Manifeste PRS 17 : IL N’Y A PAS D’EMANCIPATION CULTURELLE SANS LUMIERES PUBLIQUES

samedi 23 décembre 2006.
 

LE NOUVEAU CLERICALISME MEDIATIQUE ET LA CASSE DU SECTEUR CULTUREL

Les individus comme les sociétés se construisent à travers la représentation qu’ils se font d’euxmêmes.

La production abondante d’une culture de masse structure l’ensemble du monde social, alors même qu’elle s’élabore en dehors de toute intervention des citoyens. Ainsi, la production culturelle est aujourd’hui trustée par une poignée de conglomérats qui imposent à la plus grande part de l’Humanité les mêmes référents libéraux. La concentration capitalistique est particulièrement prégnante dans le secteur des médias où les sociétés de presse et de production audiovisuelle sont aux mains de quelques grands groupes d’actionnaires qui gèrent avec le même souci de rentabilité la production de l’information et les activités industrielles auxquelles ces groupes sont souvent liés. L’endoctrinement par la télévision et la publicité a ainsi été clairement théorisé par le patron de TF1 comme devant fournir des temps de cerveaux disponibles pour acheter du coca-cola. Quant au budget mondial affecté au marketing et à la publicité, il permettrait de régler le problème de la pauvreté mondiale.

Dans ces conditions, le pouvoir médiatique est devenu un quatrième pouvoir qui, allié au pouvoir économique, écrase les anciens pouvoirs de la souveraineté populaire. Les nouveaux puissants le gèrent en dehors de tout contrôle citoyen. Les médias dominants exercent en effet un pouvoir exorbitant, véritable droit de vie et de mort sociale sur leurs contemporains, en décidant à leur gré ce qui est vrai ou faux, digne ou indigne d’intérêt, juste ou scandaleux. Ils exercent un quasi monopole sur la production des représentations de la société, d’autant qu’ils ont contribué à dénigrer et contourner toute forme concurrente, en dévalorisant l’engagement politique et en s’autoproclamant porte-parole du peuple par la grâce des sondages. Or le contenu des médias est loin d’être neutre. Il constitue même le principal vecteur de l’idéologie dominante de notre époque : apologie de la construction de soi par la consommation, dissolution des identités collectives, culte d’un hédonisme égoïste, exaltation des fausses rebellions qui ne remettent pas en cause le système. La précarisation des conditions de travail des journalistes, leurs impératifs de rentabilité et d’audimat, rendent progressivement impossible la production d’une information éclairée et éclairante. Se copiant les uns les autres, les médias tournent en boucle en répétant inlassablement l’idéologie dominante, comme une nouvelle liturgie des masses.

Les gouvernements de droite s’emploient à conforter cette domination culturelle en cassant la production artistique indépendante. Ainsi depuis 2002, le maillage culturel de notre pays s’effiloche, notamment par une baisse considérable des crédits accordés à l’éducation artistique en milieu scolaire et par une attaque sans précédent contre les artistes et les techniciens du spectacle : 40 000 intermittents du spectacle sortis du système depuis 2003.

Contre la misère culturelle et l’endoctrinement médiatique qui l’entretient, l’émancipation culturelle forge des esprits libérés du conditionnement des origines et de l’emprise des conditions matérielles d’existence. Elle implique notamment la capacité de la société à maîtriser sa propre représentation. La reconquête de la société par elle-même suppose une offensive assumée contre l’emprise exercée par ces nouveaux cléricaux publicitaires-médiatiques.

FAIRE DE L’INTERNET UN ESPACE PUBLIC DE LIBERTE

Autre front nouveau de droits, les technologies de l’information posent un problème inouï au capitalisme de notre époque en permettant la multiplication à l’infini de l’information, sans coût supplémentaire ni barrière de péage possible. Or cette information est désormais le support d’une part toujours plus grande de la valeur ajoutée mondiale dans les secteurs de l’industrie culturelle, des logiciels ou de la programmation. Pour instaurer ces droits de péage, les gouvernements édictent des mesures de contrôle empiétant toujours plus sur la vie privée des personnes. Alors que les technologies de l’information constituent potentiellement un formidable espace d’échanges culturels et de mise en réseau des intelligences, elles sont transformées en support d’une mise sous contrôle généralisée des populations au nom du droit inaliénable des entreprises à faire du profit. Un nouveau droit de l’Internet comme espace public doit au contraire être construit pour permettre la diffusion des échanges culturels au plus grand nombre, tout en garantissant la rémunération du travail et de la création.


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