Montauban.. Une ville, une usine…
 et des patrons voyous

dimanche 20 juin 2010.
 

L’entreprise familiale Bouyer à Montauban a vécu la gestion capitaliste de ces vingt dernières années : des profits réalisés sur le dos de salariés qui paient la casse sociale au prix fort.

Il est loin le temps de l’entreprise familiale Bouyer fondée en 1933. Ses ouvriers, qui produisent du matériel pour sonoriser les lieux publics tels les halls de gare, ont depuis rencontré le libéralisme. Tout a basculé en 1987, quand elle est reprise en LBO, ce système carnassier d’acquisition par emprunt. C’est Natexis qui est à la manœuvre avec comme seul horizon, les profits. « On a subi le harcèlement de plein fouet », se souvient Brigitte Coureau. Secrétaire CGT du CHSCT, à quarante-neuf ans, elle en a passé près de trente à Bouyer. Insultes, mises au placard, « c’est le PDG qui nous harcelait », dit-elle. Après une lutte acharnée, le directeur sera révoqué, « sans avoir été puni »  ! Pour les salariés, c’est le début de la descente aux enfers avec l’institution d’un régime de terreur.

Après le LBO, les repreneurs vont se succéder jusqu’au dernier qui aura presque eu la peau des Bouyer  : Funkwerk, un groupe allemand. « On a cumulé des patrons voyous  ! » s’indigne Brigitte. Son collègue, Jean-Michel Raynal, ingénieur et élu CGT, explique  : « On a eu quatre DRH en six ans  ! Il n’y a donc pas eu de cohésion. Ça changeait au gré des actionnaires et tout ce qu’on a proposé aux gens, ce sont des PSE (plans de sauvegarde de l’emploi – NDLR). » Au quotidien, la tension monte et beaucoup de salariés sont sous antidépresseurs. Les Bouyer seront même cités en exemple lors du vote de la loi sur le harcèlement au travail en 2002  : « On en a été les détonateurs », insiste Brigitte. Effectivement, le dernier rapport sur les risques psychosociaux est édifiant  : « Usine très endommagée », conclut-il. « On a même eu une alerte de type 3 qui est le pire niveau », fait remarquer Jean-Michel. « En vingt-cinq ans de travail, le cabinet nous a dit qu’il n’avait jamais vu ça  ! » poursuit Brigitte avant de décrire « les nombreuses dépressions, les cris et ceux qui pleurent pour un rien » à cause de la pression. Depuis, Funkwerk s’est désengagé, mettant ainsi Bouyer en péril. Les salariés ont vite lancé un projet de reprise qui a eu le soutien de la région et du département. Le tribunal de commerce a choisi, pour la reprise, DEF qui œuvre dans la sécurité incendie. Résultat  : 56 emplois sont conservés,
64 personnes licenciées. Mais ils n’en ont pas terminé avec l’ancien actionnaire allemand  : 111 salariés le poursuivent aux prud’hommes pour « exécution déloyale du contrat de travail et non-respect des obligations de sécurité ».

Nicolas Séné


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