Attentat de Karachi. Campagne de 1995 : les documents qui accablent Balladur et peuvent inquiéter Sarkozy (2 articles)

lundi 11 octobre 2010.
 

Depuis hier, les archives confidentielles du Conseil Constitutionnel affolent les Balladuriens. Libération publie les extraits les plus sulfureux de ces archives, dans le fichier à télécharger ici.

http://q.liberation.fr/pdf/20101008...

Ces archives montrent qu’en 1995 de graves irrégularités ont entaché le financement de la candidature d’Édouard Balladur à la présidentielle, dont Nicolas Sarkozy était alors le porte-parole.

Dans le cadre d’un nouveau prolongement du dossier sur l’attentat de Karachi, la Brigade centrale de lutte contre la corruption, à Nanterre, a fouillé au printemps dernier les délibérations et les audits des comptes de campagnes d’Édouard Balladur pour l’élection présidentielle de 1995.

Les liasses de factures et de comptes en banque, archivés au Conseil Constitutionnel, sont d’ordinaire soumises au secret pour une période de 25 ans.

En les explorant, les enquêteurs ont trouvé une perle. Les trois experts financiers chargés d’examiner cette comptabilité, auprès du Conseil Constitutionnel, proposaient ni plus ni moins « le rejet du compte de campagne » de Balladur. Motif : trop de versements en espèce injustifiés.

Le document que nous mettons en ligne aujourd’hui synthétise l’intégralité des découvertes des policiers sur ces dysfonctionnements. Elles portent en particulier sur un versement en espèce de 10 millions de francs, dont Libération avait révélé l’existence au mois d’avril. Et sur les relevés bancaires relatifs à cette opération émanant d’une agence du Crédit Nord chargée du compte de Balladur, située boulevard Haussmann à Paris.

Ces révélations sont répertoriées dans la décision d’hier du juge financier Renaud Van Ruymbeke d’ouvrir une information judiciaire sur les commissions occultes entourant la vente de trois sous-marins au Pakistan, conclue le 21 septembre 1994 par le gouvernement Balladur.

Deux intermédiaires libanais imposés par le pouvoir de l’époque ont reçu d’importantes commissions sur ce contrat, qu’ils auraient pu rétrocéder à des dirigeants politiques, selon divers témoignages versés au dossier.

Ce rebondissement répond aux découvertes de nature financière réalisées dans l’enquête sur l’attaque terroriste à Karachi, le 8 mai 2002, ayant tué onze salariés Français, tous expatriés sur place pour livrer les trois sous-marins promis à la marine pakistanaise.

L’instruction antiterroriste, ouverte depuis près de huit ans, est aujourd’hui confiée au juge Marc Trévidic. À ce jour aucun lien de causalité n’est formellement démontré entre l’attentat lui-même et les malversations constatées sur ce contrat d’armement.

Selon deux représentantes des familles des victimes, Sandrine Leclerc et Magali Drouet, « le juge estime qu’un différend financier à l’origine de l’attentat doit être retenu comme une hypothèse très sérieuse », comme il le leur avait confié lors d’une audience des parties civiles, organisée le 18 juin dernier.

2) Attentat de Karachi. Les doutes des rapporteurs du Conseil constitutionnel sur les comptes de Balladur

Ils s’étonnent du versement en liquide de 10.250.000 francs, "dont l’origine n’est accompagnée d’aucun commencement de preuve".

Dans un document saisi lors d’une enquête sur l’attentat de Karachi, et divulgué jeudi 7 octobre, on apprend que les rapporteurs du Conseil constitutionnel avaient préconisé en 1995 le "rejet du compte de campagne" d’Edouard Balladur.

Les rapporteurs doutaient de l’origine des fonds versés en liquide pour financer sa campagne présidentielle.

Les interrogations sur le financement de la campagne électorale d’Edouard Balladur sont apparues lors de l’enquête antiterroriste sur l’attentat de Karachi en mai 2002, en raison de soupçons de rétrocommissions sur la vente de sous-marins au Pakistan en 1994 - Edouard Balladur était alors Premier ministre RPR.

Le juge financier Renaud van Ruymbeke a décidé mercredi d’enquêter sur d’éventuelles rétrocommissions sur ce contrat, rappelant qu’une "enquête préliminaire (du parquet, ndlr) s’est orientée vers le financement de la campagne de M. Balladur".

Dans le cadre de cette enquête préliminaire, les policiers ont saisi le compte-rendu, écrit sur un ton mordant, de trois rapporteurs du Conseil constitutionnel. Ils avaient "proposé le rejet du compte de campagne" au Conseil constitutionnel, selon des extraits de ce rapport.

Le Conseil constitutionnel - alors présidé par l’ex-ministre socialiste Roland Dumas - avait finalement validé les comptes du candidat malheureux Balladur face à Jacques Chirac.

"Le candidat ne sait manifestement pas quelle argumentation opposer" aux questions sur l’origine de 13.229.504 francs en liquide, notamment un versement de 10,25 millions de francs effectué le 26 avril 1995, quelques jours après avoir perdu au premier tour de l’élection, notent les rapporteurs Martine Denis-Linton, Rémi Frentz et Laurent Touvet.

Pour eux, cette somme ne peut être "inscrite à la ligne ’dons des personnes physiques’", ce qui serait le cas pour des dons lors de meetings par exemple, ni provenir de "ventes diverses de gadgets et T-shirts" comme le candidat l’avait alors avancé.

Ils s’étonnent qu’Edouard Balladur, dont Nicolas Sarkozy était le porte-parole et le directeur de campagne, ait reçu en liquide l’équivalent de "26 fois les sommes recueillies par M. Jospin", le candidat socialiste.

"Surtout, le compte bancaire fait apparaître, entre le 13 mars et le 24 avril 1995, 22 versements en espèces pour un total de 2.758.662 francs, soit une moyenne d’un versement tous les deux jours et de 125.393 francs par versement, preuve que les espèces collectées lors des réunions publiques étaient déposées régulièrement sur le compte bancaire", relèvent les rapporteurs.

Mais sur la question d’un versement unique de plus de 10 millions de francs, "on voit mal un ancien ministre des Finances endetté pour 31 millions de francs [pour la campagne, ndlr] laisser dormir jusqu’à 10 millions dans un coffre au lieu de les placer pour récupérer quelque intérêt...", ironisent-ils.

"Ici, 77,5 % des recettes en espèces ont été versées en une seule fois et sans aucun justificatif, comme d’ailleurs l’ensemble des dépôts en espèces sur ce compte", notent-ils encore, concédant qu’"on peut l’accepter" pour les 22 premiers versements.

"Il n’en va pas de même pour la somme de 10.250.000 francs, dont l’origine n’est accompagnée d’aucun commencement de preuve", assènent-ils, sans jamais évoquer d’autres pistes éventuelles pour un tel versement telles que des rétrocommissions ou des fonds secrets.

Ces doutes amènent les parties civiles à affirmer que "Nicolas Sarkozy et Edouard Balladur sont au coeur d’un système de financement politique"

Source :

http://tempsreel.nouvelobs.com/actu...


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