Villepin fait le coup de la fracture sociale

mardi 30 mars 2010.
 

L’ancien premier ministre lance son mouvement « indépendant ».

Le ton fut solennel. La voix grave et lente. Hier, Dominique de Villepin a repris l’accent de celui qui regarde la France avec hauteur, de celui qui porte une vision et s’inscrit dans l’histoire. Légitimé par l’échec de la droite aux régionales, et le message « de défiance, d’exaspération et de sanction » sorti des urnes, l’ancien premier ministre a estimé que les traditions démocrate-chrétienne et gaulliste, absorbées par le discours sarkozyste, n’ont pas eu l’occasion de s’exprimer. Ainsi a-t-il entonné le chant d’une France qui souffre, de ces « millions de compatriotes qui ont des fins de mois difficiles, à quelques euros près ». Fustigeant les remaniements à la marge et les ajustements techniques – autant de « cautères sur une jambe de bois » –, Dominique de Villepin souhaite « revenir aux fondamentaux », la République, la nation, l’État, car le « contresens commis en 2007 à travers la politique de rupture a été de penser qu’on pouvait rompre avec la France » et le pacte social et républicain « signé au lendemain de la guerre ». Dans un élan qui n’avait rien à envier au théoricien de la nation au XIXe siècle, Ernest Renan, il a estimé qu’un changement de politique supposait « que nous ayons une vision partagée de l’avenir ».

« Il faut de temps en temps savoir faire son examen de conscience », a dit celui qui n’a toutefois pas renié le contrat nouvelle embauche, qui lui avait valu, au temps où il était locataire de Matignon, des millions de personnes dans la rue. Mais, pour « assouplir les moyens d’entrer et de sortir » du marché de l’emploi, il faut, a-t-il estimé, « donner des garanties ». Répartir les efforts, donc. Et supprimer le bouclier fiscal, qu’il avait lui-même inauguré à hauteur de 40 %. Il a par ailleurs souhaité « augmenter la plus haute tranche de l’impôt sur le revenu de 45 % » et établir « une surcote de 10 à 15 % pour l’impôt sur les sociétés ». Bref, « aller chercher les milliards où ils sont ». Dominique de Villepin a ensuite évoqué une hypothétique « charte des salaires pour réduire l’écart entre les Français ».

Avec une certaine idée de la France comme fil conducteur, l’ancien premier ministre a refusé de s’inscrire dans le temps de la présidentielle, niant défendre une ambition personnelle. Donnant les grandes lignes de son mouvement « libre et indépendant », qui verra définitivement le jour le 19 juin, Dominique de Villepin, qui dit n’avoir jamais revendiqué « aucune paternité politique », souhaite transcender les clivages partisans. Sans assise territoriale et soutenu par un cercle restreint d’élus, son club compte quelque 15 000 adhérents. « L’isolement n’est pas une question de nombre, c’est un état d’esprit, a-t-il asséné en un demi-sourire, je pense partager le sentiment de beaucoup de Français. »

Lina Sankari


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