Manifeste du PGE ( Parti de la gauche européenne) sur l’enseignement

jeudi 24 décembre 2009.
 

La profonde crise actuelle du capitalisme, qui n’est pas seulement de nature financière, a et aura de graves répercussions sur la politique, l’idéologie, le social et sur le mode de vie des femmes et des hommes dans le monde entier. Afin de remédier aux contradictions émergentes, le capitalisme détruit tous les acquis issus de luttes difficiles menées partout en Europe et dans le monde. Les peuples d’Europe doivent s’opposer à cette attaque, imposer leurs choix politiques et soutenir la lutte contre les forces du capital et toute forme de domination.

Nous le savons tous : les différents systèmes d’éducation et d’enseignement forment la base du présent et de l’avenir de nous tous, notamment de la jeunesse. Etant donné les changements dramatiques causés par la crise financière, le rôle de l’enseignement ne cesse de gagner en importance. Bien que la révolution de l’information ait ouvert des perspectives radicalement nouvelles pour le développement des capacités humaines, nous assistons à une division sociale sans précédent : la majorité de la population se retrouve dépourvue du matériel et du potentiel intellectuel nécessaires à une vie décente. La vaste restructuration capitaliste, causée par la mondialisation, exige un nouveau modèle d’employé flexible, disposé à accepter des emplois précaires et à s’adapter à plusieurs environnements différents. En conséquence, le rôle de l’enseignement n’est plus de diffuser le savoir, mais du savoir-faire adapté au marché. Simultanément, l’excellence académique redevient comme auparavant l’apanage unique de la future élite gouvernante. Tout comme les autres biens publics (la santé, l’eau), l’enseignement est invendable et figure parmi les piliers les plus importants de l’Etat providence. Or, affaiblir ces piliers constitue un des objectifs majeurs de la politique néolibérale. C’est pourquoi les différents gouvernements ne cessent de réduire le financement de l’enseignement public et font tout pour abaisser son niveau.

Partout en Europe, les inégalités sociales s’intensifient. La précarité et la pauvreté s’aggravent. Mais il serait absurde de croire que les écoles ainsi que les autres institutions éducatives seraient les seuls responsables des conséquences tragiques que cette situation engendre : difficultés d’insertion professionnelle, destruction du tissu social, violence… En même temps, l’enseignement, par sa nature et ses systèmes de fonctionnement joue indéniablement un rôle crucial dans la reproduction d’inégalités et dans la division de la population en classes sociales. Dans les pays de l’Union européenne, les politiques néolibérales de l’enseignement ont fait partie intégrante du développement du capitalisme ; les différentes caractéristiques nationales ne changent donc rien à la logique fondamentale. La violence des politiques néolibérales ainsi que la diminution des fonds publics destinés à l’enseignement et à la recherche font que l’exclusion sociale, l’abandon scolaire, la flexibilité sur le marché du travail à tous les niveaux sont devenus la norme dans le domaine de l’enseignement, et ceci partout en Europe. S’ajoute à cela la privatisation progressive du système, aussi bien de l’intérieur (concurrence entre les universités pour des étudiants-clients, recherche dirigée vers le profit…) que de l’extérieur (progression de l’enseignement privé…).

On assiste à un retour au passé et à une dévalorisation et perte de prestige de l’école publique, dépréciation qui a commencé il y a plusieurs années. En effet, la plupart des politiques d’enseignement de l’Union européenne sont fondées sur la logique prédominante selon laquelle l’appropriation de connaissances sert principalement à cumuler un maximum de profit à court terme et à permettre la spéculation capitaliste – logique qui a transformé le savoir en une marchandise parmi d’autres. Dans ce contexte, la fonction de la recherche fondamentale est remise en cause, tout comme l’indépendance intellectuelle des enseignants et des chercheurs.

L’objectif de la logique néolibérale du processus de Lisbonne, définie lors du Conseil européen de 2000, prévoit de « faire de l’Europe l’économie de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique du monde, capable d’une croissance économique durable accompagnée d’une amélioration quantitative et qualitative de l’emploi et d’une plus grande cohésion sociale dans le respect de l’environnement ». Le défi à relever serait de créer une économie de plus en plus « fondée sur la connaissance ». Mais en réalité, la stratégie de Lisbonne a soumis l’enseignement et la recherche aux critères du marché capitaliste et mondialisé. En outre, l’enseignement européen n’a cessé de perdre de sa dimension humaniste, tellement forte au départ. L’enseignement public – qui, de par la nature de sa mission, constitue l’unique institution capable d’accueillir tous les enfants – se voit accusé d’être inefficace et arriéré.

Alors que le temps d’une véritable révolution pédagogique à tous les niveaux du système de l’enseignement est venu, la logique néolibérale se met à fragmenter le savoir en différents savoir-faire pratiques et à détruire les acquis culturels.

Cette politique enferme les jeunes, notamment les plus pauvres, dans une culture appauvrie, de consommation avec un monde imaginaire de gadgets. In fine, elle prive les jeunes d’une citoyenneté complète et socialement active qui leur permettrait de comprendre et de contrôler la complexité du monde, de lutter contre l’inégalité sociale et contre l’exploitation.

Autrement dit, l’école actuelle ne permet pas aux jeunes d’accéder à la maîtrise des connaissances et de conquérir un esprit critique pour le développement de leur personnalité. L’enseignement néolibéral vise uniquement à produire des femmes et des hommes soumis et dociles au lieu de former des citoyens émancipés. Ainsi, l’Europe de demain perd tout son potentiel créatif humain, pourtant profondément nécessaire à son développement. En conséquence, les réformes dans l’enseignement basées sur les principes de Lisbonne empêchent une véritable démocratisation des institutions publiques ainsi que la promotion de l’enseignement public.

Tous ces développements doivent prendre fin ! Le PGE exige :

· Un enseignement public, laïc et gratuit, accessible à toutes et à tous.

· Un accès égal au savoir et au niveau culturel le plus élevé pour tout citoyen.

· Le droit pour tout citoyen– indépendamment de sa classe sociale, de son sexe, de son ethnie, de son orientation sexuelle, de sa religion – de développer pleinement ses capacités intellectuelles ainsi que d’avoir accès à un enseignement, une formation tout au long de sa vie.

Nous luttons pour :

1. Un enseignement public et gratuit qui, de l’école maternelle à l’université, s’oppose à la logique du marché. Un enseignement qui affirme la primauté absolue de l’être humain sur toute préoccupation de rentabilité et qui fait de l’intégration son premier souci pédagogique.

2. Un enseignement public et gratuit qui, de l’école maternelle à l’université, unit toutes les connaissances. Un enseignement qui permet aux jeunes de développer un esprit critique et de profiter des acquis scientifiques, sociaux et politiques les plus brillants des générations antérieures.

3. Un enseignement public et gratuit qui, de l’école maternelle à l’université, lutte contre les stéréotypes liés à la différence de genre, promeut l’idée de paix, de coopération harmonieuse de tous les peuples et de développement respectueux et en équilibre avec la nature et l’environnement. Un enseignement qui vise à développer une pensée libre, un esprit critique, créatif et émancipé, l’épanouissement personnel.

4. Un enseignement public et gratuit qui, de l’école maternelle à l’université, permet à tout citoyen d’acquérir une connaissance fondamentale et de se familiariser avec les formes les plus élaborées d’un savoir qui évolue tous les jours.

5. Un enseignement public et gratuit où le personnel éducatif a droit à une formation continue, à la réflexion sur la pratique pédagogique en liaison avec la recherche scientifique.

Ce projet est possible et se réalisera à travers nos luttes politiques contre la stratégie de Lisbonne et les principes d’une « concurrence libre et non faussée ». Ce projet est possible et se réalisera à travers les efforts communs de toutes les forces socialistes en faveur d’un système de l’enseignement alternatif en Europe. Ceci ayant le but d’éliminer les inégalités territoriales, tout en gardant les différences culturelles.

Les forces du capital ne sont ni imbattables ni toutes-puissantes. Au contraire, elles sont impuissantes en face de toutes ces personnes qui luttent pour un enseignement tourné vers l’émancipation humaine, qui luttent en faveur d’une meilleure vie pour toutes et pour tous.

16 avril 2009, à Rome,

Présentation publique par le groupe de travail « éducation » du PGE du Manifeste du Parti de la gauche européenne sur l’enseignement qu’il a élaboré


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