la précarité de leur sort. Contre la faim, la soif, le froid, la maladie. On a inventé l’agriculture pour lutter contre la précarité de la cueillette. On a inventé l’élevage pour lutter contre la précarité de la chasse. Cela fait 50 siècles que nous luttons pour du pain et pour rendre nos vies moins précaires. Nous luttons y compris contre la précarité de nos amours. Et puis arrive cette femme au XXI° siècle, elle dirige le tout puissant patronat en France, le CAC 40, elle habite à l’Elysée, et voilà, elle vous dit « 50 siècles d’erreur ! ». Il faut tout revoir, accepter la précarité, intégrer la précarité dans vos têtes, dans toute votre vie, à commencer par le travail. Acceptez de n’être plus sûrs d’avoir du pain !

Ce n’est pas tout : elle a dit « La liberté de penser s’arrête là ou commence le code du travail ». Le Code du travail, c’est un droit intime, quotidien, vital pour 18 millions de salariés, même pour ceux qui ne le connaissent pas, il régit leur salaire, le rythme de leur vie journalière, hebdomadaire, mensuelle, leur santé, leur hygiène, leur sécurité au travail, leur protection sociale, leur emploi, leur formation, leur retraite, leurs droits syndicaux, leur droit d’expression, leurs institutions du personnel. Le Code du travail, c’est un texte fait de sueur et de sang, de luttes et de larmes. Il a fallu 160 ans pour le bâtir. Il incarne toute l’histoire de la réduction du temps de travail. Il a fallu 80 ans entre 1840 et 1920 pour passer de la journée de 17 h à la journée de 10 h. Il a fallu encore 70 ans pour passer de la semaine de 40 h à la semaine de 35 h. C’est le texte le moins enseigné, le moins connu, le plus dénigré, le plus fraudé mais le plus important dans la vie réelle. Ils disent que c’est un texte compliqué… J’ai toujours souri d’entendre ceux qui défendaient le Traité Constitutionnel Européen dire du Code du travail qu’il était « compliqué », alors qu’ils soumettaient le TCE au vote de 42 millions d’électeurs, les mêmes estimaient que le Code du travail devait être absolument « simplifié », « recodifié » « allégé ». Laurence Parisot est leur reine : quand elle dit, « La liberté de penser s’arrête là ou commence le code du travail », elle avoue tout, elle aurait pu dire « la liberté s’arrête… », non, elle va jusqu’à bout, elle dit « la liberté de penser s’arrête… ». Elle a été filmée quand elle disait cela, c’est dans un film de Anne Kunvari, « Il était une fois le salariat », produit par Iskra, Laurence Parisot est assise dans une voiture, elle dit la phrase en souriant, comme une bonne blague. Mais ce n’est pas une blague, elle veut que « le contrat l’emporte sur la loi », elle ne veut plus d’état de droit dans les entreprises. Elle a le sens des formules, elle ne veut plus de justice au travail, elle prétend que « les prud’hommes insécurisent les employeurs » ! Elle ne veut plus de Smic, elle ne veut plus de médecine du travail, elle ne veut plus de durée légale du travail, ni sur la semaine, ni sur le mois, ni sur la vie, elle veut une retraite à la carte…

Il y a 4 ans, le 26 septembre 2007, elle a été sur la sellette quand le TRACFIN a découvert les fonds cachés de l’UIMM et du Medef. 600 millions d’euros de « caisse noire » basée sur une double cotisation secrète des entreprises. Abus de biens sociaux. 600 millions c’est quatre fois le coût de la non-imposition des indemnités d’accident-maladie qu’ils ont supprimé. Presque autant que les 400 millions qu’ils veulent enlever aux salariés en imposant un quatrième jour de carence non payé en cas de maladie… 600 millions, c’est le fruit d’un trafic par une bande organisée : si cela avait été une simple bande de trafiquants de mobylettes de banlieue, ils seraient en prison depuis longtemps. Là, Laurence Parisot et DGS ne sont pas encore jugés quatre ans après ! DGS président de l’URSSAF utilisait cet argent pour payer les salaires du Medef, lui chargé de récolter les cotisations sociales des URSSAF, un comble, il versait ces salaires « au noir », sans cotisations.

Il n’y a pas que les mallettes de Gourji, de Takkiedine, de Karachi, de Woerth et de Sarkozy, les mallettes de Denis Gautier-Sauvaignac, faisaient de 22 à 32 kilos remplis de billets 200 à 300 000 euros chaque mois pour « fluidifier les relations sociales » c’est-à-dire aider les patrons à résister aux grèves, financer des syndicats jaunes et corrompre des parlementaires pour voter leurs amendements. Laurence Parisot avait tenté de nier : elle avait dit « beaucoup savaient inconsciemment ». Je vous invite à méditer sur le « savoir inconscient collectif ». Elle avait dit : « Je me sens salie ». Mais quatre ans après, elle ne s’est toujours pas lavée ! Ca marche toujours pareil et rien n’est jugé.

D’ailleurs elle ne veut plus de cotisations sociales, pour elle ce sont des « charges ». Or vous le savez, les cotisations, c’est un salaire mutualisé. C’est ce qu’il y de plus beau, une part du salaire mise volontairement par les salariés dans un pot commun et redistribuée à chacun selon ses besoins en cas de maladie, de chômage, d’accident du travail, de famille nombreuse, de retraite. Ce ne sont pas des « charges » mais un bonheur ! Laurence Parisot elle veut les supprimer. Quand vous l’entendez parler « d’abaisser les charges », comprenez qu’elle veut baisser votre salaire brut. L’autre jour, au Grand Journal de Canal +, il lui était demandé ce que signifiait « URSSAF », elle a hésité : « Pour moi, cela me rappelle l’URSS » a t elle dit. Pour elle, l’idée qu’il y ait une Sécurité sociale, un salaire brut, indirect, mutualisé, cela lui faisait penser à URSS ! Alors vraiment la chef du patronat la mérite, la palme d’or des rapaces, c’est elle la reine du pillage de nos salaires et de nos droits !

C’était lors de la « nuit des rapaces » organisée par le journal Fakir, aidé de Daniel Mermet de « Là-bas si j’y suis » et de « Siné mensuel ». Fakir, animé, entre autre, par François Ruffin, est poursuivi en justice pour diffamation par Jean-Charles Naouri, actuel PDG de Casino, un « rapace » hors catégorie. D’entre les dix rapaces en compétition le soir du 9 novembre, salle Olympe de Gouges Paris 11e, c’est Laurence Parisot qui a reçu le prix d’excellence.

2) Naouri, Parisot, Ladreit de Lacharrière... à la Nuit des Rapaces (compte rendu PG)

C’était la Nuit des rapaces !

Dans une salle Olympe de Gouges (Paris XIe) pleine à craquer, les rapaces sont célébrés avec les honneurs. Ces héros des temps modernes, qui provoquent l’admiration des marchés et de la bourse ont chacun droit à leur photo sur un grand écran et un résumé de leur parcours, forcément brillant et exemplaire.

Cependant, l’ambiance n’est pas vraiment celle d’une remise de prix classique. Plus proche du cabaret, on rigole, on chantonne et surtout on conspue les lauréats.

À l’origine de cette cérémonie au ton décalé, le journal Fakir et l’émission de radio Là-bas si j’y suis. Et Jean-Charles Naouri, le PDG du groupe Casino, aussi en quelque sorte. Car celui-ci n’aura pas apprécié que l’on vienne perturber le bon déroulement de ses assemblées d’actionnaires et qu’on fasse la publicité de ses talents de dirigeant et grand libérateur de la finance dans les années 1980. S’estimant victime d’un acharnement médiatique, Jean-Charles Naouri réclame à Fakir et Là-bas si j’y suis la somme de 80 000 euros chacun.

Il fallait donc une sacré dose d’humour noire et d’auto-dérision de la part des organisateurs pour faire des rapaces du monde politico-financier les vedettes d’une soirée. Un moyen efficace de mettre des visages sur les responsables d’une crise qui oblige les populations à se serrer la ceinture. Tout à tour, les invités issus de partis politiques de gauche, du monde du travail et de la culture seront venus présenter le rapace de leur coeur et mesurer leur (im)popularité au "ouhou-mètre", sorte d’applaudimètre inversé. Carlos Ghosn, Jose Manuel Barroso, Laurence Parisot (la plus huée)... certains étaient déjà connus du grand public. D’autres n’avaient pas encore cet honneur, tel Marc Ladreit de Lacharrière choisi par Leila Chaibi (du Parti de Gauche). Les chômeurs seront particulièrement heureux d’apprendre que cet homme est le principal actionnaire de l’agence de notation Fitch Ratings, qui a récemment attribué à l’Unedic la fameuse note "AAA" pour avoir respecté son équilibre financier. Ou bien encore Pierre Blayau, ancien PDG de Moulinex désigné par trois de ses ex-employés décidément bien reconnaissant comme "rapace préféré" pour ses nombreuses suppressions d’emplois et délocalisations dans les années 1990. Un rapace projeté aussi vers l’avenir puisqu’il se murmure que Pierre Blayau se verrait bien à la tête de la SNCF en cas de victoire de François Hollande. Oui, les rapaces ne négligent pas non plus l’amitié...

Bien entendu, parmi tous ces rapaces méritants, Jean-Charles Naouri est celui qui sort du lot. D’ailleurs l’équipe de Fakir et de Là-bas si j’y suis a déjà prévu un nouvel événement avec la star des rapaces. Ce sera sans doute moins festif puisqu’il s’agit de leur procès contre le PDG de Casino, le lundi 28 et le mercredi 30 novembre à partir de 9 heures à la XVIIème chambre du tribunal correctionnel de Paris. Mais l’optimisme reste de mise, car comme on dit à Fakir : "à la fin, c’est nous qu’on va gagner !"

Maxime Prieto, PG


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