Identité nationale Une honte nationale (par Edwy Plenel, MEDIAPART)

jeudi 9 septembre 2010.
 

2) Une régression ... aux fins de libérer, honorer et banaliser les idées, les hommes et les époques qui ont incarné le refus des idéaux démocratiques et républicains (texte de décembre 2009 contre une participation au "débat sut l’identité nationale")

1) L’Appel de Mediapart : « Nous ne débattrons pas »

2) Une régression ... aux fins de libérer, honorer et banaliser les idées, les hommes et les époques qui ont incarné le refus des idéaux démocratiques et républicains

par Edwy Plenel

L’Appel de Mediapart, « Nous ne débattrons pas » est suffisamment explicite pour se passer de commentaires. En revanche, son succès en appelle. Son ampleur, la diversité de ses signataires comme leur croissance ininterrompue en ligne, est un événement qui va au-delà de son propos initial – le refus principiel de cautionner une machine infernale, de division et d’exclusion.

Pour nombre des premiers pétitionnaires qui, de plus, ne sont pas tous dans l’opposition systématique au pouvoir en place, il n’allait pas de soi de proclamer un refus symbolique de débattre alors même que la démocratie suppose la libre discussion et l’entière délibération. S’ils ont franchi ce pas, vaincu leurs réticences et, pour certains, quitté leur silence, c’est qu’ils partagent ce sentiment diffus que, dans cette affaire d’identité nationale, autre chose est en jeu qui nous dépasse et nous requiert : le salut d’une certaine idée de la France et du monde face à un pouvoir qui, l’abaissant et l’humiliant, nous fait honte.

Sans précédent depuis l’élection en 2007 de Nicolas Sarkozy, ce sursaut a pour moteur la compréhension qu’avec ce « grand débat sur l’identité nationale », se donne à voir la nature profonde du régime. Non plus seulement ses apparences et ses tactiques, ses coups ou ses esbroufes, son agitation ou sa personnalisation, mais sa régression essentielle, sa dangerosité véritable. Car cette manœuvre détestable ne se réduit pas à l’évidente fuite en avant d’un pouvoir privé de résultat tangible et confronté à sa propre faillite – quadruple faillite financière, économique, sociale et morale, largement documentée sur Mediapart.

Tout en cherchant à masquer cet échec, cette exacerbation du national comme pathologie de l’identité et fantasme de l’autre, comme fixité et fermeture plutôt que comme mouvement et ouverture, dévoile ce qui est politiquement à l’œuvre derrière le personnage présidentiel, les références partagées qui unifient son propre entourage et celui de son premier ministre, le projet idéologique qui réunit leurs principaux collaborateurs et conseillers.

Ici, deux discours font preuve. Ils ont été pesés, pensés et mûris. L’un a inauguré la séquence « Identité nationale », explicitant la mission confiée à Eric Besson : c’est celui de Nicolas Sarkozy à La Chapelle-en-Vercors, le jeudi 12 novembre. L’autre l’a prolongée, maintenant le cap malgré la polémique croissante : c’est celui de François Fillon, au colloque de l’Institut Montaigne, à Paris, le vendredi 4 décembre. Deux discours, deux moments, deux personnalités, deux fonctions, et, cependant, du président de la République au premier ministre, le même contenu, les mêmes références et la même intransigeance.

Il faut les lire avec attention, mot à mot, ligne à ligne, afin de prendre l’exacte mesure du retour en arrière que MM. Sarkozy et Fillon veulent imposer à la France. Une régression dont le levier est une insidieuse négation historique, révision mensongère de notre passé aux fins de libérer, honorer et banaliser les idées, les hommes et les époques qui ont incarné le refus des idéaux démocratiques et républicains.

Effacé, le souvenir de l’Etat français de Vichy

Le discours de Nicolas Sarkozy, d’abord. « Depuis deux cents ans, à part l’expérience sanglante de la Terreur, nul totalitarisme n’a menacé nos libertés. C’est que la culture française est irréductible au totalitarisme » : ne se rendant même pas compte de l’énormité de ce qu’il affirme, le président de la République énonce ce mensonge juste avant d’affirmer qu’en 1989, avec la chute du « Mur de la honte », « les valeurs de la démocratie et de la République triomphaient ».

Pour le coup, c’est la France qui, soudain, a honte. Car, d’une phrase d’une seule, l’actuel chef de l’Etat vient d’effacer le souvenir de l’Etat français de Vichy (1940-1944) et des indiscutables crimes du régime incarné par Philippe Pétain – synonyme de dictature personnelle, de terreur policière et de persécution raciale. Lequel régime, on l’oublie trop, issu de la droite extrême plutôt que de l’extrême droite, garda, au grand dam des authentiques fascistes français, trois des symboles nationaux auxquels Nicolas Sarkozy voudrait aujourd’hui, dans le même discours en Vercors, réduire l’« honneur d’être français » : le drapeau tricolore comme oriflamme, La Marseillaise comme hymne et le 14 juillet comme fête. Preuve, s’il en était besoin, que l’espérance républicaine ne s’y résume pas, et forcément les outrepasse.

Cette énormité fut donc prononcée dans un discours dont les trois autres points d’ancrage sont l’affirmation de « la Chrétienté » (avec majuscule) comme identité première de la France, placée pour la forme à équivalence avec les Lumières ; la dénonciation de « l’égalitarisme » comme source du renoncement et de l’abandon national ; enfin, la revendication du rétablissement de l’autorité comme priorité, autorité explicitement identifiée à celles de la police et de l’Etat, lesquelles institutions sont ici libérées de toute définition contraignante – « la Police », elle aussi avec majuscule, et non pas la police républicaine ; un Etat sans qualité, et non pas l’Etat de droit (la justice n’est pas mentionnée).

Ainsi entendue, la France serait, à la fois, une éternité dont « la morale chrétienne » serait le socle ; une distinction dont l’élitisme suppose le refus d’une égalité niveleuse ; et une discipline dont l’observation respectueuse suppose obéissance et cohésion. Une France, n’hésite pas à affirmer en 2009 celui qui la préside, où la République est surtout débitrice de l’Ancien Régime dont elle aurait « accompli le vieux rêve capétien d’une France une et indivisible et d’un Etat dominant les féodalités ».

La logique de cet énoncé est de désigner ceux qui, pour reprendre précisément les mots de ce discours présidentiel, ne méritent pas l’honneur d’être français ou ne peuvent le devenir car n’adhérant pas « à une forme de civilisation, à des valeurs, à des mœurs » dont les seuls symboles ici énumérés sont les cathédrales, le Mont-Saint-Michel, Notre-Dame de Paris, la cathédrale de Reims et chaque église de village avec son clocher « qui le surplombe depuis dix siècles ».

Ces mauvais sujets sont évidemment étrangers, étrangers voulant nous rejoindre ou déjà parmi nous, étrangers même s’ils sont français d’apparence administrative, immigrés, Français d’ailleurs, Français différents, Français dissidents. C’est bien ce que suggère l’énumération présidentielle qui, par le détour d’une seule mention particulière, celle de la burka, évoque l’islam, confondu avec son extrémisme ultra-minoritaire, et, surtout, nie tout droit légitime à une partie de la population vivant en France, ne la rappelant qu’à des devoirs, devenus la condition de l’accès aux droits.

Ce passage du discours illustre parfaitement à quoi sert cette imposition de la question nationale comme ordre du jour central : à une immense régression sociale, à transformer des droits en privilèges, à remettre en cause l’idée même d’une justice sociale, bref, à renforcer les inégalités et à accroître les injustices. La France, dit Sarkozy, « demande qu’on la respecte. On ne peut pas vouloir bénéficier des droits sans se sentir obligé par les devoirs ». Suivent alors les mentions de la sécurité sociale, des allocations chômage et de la gratuité des études comme trois avantages dont on ne pourrait ni « bénéficier » ni « profiter » si l’on ne se comporte pas en citoyen conforme, obéissant et discipliné, c’est-à-dire toujours prêt à « se demander ce que l’on peut faire pour son pays ».

L’ennemi, dans cette mise en guerre du pays avec lui-même, outre l’étranger immigré ou le Français fidèle à son passé étranger, c’est « l’assisté », dont il va falloir « exiger qu’il fasse tous les efforts » qu’appelle sa déplorable condition, et, bien sûr, tous ces mauvais Français incapables d’aimer suffisamment la France pour vibrer à cette définition sarkozyenne, pourtant d’une stupidité abyssale : « Un Français reconnaît d’instinct une pensée française, une région française et il s’y sent chez lui. »

François Fillon en disciple de Maurice Barrès

Loin de nuancer ce nationalisme d’un autre âge, comme l’ont cru des commentaires pressés, le discours de François Fillon à l’Ecole militaire, le 4 décembre, l’a accentué. Revendiquant sa volonté politique de mettre « la question nationale » au cœur du débat politique et critiquant vivement ceux qui s’y refusent, le premier ministre a prononcé cette phrase : « Ce mutisme assumé, je pense qu’il révèle bien des malentendus qu’un siècle de critiques a pu creuser entre les Français et l’idée même de la Nation. »

Il s’agit donc bien de revenir un siècle en arrière, de renouer avec le bouillon de culture des idéologies conservatrices de la fin du XIXe et du début du XXe siècles, d’oublier leur responsabilité directe dans les catastrophes meurtrières qui ont ensanglanté l’Europe et de donner finalement tort à ceux qui, à la Libération, des gaullistes aux communistes, imposèrent à une droite conservatrice, défaite et discréditée, sinon la réalité accomplie du moins les valeurs référentielles d’une démocratie libérale et d’une république sociale qu’elle avait toujours eu en horreur.

« Être français, c’est d’abord appartenir à un très vieux pays d’enracinement. » La France de François Fillon, dans le même discours, est par essence une immobilité, une « France des origines » tissée de « lignées anciennes ». C’est pourquoi l’imaginaire de ce nationalisme conservateur est d’abord géographique, fait de paysages éternels, tant il redoute l’histoire imprévisible, ses ruptures, ses mouvements, ses aléas, sa liberté en somme.

Exprimant une peur panique du présent et du mouvement, de l’inattendu et de l’imprévu et, donc, de l’hôte de passage, de l’invité surprise, bref, du surgissement du monde, il a pour mot de passe, de l’antidreyfusard Maurice Barrès au souverainiste François Fillon, l’enracinement. Et pour cible, évidemment, les déracinés, titre du plus connu des bréviaires barrésiens. Les déracinés, autrement dit tous ceux qui témoignent d’identités de relations plutôt que de racines, d’identités en mouvement et en déplacement, faites de liens et d’échanges, de brassages et de mélanges, de rencontres et de partages.

Dès le début du discours du premier ministre, la référence à Maurice Barrès est explicite. Evoquant successivement, comme les trois périls qui menacent la France, « une société sans âme, dominée par un individualisme forcené », une Europe « plus technocratique que politique » et « une mondialisation désincarnée qui ferait de nous des pions anonymes », il les résume d’un seul mot, le déracinement : « Les Français ne peuvent souscrire à un tel déracinement. »

Contre ces trois perditions – l’individu, l’Europe et le monde –, il faudrait donc défendre nos racines. Et quelles sont-elles pour François Fillon ? Tout simplement, la chrétienté, la ruralité et l’unicité. Une France qui « tient aux rythmes d’une tradition chrétienne et rurale », une France qui « n’oublie ni ses villages, ni ses coutumes », une France qui, face à la « pluralité », « a su opposer les vertus centralisatrices d’un principe fort ».

Ici, les concessions à la laïcité sont de pure forme, balayées par l’insistance chrétienne : « La France est laïque, mais la France est tout naturellement traversée par un vieil héritage chrétien qui ne saurait être ignoré par les autres religions installées plus récemment sur notre sol. » « Plus récemment » est ici essentiel, affirmation non seulement d’une supériorité faite d’antériorité mais, surtout, d’un devoir de soumission des autres religions et, par extension, des cultures différentes. Une droite maurrassienne, orléaniste et élitiste

« C’est aux étrangers qu’il revient de faire l’effort d’intégrer la France », lit-on quelques phrases plus loin, injonction qui transforme l’espoir de devenir français en épreuve contraignante plutôt qu’en rêve émancipateur : « Être français et vivre en France, c’est une chance mais c’est aussi une charge. » La France de MM. Sarkozy et Fillon n’accueille plus. Au mieux, elle recrute. Dans tous les cas, elle exige. Qu’on s’assimile, qu’on se soumette, qu’on se conforme, qu’on se convertisse, qu’on se noie et qu’on se perde. C’est une France de la ressemblance où la différence n’a pas sa place.

Quant à l’idéalisation de la ruralité, apparemment anachronique dans nos sociétés industrielles, elle résonne comme une citation qui fait sens, formule magique libérant une tradition politique refoulée. Dans son récent discours aux agriculteurs, Nicolas Sarkozy n’avait pas craint d’identifier la Terre, avec majuscule, à une saine identité nationale, comme en écho au fameux « la terre, elle, ne ment pas » du troisième appel du maréchal Pétain, lu le 25 juin 1940. Un appel rédigé par Emmanuel Berl, symbole de ces égarés de la gauche que leur égocentrisme sans boussole amènera à côtoyer Vichy, tout comme l’ancien communiste, socialiste, chevénementiste Max Gallo inspire aujourd’hui cette vision étatique d’une France éternelle fondée par la rencontre de la monarchie et de la chrétienté.

Vision mythologique bien sûr, fort éloignée de l’histoire avérée. Et pourtant vision désormais officielle, au risque international d’un ridicule qui ne tuera pas François Fillon : « Le fait est que, dans la tempête des invasions barbares, il n’y a guère que le petit peuple franc qui ait surnagé. Sans doute parce qu’en contrepoids d’un caractère belliqueux, incontestable, la légitimité et le droit étaient déjà deux obsessions françaises. »

C’est alors que, dans ce discours du premier ministre, surgit la référence à Jacques Bainville, évoquant Jeanne d’Arc tombant à genoux devant le dauphin. Bainville, ce fidèle de Charles Maurras, cette plume de L’Action française, dont les obsèques, le 13 février 1936, furent l’occasion d’une tentative de lynchage de Léon Blum, dont la voiture avait par mégarde croisé le cortège funèbre. Du leader socialiste, Maurras avait écrit : « Voilà un homme à fusiller, mais dans le dos », tandis que, pour son acolyte Léon Daudet, « Blum était le bruit que font douze balles dans la peau d’un traître ». Les processionnaires de l’enterrement de Bainville avaient ces mots-là en tête, et les mirent en pratique.

Soixante-treize ans plus tard, ce lapsus maurrassien dans la bouche d’un chef de gouvernement ne saurait relever de l’inculture. D’autant moins qu’il est cohérent avec l’ensemble des propos qui, du chef de l’Etat au premier ministre, dressent le portrait d’une France élue à la grandeur bien avant que la république ou la démocratie ne s’en mêle. Ou, mieux encore, grande malgré la république (réduite ici à la centralité du pouvoir) et malgré la démocratie (amputée ici de l’exigence d’égalité). Une France qui doit « être aimée et servie », dans l’obéissance, la cohésion et la discipline : « Les 65 millions de Français doivent faire bloc », insiste François Fillon, qui met en garde ceux qui ne voudraient pas en être, ceux qui critiquent, discréditent, voire, dit-il, « débinent constamment notre nation et ses valeurs » – ici, l’emploi d’un verbe familier élargit l’interdit à notre quotidienneté.

De cette Anti-France, M. Fillon dessine clairement les contours en trois mots : « Aujourd’hui, dans nos stades, dans nos cités, parmi nos élites, émerge parfois la tentation de défier la République, en affichant le mépris de ses symboles. » Stades, cités, élites : trois mots qui suggèrent le peuple, les immigrés et les intellectuels.

Evidemment, ces deux discours sont aussi parsemés de précautions ou d’allusions qui en masquent ou en atténuent la cohérence. Mais ce ne sont là que dénégations orwelliennes, mots vides de sens et références privées de signification. L’essentiel est ailleurs : pour la première fois depuis 1944-1945 s’énonce, au sommet de la République, l’idéologie de la droite extrême, celle qui fut au pouvoir avec Philippe Pétain sous Vichy, cette droite à la fois maurrassienne, orléaniste et élitiste qui n’avait jamais admis la démocratie libérale et qui vécut la victoire de l’Allemagne nazie comme sa divine surprise, cette droite que seules la victoire des Alliés et la personnalité de Charles de Gaulle obligèrent à admettre le principe de la République et sa devise de liberté, d’égalité et de fraternité.

Une droite maurrassienne, orléaniste et élitiste

« C’est aux étrangers qu’il revient de faire l’effort d’intégrer la France », lit-on quelques phrases plus loin, injonction qui transforme l’espoir de devenir français en épreuve contraignante plutôt qu’en rêve émancipateur : « Être français et vivre en France, c’est une chance mais c’est aussi une charge. » La France de MM. Sarkozy et Fillon n’accueille plus. Au mieux, elle recrute. Dans tous les cas, elle exige. Qu’on s’assimile, qu’on se soumette, qu’on se conforme, qu’on se convertisse, qu’on se noie et qu’on se perde. C’est une France de la ressemblance où la différence n’a pas sa place.

Quant à l’idéalisation de la ruralité, apparemment anachronique dans nos sociétés industrielles, elle résonne comme une citation qui fait sens, formule magique libérant une tradition politique refoulée. Dans son récent discours aux agriculteurs, Nicolas Sarkozy n’avait pas craint d’identifier la Terre, avec majuscule, à une saine identité nationale, comme en écho au fameux « la terre, elle, ne ment pas » du troisième appel du maréchal Pétain, lu le 25 juin 1940. Un appel rédigé par Emmanuel Berl, symbole de ces égarés de la gauche que leur égocentrisme sans boussole amènera à côtoyer Vichy, tout comme l’ancien communiste, socialiste, chevénementiste Max Gallo inspire aujourd’hui cette vision étatique d’une France éternelle fondée par la rencontre de la monarchie et de la chrétienté.

Vision mythologique bien sûr, fort éloignée de l’histoire avérée. Et pourtant vision désormais officielle, au risque international d’un ridicule qui ne tuera pas François Fillon : « Le fait est que, dans la tempête des invasions barbares, il n’y a guère que le petit peuple franc qui ait surnagé. Sans doute parce qu’en contrepoids d’un caractère belliqueux, incontestable, la légitimité et le droit étaient déjà deux obsessions françaises. »

C’est alors que, dans ce discours du premier ministre, surgit la référence à Jacques Bainville, évoquant Jeanne d’Arc tombant à genoux devant le dauphin. Bainville, ce fidèle de Charles Maurras, cette plume de L’Action française, dont les obsèques, le 13 février 1936, furent l’occasion d’une tentative de lynchage de Léon Blum, dont la voiture avait par mégarde croisé le cortège funèbre. Du leader socialiste, Maurras avait écrit : « Voilà un homme à fusiller, mais dans le dos », tandis que, pour son acolyte Léon Daudet, « Blum était le bruit que font douze balles dans la peau d’un traître ». Les processionnaires de l’enterrement de Bainville avaient ces mots-là en tête, et les mirent en pratique.

Soixante-treize ans plus tard, ce lapsus maurrassien dans la bouche d’un chef de gouvernement ne saurait relever de l’inculture. D’autant moins qu’il est cohérent avec l’ensemble des propos qui, du chef de l’Etat au premier ministre, dressent le portrait d’une France élue à la grandeur bien avant que la république ou la démocratie ne s’en mêle. Ou, mieux encore, grande malgré la république (réduite ici à la centralité du pouvoir) et malgré la démocratie (amputée ici de l’exigence d’égalité). Une France qui doit « être aimée et servie », dans l’obéissance, la cohésion et la discipline : « Les 65 millions de Français doivent faire bloc », insiste François Fillon, qui met en garde ceux qui ne voudraient pas en être, ceux qui critiquent, discréditent, voire, dit-il, « débinent constamment notre nation et ses valeurs » – ici, l’emploi d’un verbe familier élargit l’interdit à notre quotidienneté.

De cette Anti-France, M. Fillon dessine clairement les contours en trois mots : « Aujourd’hui, dans nos stades, dans nos cités, parmi nos élites, émerge parfois la tentation de défier la République, en affichant le mépris de ses symboles. » Stades, cités, élites : trois mots qui suggèrent le peuple, les immigrés et les intellectuels.

Evidemment, ces deux discours sont aussi parsemés de précautions ou d’allusions qui en masquent ou en atténuent la cohérence. Mais ce ne sont là que dénégations orwelliennes, mots vides de sens et références privées de signification. L’essentiel est ailleurs : pour la première fois depuis 1944-1945 s’énonce, au sommet de la République, l’idéologie de la droite extrême, celle qui fut au pouvoir avec Philippe Pétain sous Vichy, cette droite à la fois maurrassienne, orléaniste et élitiste qui n’avait jamais admis la démocratie libérale et qui vécut la victoire de l’Allemagne nazie comme sa divine surprise, cette droite que seules la victoire des Alliés et la personnalité de Charles de Gaulle obligèrent à admettre le principe de la République et sa devise de liberté, d’égalité et de fraternité.

Défendre l’esprit des Lumières et le droit naturel

La bataille des Lumières n’est donc pas terminée, et elle se joue ici même face à un pouvoir qui leur tourne le dos. C’est parce qu’elle les refusait que la droite extrême d’hier combattait la République sans Dieu. C’est parce qu’elle entend les remettre en cause que la droite extrême d’aujourd’hui veut nous imposer sa Nation de Chrétienté.

Qu’est-ce, en effet, que les Lumières sinon l’inverse de ce que rabâchent ces deux discours ? Un appel à l’émancipation du sujet humain des entraves du passé et de la religion, de l’obscurantisme de l’une et des immobilismes de l’autre. Une théorie du droit naturel où l’égalité est au principe des droits de l’homme. Une affirmation de la primauté de l’individu sur la société et de sa liberté comme garantie de l’émancipation. L’égalité, donc : des hommes naturellement égaux en droit, des droits égaux entre individus libres... Et pour l’intellectuel de cette droite extrême que fut Charles Maurras, l’ennemi, c’est justement l’égalité, et son credo l’inégalité – entre individus, entre classes, entre peuples, entre nations, etc.

Si la démocratie est le régime que Maurras abhorre, c’est parce que sa promesse subversive est celle de l’égale valeur politique des individus. La combattre suppose de rétablir des hiérarchies, des différences, des aristocraties, bref, un ordre stable d’inégalités garanti par l’autorité incontestée d’un pouvoir central capable de conjurer cette menace : la vitalité démocratique d’une pluralité d’égaux. C’est d’ailleurs pourquoi l’Eglise de Maurras est si peu chrétienne et purement d’ordre, à tel point qu’il considère l’Evangile comme un dangereux pamphlet révolutionnaire parce que d’esprit égalitaire.

De Maurras, par exemple, dans Mes idées politiques (1937) : « Toutes les fortes crises modernes ont un caractère oriental ; bibliques par leur esprit ou juives par leur personnel. » Où l’on croise le fantasme occidental des désordres orientaux, aujourd’hui ravivé par notre époque de transition et, donc, d’incertitude et de peur.

Critique de l’égalité, éloge de la chrétienté, hommage à la royauté, méfiance de l’étranger, enracinement de la nation, soumission à l’autorité, etc. : tous les refrains actuellement mis en musique par le pouvoir ramènent à ces sources idéologiques de la droite extrême d’avant-guerre, jusqu’alors tenues en lisières d’une droite de gouvernement peu ou prou issue du gaullisme.

Telle est la véritable rupture incarnée par Nicolas Sarkozy : la clôture du gaullisme comme s’il ne s’était agi que d’une parenthèse ouverte par un accident historique – la défaite de l’Allemagne nazie et, donc, de la « Révolution nationale » de Vichy qui avait saisi comme une divine surprise l’opportunité offerte par la collaboration avec le IIIe Reich. Les racines du sarkozysme plongent au-delà, retrouvant l’idéologie des droites extrêmes d’avant-guerre pour inventer la cohérence d’un pouvoir qui allie, de façon inédite, souverainisme nationaliste, libéralisme économique et illibéralisme politique.

Le discrédit moral qui, fort légitimement, accompagne le pétainisme nous fait trop souvent oublier l’effrayante normalité et continuité dont le régime de Vichy était porteur. « Dictature pluraliste », selon le mot de l’historien Stanley Hoffmann, il rassemblait autour d’un chef charismatique aussi bien la droite antirépublicaine que la droite technocratique, des catholiques et des libéraux, des traditionalistes et des modernistes, des maurrassiens de droite et des non-conformistes de gauche, etc.

Dans une remarquable synthèse sur cette période, l’historien Jean-Pierre Azéma – signataire de notre Appel – souligne combien l’idéologie vichyssoise est « un syncrétisme français », prenant « le contre-pied des principes de la démocratie libérale et des fondements de la synthèse républicaine : la condamnation définitive de l’individualisme, le refus de l’égalitarisme, un appel au rassemblement national, une pédagogie anti-intellectualiste, la défiance à l’égard de l’industrialisme, le rejet du libéralisme culturel, et enfin l’affirmation d’un nationalisme fermé et ethnocentrique ».

Où l’on retrouve bien des ingrédients de l’offensive idéologique actuelle... Quand Alain Badiou se risqua, dès 2007, à évoquer le pétainisme à propos du sarkozysme, la comparaison pouvait surprendre, voire scandaliser. Désormais, c’est le pouvoir lui-même qui y incite avec ses obsessions et ses références qui, loin d’être sans histoire et sans précédents, ont un parcours et des antécédents – des racines en somme.

« Je ne suis pas en train de dire que les circonstances ressemblent à la défaite de 1940, et que Sarkozy ressemble à Pétain, prenait soin de préciser Badiou dans De quoi Sarkozy est-il le nom ? (Lignes, 2007). Pas du tout. Je dis que la subjectivité de masse qui porte Sarkozy au pouvoir, et soutient son action, trouve ses racines inconscientes, historico-nationales, dans le pétainisme. » Pétainiste, précisait le philosophe, étant entendu ici comme « le transcendantal, en France, des formes étatisées et catastrophiques de la désorientation ».

Le sarkozysme témoigne de la désorientation d’une partie de nos élites politiques, économiques, administratives, face à l’actuel décentrement du monde, au croisement d’une révolution industrielle imprévisible et d’une perte d’emprise de l’Occident. Sa perdition idéologique évoque irrésistiblement le constat dressé à l’été 1940 par un homme que les discours de MM. Sarkozy et Fillon convoquent mais qu’ils trahissent, faute de l’avoir bien lu : le grand historien et futur martyr de la Résistance Marc Bloch, dans L’Étrange Défaite. « Français, je vais être contraint, parlant de mon pays, de ne pas en parler qu’en bien », prévenait-il avant de mettre en évidence la responsabilité dans l’affaissement moral de la nation d’une bourgeoisie qui « avait cessé d’être heureuse » et qui, devenue « anxieuse et mécontente, était aussi aigrie ».

L’Appel de Mediapart signifie simplement le refus de cette déchéance. A cette aigreur, remugle de méfiance et de crispation, de faiblesse et de violence, de petitesse et de peur, il oppose une façon très française de vouloir la France qui est toute de refus et de hauteur, d’exigence et de réclamation, d’alerte et d’ambition, de curiosité et de générosité. Car critiquer la France, c’est l’aimer. La vouloir, la réclamer, l’exiger. Et ne pas supporter qu’on la critique, c’est en revanche la déserter. L’ignorer, l’oublier, la délaisser.

Drapés dans l’alibi du national, les conservatismes de tous horizons, les renoncements de tout acabit voudraient une France immobile et éternelle, figée et achevée. La vérité, c’est qu’ils ne l’aiment pas telle qu’elle est. Telle qu’elle bouge, évolue, change, se transforme et se modifie dans une fidélité frondeuse à son histoire et à ses promesses, à sa présence au monde et aux autres.

1) L’Appel de Mediapart : « Nous ne débattrons pas »

Cet appel peut être signé en cliquant sur l’adresse URL portée en source en haut de cet article (couleur rouge)

Mediapart lance avec deux cents personnalités un appel à refuser le « grand débat sur l’identité nationale » organisé par le pouvoir. Nous souhaitons que cet appel soit à l’origine d’une grande pétition citoyenne qui suscite un vaste rassemblement. Vous pouvez en cliquant ici le signer en ligne.

Nous ne débattrons pas

Par principe, nous sommes favorables au débat. A sa liberté, à sa pluralité, à son utilité. C’est pourquoi nous refusons le « grand débat sur l’identité nationale » organisé par le pouvoir : parce qu’il n’est ni libre, ni pluraliste, ni utile.

Il n’est pas libre car c’est le gouvernement qui le met en scène, qui pose les questions et qui contrôle les réponses. Il n’est pas pluraliste car sa formulation réduit d’emblée notre diversité nationale à une identité unique. Il n’est pas utile car cette manœuvre de diversion est une machine de division entre les Français et de stigmatisation envers les étrangers.

Affaire publique, la nation ne relève pas de l’identité, affaire privée. Accepter que l’Etat entende définir à notre place ce qui nous appartient, dans la variété de nos itinéraires, de nos expériences et de nos appartenances, c’est ouvrir la porte à l’arbitraire, à l’autoritarisme et à la soumission.

La République n’a pas d’identité assignée, figée et fermée, mais des principes politiques, vivants et ouverts. C’est parce que nous entendons les défendre que nous refusons un débat qui les discrédite. Nous ne tomberons pas dans ce piège tant nous avons mieux à faire : promouvoir une France de la liberté des opinions, de l’égalité des droits et de la fraternité des peuples.

La liste des 202 premiers signataires de l’Appel

Dominique A, auteur/ compositeur/interprète

Josette Alia, journaliste

Paul Alliès, politologue, professeur à l’université Montpellier 1

Clémentine Autain, directrice de Regards, membre de la Fédération pour une alternative sociale et écologique

Jean-Loup Amselle, anthropologue, directeur d’études à l’EHESS

Philippe Artières, historien, chargé de recherche au CNRS

Louis Astre, syndicaliste

Aure Atika, actrice

Raymond Aubrac, commissaire honoraire de la République

Martine Aubry, maire de Lille, premier secrétaire du Parti socialiste

Stéphane Audeguy, écrivain

Jean-Pierre Azéma, historien, professeur honoraire à l’IEP de Paris

agnès b., créatrice

Guy Baillon, psychiatre des hôpitaux

Sébastien Balibar, physicien, directeur de recherche au CNRS

Christian Baudelot, sociologue, professeur à l’ENS

Denis Baupin, maire-adjoint de Paris, membre de l’exécutif des Verts

Stéphane Beaud, sociologue, professeur à l’ENS

Guy Bedos, comédien

Sandrine Bélier, député européen Europe-écologie

Mathieu Bellahsen, interne en psychiatrie

Tahar Ben Jelloun, écrivain

Gilbert Béréziat, biochimiste, vice-président de l’université Pierre et Marie Curie

Carmen Bernand, historienne, professeur à l’université Paris X-Nanterre, membre de l’IUF

Alain Bertho, anthropologue, professeur à l’université Paris 8

Olivier Besancenot, porte-parole du Nouveau parti anticapitaliste

Dominique Besnard, membre de la direction des CEMEA

Jean-Paul Besset, député européen Europe-écologie

Didier Bezace, directeur du Centre Dramatique National d’Aubervilliers, metteur en scène.

Pascal Binczak, président de l’université Paris 8

Vincent Bioulès, artiste plasticien

Olivier Boitard, psychiatre des hôpitaux

Christian Boltanski, artiste plasticien

Luc Boltanski, sociologue, directeur d’études à l’EHESS

Hervé Bokobza, psychiatre

François Bon, écrivain

Yves Bonnefoy, poète, professeur honoraire au Collège de France

Jacques Bouveresse, philosophe, professeur au Collège de France

José Bové, député européen Europe-écologie

Patrick Braouezec, député PCF de Seine-Saint-Denis

Michel Broué, mathématicien, professeur à l’université Paris Diderot, membre de l’IUF

Marie-George Buffet, députée de Seine-Saint-Denis, secrétaire nationale du PCF

Pierre Buraglio, artiste plasticien

Rodolphe Burger, musicien

André Burguière, historien, directeur d’études à l’EHESS

Pascal Canfin, député européen Europe-écologie

Robert Cantarella, metteur en scène

Laurent Cantet, réalisateur

Robert Castel, sociologue, directeur d’études à l’EHESS

Carmen Castillo, écrivain et cinéaste

Patrick Chamoiseau, écrivain

Roger Chartier, historien, professeur au Collège de France

Noëlle Châtelet, écrivain

Monique Chemillier-Gendreau, juriste, professeur émérite de droit public

Patrice Chéreau, metteur en scène

Suzanne Citron, historienne

Hélène Cixous, écrivain

Alain Clément, artiste plasticien

Yves Cochet, député Verts du Val d’Oise

Daniel Cohn-Bendit, député européen Europe-écologie

Bernard Comment, écrivain et éditeur

Emmanuelle Cosse, journaliste, rédactrice en chef de Regards

Michel Deguy, écrivain et poète

Bertrand Delanoë, maire de Paris

Karima Delli, député européen Europe-écologie

Dominique Desanti, écrivain

Philippe Descola, anthropologue, professeur au Collège de France

Patrick Deshayes, anthropologue, professeur à l’université Lyon 2

Marcel Detienne, historien et anthropologue, directeur d’études à l’EHESS

Philippe Doucet, maire PS d’Argenteuil

Jean-Pierre Dubois, juriste, président de la Ligue des droits de l’homme

Jacqueline Duchêne, psychologue clinicienne

Vincent Duclert, historien, professeur à l’EHESS

Cécile Duflot, secrétaire nationale des Verts

Bernard Durand, psychiatre

Mathias Enard, écrivain

Annie Ernaux, écrivain

Arlette Farge, historienne, directrice de recherche au CNRS

Didier Fassin, anthropologue, professeur à Princeton

Eric Fassin, sociologue, professeur à l’ENS

Jean-Pierre Ferrini, écrivain

Marc Ferro, historien, directeur d’études à l’EHESS

Hélène Flautre, député européen Europe-écologie

Pierrette Fleutiaux, écrivain

Dan Franck, écrivain

Bastien François, professeur de science politique université Paris 1

Daniel Friedmann, sociologue, chargé de recherche au CNRS

Gérard Fromanger, artiste plasticien

Florent Gabarron-Garcia, psychologue et psychanalyste

Louis Garrel, acteur

Marike Gauthier, éditrice

Christophe Girard, maire adjoint à la culture de Paris

Edouard Glissant, écrivain et poète

Daniel Goldberg, député PS de Seine Saint Denis

Roland Gori, psychanalyste, initiateur de « L’Appel des appels »

Marcel Gotlieb, dessinateur

Romain Goupil, réalisateur

Michaël Guyader, psychiatre et psychanalyste

Stéphane Hessel, ambassadeur de France

François Hollande, député PS de Corrèze, président du conseil général

Christophe Honoré, réalisateur, écrivain

Frédérique Ildefonse, philosophe, directrice de recherche au CNRS

Angélique Ionatos, auteur/compositeur/interprète

Yannick Jadot, député européen Europe-écologie

Régis Jauffret, écrivain

Pierre Joliot, biologiste, professeur honoraire au Collège de France

Eva Joly, député européen Europe-écologie

Geneviève Joutard, historienne et cinéaste

Philippe Joutard, historien, professeur à l’université de Provence

Bernard Lahire, sociologue, professeur à l’ENS

Claude Lanzmann, écrivain, réalisateur

Nicole Lapierre, sociologue, directrice de recherche au CNRS

Sandra Laugier, philosophe, professeur à l’université de Picardie

Pierre Laurent, coordonnateur national du PCF

Patricia Lavail, musicienne

Jérôme Lèbre, philosophe

Olivier Le Cour Grandmaison, politologue, maître de conférences à l’université d’Evry

Laurent Lederer-Rozenblatt, acteur

Marie-Noëlle Lienemann, membre du bureau national du PS, ancien ministre

Jean-Xavier de Lestrade, auteur/réalisateur

Corinne Lepage, présidente de Cap21, député européen Modem

Danièle Linhart, sociologue, directrice de recherche au CNRS

Jean-Jacques Lottin, directeur d’études de santé publique

Marie-Hélène Lottin, psychiatre

Jacques Loux, gérant de société

Michaël Löwy, sociologue, directeur de recherche émérite au CNRS

Emile Lumbroso, psychologue, président Euro-psy

Paul Machto, psychiatre et psychanalyste

Jean-Claude Mailly, secrétaire général de la CGT-FO

Philippe Mangeot, professeur de lettres

François Maspero, écrivain

Annette Messager, artiste plasticienne

Jean-Pierre Mignard, avocat au barreau de Paris

Ariane Mnouchkine, metteur en scène

Olivier Mongin, directeur de la revue "Esprit"

Arnaud Montebourg, député PS de Saône-et-Loire, président du conseil général

Bertrand Monthubert, mathématicien, professeur d’université, secrétaire national du PS

Odile Morvan, psychologue et psychanalyste

Janine Mossuz-Lavau, politologue, directrice de recherche au CNRS

Yann Moulier Boutang, économiste, professeur à l’université de Compiègne

Richard Moyon, cofondateur de RESF

Marie NDiaye, écrivain, prix Goncourt 2009

Pap Ndiaye, historien, maître de conférences à l’EHESS

Monique Nemer, éditrice

Nicolas Offenstadt, historien, maître de conférences à l’université Paris I Ruwen Ogien, philosophe, directeur de recherche au CNRS

Maurice Olender, historien et éditeur, maître de conférences à l’EHESS

Véronique Ovaldé, écrivain

Yves Pagès, écrivain, éditeur

Pierre Paresys, psychiatre

Vincent Peillon, député européen PS

Daniel Percheron, CNRS, revue Communications

Martyne Perrot, ethnologue, chargée de recherche au CNRS

Thomas Piketty, économiste, directeur d’études à l’EHESS, professeur à l’Ecole d’économie de Paris

Thierry Pillon, sociologue, maître de conférence à l’université d’Evry

Evelyne Pisier, politologue, professeur des université Paris 1

Didier Porte, artiste interprète, chroniqueur à France Inter

Mathieu Potte-Bonneville, philosophe, membre de la revue "Vacarmes"

Olivier Py, metteur en scène

Paul Quilès, président de Gauche avenir, ancien ministre

Henri Raczymow, écrivain

Lydie Rappaport, biologiste, directrice de recherche au CNRS

Roland Rappaport, avocat au barreau de Paris

Natacha Régnier, comédienne

Eric Reinhardt, écrivain

Jacqueline Risset, écrivain et poète

Jean-Marc Roberts, éditeur

Régine Robin, sociologue, professeur à l’université du Québec

Michel Rocard, ancien Premier ministre

Pierre Rosanvallon, historien, professeur au Collège de France

Raphaël Rouquier, mathématicien, professeur à Oxford

Martin Rueff, poète et philosophe

Christian Salmon, chercheur et écrivain

Lydie Salvayre, écrivain

Frédéric Sawicki, professeur de science politique à l’université Paris1

Guy Seligmann, président de la SCAM

Jean-Frédéric Schaub, historien, directeur d’études à l’EHESS

Hervé Serry, sociologue, chargé de recherche au CNRS

Joy Sorman, écrivain

Benjamin Stora, historien, professeur à l’université de Paris XIII-Villetaneuse

Akli Tadjer, écrivain

Jacques Testart, biologiste, directeur de recherche à l’Inserm

Sylvie Testud, comédienne, écrivain

Serge Teyssot-Gay, musicien, Noir Désir

Gilles-Marie Tiné, producteur

Monique Thizon, psychiatre

Umberto Todini, professeur de littérature latine (Université de Salerne Italie)

Tzvetan Todorov, philosophe, directeur de recherche au CNRS

Philippe Torreton, acteur

Jérôme Tournadre-Plancq, politologue, université d’Orléans

Enzo Traverso, politologue, professeur à l’université de Picardie

Jacques Treiner, physicien, professeur à l’université Pierre et Marie Curie

Hélène Trintignan, galeriste

Lucette Valensi, historienne, directrice d’études à l’EHESS

Eleni Varikas, philosophe, professeur à l’université Paris 8

Georges Vigarello, historien, directeur d’études à l’EHESS

Dominique de Villepin, ancien Premier ministre

Valérie Waill-Vallet, psychanalyste

Bernard Wallet, éditeur

Thierry Wilhelm, gérant de société

Uli Wittmann, traducteur

Françoise Zonabend, historienne, directrice d’études à l’EHESS


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