Lettre ouverte à Marie-George Buffet (Patrice Leclerc, conseiller général communiste)

jeudi 14 décembre 2006.
 

Chère Marie-George,

Tu me connais bien, nous avons milité longtemps dans la même fédération, nous nous retrouvons souvent dans des initiatives du pcf ou du mouvement social. Tu sais donc que je ne suis pas un anti-communiste.

Conseiller général je reverse mes indemnités au pcf comme en attestent mes feuilles d’impôts (disponibles en consultation publique sur mon site perso http://www.patrice-leclerc.org). Je ne crois donc pas pouvoir être caractérisé d’ennemi de l’intérieur.

Il en va de même pour Jean Ferrat, Jacques Ralite, Georges Séguy, des maires, des parlementaires, des élus et des militants communistes qui disent depuis plusieurs semaines autre chose que la direction nationale du PCF. Il n’est donc pas sérieux de placer les termes des questions politiques qui nous sont posées sur le terrain de la victimisation, ni de ressortir des chiffons comme l’anticommunisme, voir des notions comme "ennemi de l’intérieur". Le débat est plus sérieux sur son contenu, plus important dans ses enjeux.

Je partage largement l’opinion exprimée par les camarades C.Mazauric, J. Ralite, G. Séguy, L. Sève, M. Simon : « Continuer à argumenter auprès de nos partenaires en faveur de notre choix est une chose. Apparaître comme nous y enfermant quoi qu’il advienne en serait une toute autre, et du plus grave effet. Car alors on serait en partance pour une alternative des deux côtés prohibitive : maintenir la proposition, malgré bien des signaux d’alerte, jusqu’à son refus par les collectifs unitaires le 10 décembre, éventualité grosse de périls, voire d’affrontements désastreux dans le mouvement et dans le parti lui-même ; ou parvenir à les y rallier sans convaincre, voire en indisposant une forte minorité, c’est-à-dire en cassant d’emblée une bonne part de la dynamique unitaire enthousiaste dont dépend à l’évidence la nécessaire ampleur du succès. »

Depuis plusieurs années, les communistes participent et travaillent à la construction d’un rassemblement unitaire et antilibérale. Les régionales, les européennes, la campagne contre la constitution européenne, la construction des collectifs unitaires ont marqué des étapes, des progrès, une volonté des communistes, avec d’autres, à avancer ensemble, à vouloir construire ensemble la possibilité qu’une force politique antilibérale et anticapitaliste puisse se faire entendre électoralement. Sortir enfin du libéralisme : social libéralisme ou libéralisme sauvage. Tu as contribué à cette construction. Tu l’as même impulsé en région parisienne. Je commençais à penser que je m’étais trompé sur le parti et les raisons qui m’avait fait démissionner de mes responsabilités dirigeantes et de ne plus être permanent »

Nous n’avions pas jusqu’ici fait les mêmes erreurs politiques et stratégiques que la majo de la LCR. Nous sommes à deux doigt de parvenir sur cette construction politique avec d’autres et voilà qu’on casserait autant d’investissements militants, autant d’expériences positives, autant d’espoir dans nos rangs communistes, dans ceux de nos partenaires, chez des citoyennes et des citoyens non encartés.

Casserions-nous un espoir indispensable pour redonner force, envie et volonté à l’électorat populaire abstentionniste de s’exprimer ? Tout cela parce que nous ne voulons pas entendre, pas comprendre que la candidature de la première dirigeante du PCF (mais aussi de n’importe quel autre parti ou mouvement), à l’étape ou nous en sommes, ne fait pas consensus, ne permet pas de garder une dynamique avec toutes les forces et mouvements, les groupes et groupuscules, les personnalités « qui ne représentent qu’elles mêmes » (mais qu’on aimerait bien avoir sur nos appels),... Nous le savons tous, c’est cet amalgame qui fait la dynamique unitaire, qui crée la dynamique politique, la dynamique électoral, la perception d’une nouvelle offre politique crédible. Il n’y aura pas de dynamisme sans le PCF mais pas plus avec que le PCF.

Je ne peux pas, je ne veux pas accepter que l’on saborde cela. Je ne veux pas que cela soit par la responsabilité de la force communiste, celle qui avait décidé de travailler à une candidature unitaire antilibérale par consensus. Nous savons tous, qu’en imposant ta candidature, même par un vote majoritaire dans les collectifs, il n’y aura pas de consensus, donc pas d’unité, donc pas de candidature unitaire antilibérale mais au mieux une candidature communiste de rassemblement.

Si la décision du congrès du PCF, celle qui semblait être celle des communistes reposait sur une analyse politique conduisant à travailler à cette stratégie de construction d’un rassemblement unitaire antilibérale, qu’est-ce qui explique que l’on change aujourd’hui ? Pourquoi conduire le PCF à la défaite électorale, à l’échec politique ? Pire pourquoi casser ce que l’on a contribué à construire ? Ce n’est plus du domaine de l’erreur, mais de la faute politique. Une faute qui aura bien plus de conséquences négatives en interne et dans l’opinion publique que si dans le cadre d’une candidature unitaire qui ne soit pas la première dirigeante du PCF des communistes se mettent en dehors du PCF pour présenter une candidature communiste « pur sucre ». Je pense qu’il n’y a pas photo dans les enjeux internes et externes. Notre faute et notre responsabilité sera lourde devant le mouvement populaire et le peuple de gauche.

Il est encore temps de sauver l’espoir, la balle est dans notre camp.

Je crains le caractère prétentieux d’une adresse publique de ma part en ta direction. Mais entre désespoir, tristesse, colère, abattement, je ne veux rien négliger, et je souhaite tout tenter pour essayer d’être utile dans une contribution collective permettant de réussir un rassemblement antilibéral unitaire en 2007. J’espère, encore un peu, dans la capacité de la direction nationale et de toi-même à revenir sur les enjeux politiques essentiels du moment.

Fraternellement, Patrice Leclerc


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