Les retraites sont au bout de la manif du 7 septembre ! (article du 27 août)

mercredi 8 septembre 2010.
 

J’ai eu beaucoup d’enthousiasme à savoir que nos syndicats sont tombés d’accord sur la journée du 7 septembre. Je pense que la lame de fond qui se prépare doit être sérieuse si j’en juge par le niveau de l’extincteur mobilisé pour en rendre compte par le journal « Le Monde ». La Pravda des biens pensants insiste sur les désaccords entre les syndicats le jour où ils se mettent d’accord, puis installe en pleine page sur six colonnes une interview d’un « chercheur à l’Ires » pour expliquer que les gens ne croient plus aux « rituels de protestation » et que de toute façon rien ne sert à rien. Excellents signes. Décryptons : les syndicats joueront la suite ensemble et la mobilisation sera ample et forte. La preuve, les bien-pensants ont compris que la situation est spécialement chaude. Raison pour laquelle à partir de maintenant tous les gens « raisonnables » vont jouer de l’extincteur, de la diversion et si possible de la division. Mais une chose contre quoi ils ne peuvent rien, c’est la vitesse à laquelle le système sarkozyste se décompose. Si cet effet se combine avec une bonne mobilisation sociale, la vie va être décidément pleine de surprise fin 2010. Raison de plus pour réussir ce qui est à notre portée : la mobilisation du 7 septembre. Cela doit être une affaire personnelle pour chacun d’entre nous.

J’invite à une grande vigilance et beaucoup de travail à propos de cette journée de mobilisation. Je pense que ce « chercheur de l’Ires » reconverti en pronostiqueur de nombre de manifestants donne le ton du niveau de ce qui va être déployé en matière d’enfumage. Mais comptons aussi que bien des gens seront là pour faire de cette journée un pur sujet de bavardage au point de passer à côté de l’essentiel. C’est-à-dire être personnellement présent dans la grève ou la manifestation de rue. Quoiqu’en dise le chercheur de l’ires (autrefois « le monde » donnait la signification des sigles), le pouvoir n’a aucunement les moyens de passer en force. Sa situation ne le lui permet pas. La droite politique se divise en profondeur. Les électeurs de droite font la gueule comme l’a montré l’abstention à toutes les élections depuis la présidentielle. Les récentes orgies sécuritaires ne sont plus autant appréciées qu’autrefois compte tenu du discrédit qui en résulte et du faible niveau des résultats acquis avec ces méthodes. Le désamour est ancré. Tout l’agace. Même le style « barbe de trois jours » du président-je-suis-un-homme-comme–tout-le-monde, dans Paris Match est mal accepté. Sarkozy ne peut tenir tête que si le front syndical se brise, comme en 2003. Ou si la gauche politique commence à faire des tortillons dans le genre des foucades de Cohn Bendit à l’université des Verts, ou des pirouettes socialistes. Mais la consigne doit être de faire semblant de n’avoir ni vu ni entendu chaque fois que des provocations de ce style se présenteront. De même les militants politiques feraient bien de se tenir à distance des sujets en débats entre les syndicats sur la tactique à suivre. Une raison simple est que cela ne changera rien sinon à créer un sentiment de confusion et de chicayas qui ne servira surement pas l’objectif. Ce n’est pas le moment. Je crois le but à portée de main.

Mon optimisme est raisonné. Je me doute qu’on le mettra sur le compte de la posture. C’est vrai en partie. Et ce n’est pas d’aujourd’hui. Je ne partage pas du tout ce reflexe morbide d’une certaine gauche aigre qui voit toujours et par principe le verre à moitié vide sans se rendre compte que c’est une autre façon d’aider à le vider davantage encore. Cependant, dans le cas, mon optimisme de l’action tient à deux ancrages. D’abord l’importance du sujet dans l’esprit du commun des mortels. Avec la question des retraites c’est une certaines forme d’idée de la vie sociale qui se joue. En fait c’est la première fois depuis longtemps qu’un projet veut modifier de façon aussi intime et radicale la façon de penser le déroulement de sa vie. La retraite c’est un sujet second dans les couches supérieures de la société où l’usure au travail est peu ressentie et où « l’oisiveté » est redoutée. Mais pour la majorité de la population active l’usure au travail se paie comptant, dans sa chair et toute rallonge est une peine supplémentaire, parfois décisive pour ce qui est du cap qui sépare bonne ou mauvaise santé, gêne ou handicap. La colère est donc grande, quoiqu’en dise qui on voudra et donc la disponibilité pour approuver l’action est considérable. Voila pour nos forces. En face, c’est l’inverse. Je ne vais pas redire ce que chacun sait, voit et sent. La droite politique a commencé à se débander. En atteste les montée au créneau des Villepin et autres cette semaine. Elles témoignent de leur ressenti : pour eux l’espace s’est ouvert. La raison est dans la conjoncture cela va de soi. La superposition de l’affaire Woerth-Bettencourt avec le contexte général a coupé le moteur déjà bien crachotant de l’effet Sarkozy. L’échec est profond car le président avait remporté à la présidentielle une victoire qui était annoncée comme le retournement définitif du cycle politique venu de 1968 et même de celui issu de la Libération. Désormais on allait aimer l’Etat absent, les services publics dégraissés et les riches. C’est le sentiment exactement contraire qui est dominant aujourd’hui. Le cœur de l’effet Sarkozy est mort. Si la mobilisation des retraites tient la durée, Sarkozy ne peut tenir le choc. Sa majorité ne suivra pas davantage qu’elle n’avait suivi Chirac et Juppé sur le même sujet à mesure que s’allongeaient les cortèges de manifestants. Le changement de gouvernement annoncé pour octobre voulait être un rebond, nous allons en faire un enterrement.


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