L’affaire Woerth révèle le décalage entre la France qui nous gouverne et la France réelle

jeudi 24 juin 2010.
 

Donc le ministre Woerth, l’homme de la réforme des retraites qui va particulièrement enfoncer les travailleurs les moins aisés et les chômeurs âgés, était dans le même temps "un ami" de la famille Bettencourt. Où l’on apprend que "l’ami" "s’occupe (des) impôts" de la famille (à l’époque il était au budget) et aurait "demandé" qu’on embauche sa femme. Et le ministre aujourd’hui en charge de "baiser" les salariés explique que circulez-y-a-rien-à-voir, sa femme n’est - justement - que "salariée". Et son copain Guaino d’ailleurs "n’imagine pas" qu’il ait pu faire quelque chose de mal.

Pour moi ce n’est pas du tout une "tentative de déstabilisation", mais un éclairage supplémentaire sur cette réforme. Au delà du grossier conflit d’intérêt, qui voit la femme de ministre du budget travailler plus ou moins aux plans d’évasion fiscale de la première fortune de France, comme le dit Montebourg - allez planquez moi cette ile des Seychelles que je ne saurais voir, se révèle le décalage entre la France qui nous gouverne et la France réelle. En bas, des électeurs qui ont fait confiance, grosso modo, au "travaillez plus pour gagner plus", et qui après avoir vu s’envoler ces belles promesses, vont surtout travailler plus longtemps pour toucher moins de retraite. En haut, des types qui fréquentent l’aristocratie du capital, et qui sont effectivement à son service, y compris en tant que "salariés".

Ce n’est pas un procès de principe ; quand on baigne dans ce milieu d’affaire, on finit par en épouser le point de vue, puis naturellement les intérêts. Après tout, une bonne partie du patrimoine du ménage Woerth se constituait grâce à la famille Bettencourt. Ce n’est que la dernière manifestation du lien organique de ce gouvernement d’avocats et de banquiers d’affaire avec les intérêts des grands patrons, qui ne se limitent donc pas aux affinités sarkoziennes révélées à la teuf au Fouquet’s. Si les socialos des années 80, le fameux "gouvernement des R25", étaient déjà une caste d’énarques éloignés du peuple, on est carrément revenu aux années d’avant le Front populaire, au gouvernement des deux cents familles.

Et on comprend mieux les moulinets populistes, qui eux aussi viennent du fond du cœur - à défaut d’aider le peuple, on singe son expression pour mieux le tromper, jusqu’à célébrer le 18 juin à coup de fautes de grammaire. Ils ne servent qu’à faire oublier combien nous avons un gouvernement de classe. Même si certains défendent ces choix au nom de "la compétitivité" et trouvent qu’il est juste (ou qu’on n’a pas le choix, ce qui est la même chose) de faire payer aux salariés l’essentiel de la réforme - y compris la risible hausse de 1% de la tranche la plus haute de l’impôt sur le revenu, qui concernera surtout des salariés mieux lotis, pas les vrais riches - force est de constater que tout ce que fait ce pouvoir est entaché du soupçon d’un conflit d’intérêt fondamental, qui dépasse largement l’affaire Woerth, et qui devrait se régler dans les urnes en 2012.

Par Guillermo, le lundi 21 juin 2010


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