L’effondrement boursier de BP fait peser un risque sur les retraites des Britanniques

dimanche 20 juin 2010.
 

Au moment ou la droite aimeraient nous offir une retraite par capitalisation sans trop oser en parler , il est amusant de constater que :

BP est un placement phare des caisses de retraite et a toujours choyé ses actionnaires en distribuant de généreux dividendes.

Compagnie vedette de la Bourse de Londres et valeur star des fonds de retraite, BP est tombée de son piédestal. La City s’inquiète des menaces de représailles américaines, qui pourraient saper les énormes intérêts outre-Atlantique du géant britannique. Premier producteur de pétrole des Etats-Unis, BP possède 40 % de ses actifs totaux aux Etats-Unis, essentiellement en Alaska et dans le golfe du Mexique.

Un autre facteur explique la nervosité de la place de Londres. Les exigences américaines de réduire, voire de suspendre le versement d’un dividende – une hypothèse que n’a pas exclue, vendredi 11 juin, Tony Hayward, le directeur général du groupe –, ont provoqué un vent de panique dans les fonds de pension du Royaume-Uni.

RECENTRAGE SUR LES HYDROCARBURES

BP est en effet un placement phare des caisses de retraite. Symbole de la grandeur impériale passée, l’ex-British Petroleum a toujours choyé ses actionnaires en distribuant de généreux dividendes. Depuis le 20 avril, date de l’accident de Deepwater Horizon, sa capitalisation boursière a perdu 49,6 milliards de livres (61 milliards d’euros). Le titre s’est fortement ressaisi à New York, jeudi.

"A un moment, il faut tracer une limite" à ce qu’on peut exiger de BP, a laissé échapper un de ses dirigeants. Le ministre américain de l’intérieur, Ken Salazar, venait de demander au groupe pétrolier de verser les salaires des employés ayant perdu leur emploi en raison du moratoire de six mois décrété sur les prospections en eaux profondes.

Pour BP, le coût final de la catastrophe, si la société devait se plier aux exigences croissantes des autorités américaines, donne le tournis. Elle a déjà déboursé 1,2 milliard de dollars, mais les pronostics des analystes de Goldman Sachs, qui font autorité dans les milieux pétroliers, évoquent une somme finale de 33 milliards de dollars sur dix ans ! A croire un analyste du courtier Oppenheimer, les marchés sont persuadés qu’"à terme, la compagnie pourrait être liquidée, ou vendre la plupart de ses actifs stratégiques".

Au-delà des déclarations guerrières des responsables américains, c’est toute la stratégie lancée en 2009 qui est ébranlée. A l’occasion du centième anniversaire de la fondation de BP, M. Hayward, avait annoncé un recentrage sur les hydrocarbures, avec un retrait progressif des activités périphériques, notamment des énergies alternatives. La priorité était au renforcement des réserves.

MENACÉ D’OPA

Si la compagnie a pris pied en Irak et a renforcé son implantation en Russie, en Libye et à Oman, elle met l’accent sur l’offshore. Les richesses du golfe du Mexique, de la Caspienne, des eaux du Ghana et du Brésil, ont la faveur des roughnecks, les "nuques de cuir", comme on appelle les ouvriers de l’exploration-production.

La nomination en 2009 à la présidence du suédois Carl-Henric Svansberg, venu d’Ericsson, dépourvu d’expérience pétrolière, devait insuffler une dynamique nouvelle à un comité de direction plutôt rassis. Le tandem devait être complémentaire : à M. Hayward, qui a fait toute sa carrière chez BP, la gestion, la chasse aux coûts et l’amélioration de la sécurité ; à M. Svansberg la stratégie et les contacts politiques et financiers. La marée noire a emporté le second ; le premier a multiplié les erreurs de relations publiques.

La City parie déjà sur le successeur de M. Hayward arrivé au sommet en 2007 pour remplacer le légendaire Lord John Browne. L’Américain Bob Dudley, ex-patron de TNK-BP, chargé de la cellule de crise, Andy Inglis, patron de l’exploration-production ou Iain Conn (raffinage-distribution) sont bien placés. Mais du fait de la chute de la capitalisation boursière et des achats massifs du titre par les hedge funds, BP est sous la menace d’une offre publique d’achat d’un rival comme ExxonMobil.

Marc Roche avec Sylvain Cypel (à New York)


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