Arros : l’île mystérieuse des Seychelles

mercredi 28 juillet 2010.
 

L’affaire Woerth-Bettencourt
est déjà devenue le feuilleton de l’été. Elle ranime les conversations, une fois épuisés les commentaires sur les contre-performances des Bleus en Afrique du Sud et sur les prévisions météorologiques. Les turpitudes qu’elle révèle nous donnent parfois la nausée. Mais elle n’en est pas moins fort instructive. Elle nous renseigne sur la vie des riches, qui, contrairement à ce que beaucoup de gens pensent, n’est pas un long fleuve tranquille, ni un chemin jonché de pétales de roses.

Ainsi avons-nous appris l’existence d’une île aux Seychelles, inondée de soleil, et qui a la singularité d’être tout entière la propriété d’une personne, en l’occurrence Mme Bettencourt, semble-t-il. L’île d’Arros donne bien du souci à l’héritière de L’Oréal. En est-elle encore propriétaire, ou seulement locataire  ? L’a-t-elle cédée à son ami, le photographe François-Marie Banier  ? On évoque une fondation qui en serait officiellement propriétaire. On parle de sociétés offshore avec adresse au Liechtenstein. Un écheveau bien difficile à démêler, d’autant plus que l’île n’aurait, dit-on, pas été déclarée à l’administration fiscale...

C’est ainsi que les hommes vivent, dans
 ce petit monde discret et entouré des hauts murs 
des intérêts de classe, obligés de se protéger de ces damnés fonctionnaires qui ont l’outrecuidance de penser que tous les citoyens doivent contribuer au développement de la société proportionnellement à leurs moyens financiers. L’intérêt de classe les conduit à se doter de relais politiques, d’hommes dévoués à leur cause et de partis capables d’occuper le pouvoir et de les protéger.

Tout cela se paie,
il faut savoir investir un peu pour gagner gros. La question de savoir quel rôle particulier a joué Éric Woerth dans cette collusion entre l’argent et la politique de droite n’est pas l’essentiel. Le ministre a été blanchi par un service soumis à son autorité. Qui n’a pas trouvé de lettre du ministre enjoignant l’administration fiscale à établir un traitement de faveur à Mme Bettencourt... On nous pardonnera de ne pas nous satisfaire de telles conclusions. L’obstination du pouvoir à refuser la constitution d’une commission d’enquête parlementaire n’est pas non plus pour nous rassurer.

Chaque jour, de nouveaux éléments surviennent qui alimentent la chronique. Hier, ce fut la garde à vue du photographe, du gestionnaire de la fortune Bettencourt, de l’ex-avocat de la milliardaire et du gérant de l’île d’Arros, et le mystère n’en finit pas de s’épaissir. Mais tout cela n’est que l’illustration haute en couleur, et avec des personnages que l’on aurait pu croiser dans un roman de Balzac, d’un système qui n’a que trop vécu pour avoir déjà trop nui à des millions de petites gens. Ce système capitaliste capable de se doter d’un arsenal sophistiqué pour traquer les sans-papiers, pour contrôler les chômeurs, pour réduire les prestations sociales, mais qui est mis dans l’incapacité de s’opposer à l’évasion fiscale du petit monde de l’île d’Arros.

Par Jean-Paul Piérot


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