Une défense passionnée de la sagesse qui identifie la visée communiste à un projet de vie

mardi 20 novembre 2018.
 

SAGESSE DE LA RÉVOLUTION, de Georges Gastaud (avec Marion Gandiglio). Éditions le Temps des cerises, 278 pages, 18 euros.

L’intérêt principal de ce recueil d’essais de Georges Gastaud est de vouloir réhabiliter au sein de la pensée révolutionnaire des notions qu’une certaine tradition marxiste, disons sèche et positiviste, a eu tendance à déconsidérer et qu’on peut unifier sous le terme de sagesse : la recherche d’une vie bonne, l’idée d’un bien moral, l’orientation sensée de l’existence, l’apologie de la vie contre les faiseurs d’illusions religieuses qui nous détournent du monde terrestre.

Or ces valeurs, qui paraissent nous enfermer dans une approche strictement individuelle de la conduite, Gastaud montre bien qu’il faut les introduire dans la visée communiste si l’on veut qu’elles fassent sens, qu’elles nous interpellent au plus profond de nos intérêts et de nos désirs et que le communisme apparaisse clairement comme un projet de vie au service de l’épanouissement individuel, ce qu’il était sans conteste chez Marx dès les Manuscrits de 1844.

Cela implique, certes, que le marxisme se ressource auprès de penseurs comme Épicure, Aristote, Spinoza et même, selon lui, Nietzsche, pour sa critique intransigeante des fausses transcendances qui mutilent la vie – ce en quoi on ne peut que le suivre. Mais cela implique surtout une révolution dans le concept même de sagesse : il faut arrêter de voir en elle une forme de vie réservée à une élite et la rendre accessible à chacun puisque nous avons tous droit à une « vie bonne ».

Du coup, c’est le concept de révolution qui doit être aussi modifié : le communisme doit devenir le porteur d’une universalisation politique de la sagesse et mettre au premier plan, en particulier, la double défense de la vie et de sa qualité qui sont menacées aujourd’hui par la domination d’un capitalisme agressif, que Gastaud qualifie justement d’« exterministe » et qui a étendu son emprise sur la planète depuis la disparition de l’Union soviétique.

Cela justifie alors que l’on recoure aussi à Kant et à son concept moral de l’universel car c’est bien celui-ci qui légitime l’idée d’une société sans classes, mettant la vie, en quantité et en qualité, à la portée de tous et respectant les chances de bonheur de chaque être humain. C’est la leçon finale de cet ouvrage passionné, bien écrit et qui entend contribuer à ce que l’auteur appelle une « renaissance communiste ».

YVON QUINIOU, Philosophe, mis en ligne Humanité.fr


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