La réforme de la psychiatrie à l’heure du tout-sécuritaire

jeudi 9 décembre 2010.
 

En préparation, le projet de loi du gouvernement veut faciliter l’hospitalisation contrainte et la psychiatrie médicamenteuse.

Une petite brèche dans la réforme de la psychiatrie. Ainsi a été interprétée la décision du Conseil constitutionnel, la semaine dernière, qui s’est prononcé sur les hospitalisations sous contrainte, et plus exactement sur celles formulées à la demande d’un tiers (HDT). Celles-ci, ont décidé les sages, devront être confirmées par un juge au bout de quinze jours. Une injonction qui va obliger le gouvernement à retoucher à sa réforme de l’hospitalisation sans consentement, et ce, avant le 1er août 2011. Toutefois, ce rebondissement ne remet pas fondamentalement en question la logique sécuritaire et régressive de cette réforme de la loi de 1990, qui doit être présentée à l’Assemblée dans les prochaines semaines.

Jusqu’à présent, des soins ne pouvaient être prodigués, sans le consentement d’un individu, que par le biais d’une hospitalisation sur la demande d’un tiers (HDT) ou par une hospitalisation d’office (HO), décrétée par le préfet. Ce projet rajoute un nouveau cadre de soins « par une prise en charge ambulatoire », c’est-à-dire au domicile des patients. Cette disposition risque, d’après le collectif Mais c’est un homme « d’enfermer les malades dehors ». Le soin, dès lors, reposera principalement sur une psychiatrie chimique et médicamenteuse, et sur une surveillance par géolocalisation. En résumé, un véritable « contrôle social » des malades mentaux.

D’autre part, selon ce projet, toute personne incapable de donner son consentement à une hospitalisation et présentant des troubles psychiatriques devra être maintenue dans une « période initiale d’observation et de soins » privative de liberté et longue de 72 heures. « Une véritable garde à vue psychiatrique », s’étonne Odile Barral, du Syndicat de la magistrature, à l’heure où ce mécanisme est contesté dans le monde judiciaire. Le texte facilite enfin l’hospitalisation à la demande d’un tiers en supprimant la nécessité d’un second certificat médical, tout en rendant plus difficiles les possibilités de sortie. Et ce, surtout pour les malades avec des « antécédents ». Ce qui fait craindre la création de fichiers les condamnant à être des « fous » pour toujours.

Pierre Duquesne, L’Humanité


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