Le Portugal a besoin d’une autre gauche unie (article national PG)

samedi 29 janvier 2011.
 

Bruno Fialho, Le 21Novembre dernier, pas moins de 3 millions de travailleurs ont réalisé la plus grande grève générale de l’Histoire du Portugal.

Les élections présidentielles de ce dimanche n’ont malheureusement pas été l’occasion d’une mobilisation citoyenne équivalente. L’abstention atteint un record historique avec 53 %, délégitimant d’autant les résultats.

Il est vrai qu’au Portugal, le président n’a pas de pouvoirs exécutifs. L’enjeu de son élection est donc bien moindre qu’en France par exemple. Mais il dispose quand même d’un pouvoir institutionnel important. Garant de la Constitution, il promulge les Lois votées par le législateur et peut dissoudre l’assemblée nationale.

Les suffrages exprimés représentent donc à peine 47% des inscrits. Le candidat de la droite (unie) remporte 53% de ceux-ci.

La gauche est partie divisée. Le candidat officiel, Manuel Alegre, avait le soutien de partis de gauche -Bloc de Gauche et PCTP-MRPP. Mais la division mise en œuvre par l’aile droitière du PS et son candidat Fernando Nobre a affaiblit sa candidature. ll réalise ainsi un score moindre qu’en 2006, quand il s’était présenté indépendamment du parti socialiste. Le candidat du parti communiste réalise quant à lui le score honorable de 7,2%.

Nombreux ont été les portugais de gauche qui ont déploré la division des partis de gauche. Cela a joué en faveur de l’unique candidat de toutes les droites unies.

A l’heure où le Portugal subit de plein fouet la crise des marchés financiers et le joug du traité de Lisbonne, à l’heure où il est acculé par le FMI de Monsieur Strauss Kahn, à l’image de la Grèce et de l’Irlande, et après trois plans d’austérité votés en 2010, c’est une autre gauche unie dont le peuple avait besoin.

Le parti socialiste portugais a décrédibilisé son candidat en votant les plans d’austérité et, pour une part de ses membres, en soutenant un candidat concurrent. Déjà le président Cavaco Silva annonce, comme le Parti Socialiste au gouvernement, que l’année 2011 va être plus dure que 2010 ! Plus dure pour le peuple qui devrait supporter "les efforts", mais pas pour l’oligarchie financière.

Plus que jamais, au Portugal comme ailleurs, c’est une autre gauche unie et indépendante des sociaux démocrates qu’il faudrait construire. Il y a urgence à mettre en place la partie de la Constitution portugaise qui stipule construire une société allant vers le socialisme.

Le Parti de Gauche réaffirme son soutien aux forces de l’autre gauche portugaise et forme de le voeu de les voir unies aux prochaines élections pour offrir un débouché politique efficace aux millions de portugais qui se mobilisent dans la rue.

1) Le président de droite portugais réélu par défaut

Anibal Cavaco Silva a conservé, dimanche, le fauteuil de président du Portugal. Ce conservateur du Parti social-démocrate (PSD), qui a bénéficié du désistement des autres formations de droite, a totalisé, dès le 1er tour, 52,94% des suffrages. Il devance ainsi nettement le socialiste Manuel Alegre (19,75%) et le candidat « sans étiquette », Fernando Nobre (14,10%).

Francisco Lopes, le communiste soutenu par les Verts, obtient quant à lui 7,14%, suivi de José Manuel Coelho (libéral, 4,5%) et du dissident socialiste, Defensor Moura (1,57%).

Que faut-il retenir de cette élection qui survient dans un contexte de crise économique sans fond  ? Tout d’abord, et c’est là un signe inquiétant du malaise social, la faible participation. L’abstention atteint en effet 53,37%, soit l’une des plus importantes depuis le retour de la démocratie, en 1974. Les votes blancs et nuls totalisent quant à eux 6,2% des suffrages. Il n’empêche, au soir de sa réélection, Anibal Cavaco Silva a encensé « le sens civique élevé » des Portugais. Il s’est plu à rappeler qu’il était « le président du Portugal entier, sans exception », en dépit de « conditions très difficiles », en allusion à ses placements au sein de la Banque portugaise de négoce (BPN) dont les dirigeants sont poursuivis pour malversation. Rien n’est moins évident.

À l’exception de « l’indépendant », toutes les formations reculent en voix. La plus spectaculaire chute revenant au Parti socialiste. « J’assume totalement la défaite », a reconnu Manuel Alegre, tout en « rejetant » la moindre « comparaison avec d’autres élections ». Et pourtant, en 2006, alors qu’il était candidat dissident du Parti socialiste, il avait obtenu presque 300 000 voix supplémentaires à son score de 2011 (plus d’un 1,1 million de voix, contre 831 000), devançant ainsi l’autre socialiste, l’ex-président Mario Soares (778 389 voix), investi, lui, par le Parti.

Cette fois-ci, Manuel Alegre a eu à peine à souffrir du trublion Moura (66 091 voix). Qui plus est, le socialiste a bénéficié du soutien du Bloc de gauche (BE), qui, il y a trois ans, avait rassemblé plus de 288 000 électeurs. Cette désaffection des électeurs socialistes et du BE (qui perdent ensemble plus d’un million de voix) tient pour l’essentiel à l’impopularité des réformes du premier ministre socialiste, José Socrates. En 2009 déjà, lors des dernières élections législatives, l’avertissement avait été clair  : le Parti socialiste avait perdu sa majorité absolue. Depuis, les trois paquets d’austérité, censés soigner le déficit public, ont fini par dégoûter les Portugais qui, pris dans le jeu mesquin de l’alternance, ont préféré l’original libéral à sa copie.

Cathy Ceïbe, L’Humanité


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