Jaurès Un homme de débat et de combat (Par Gilles Candar, historien)

mardi 22 septembre 2009.
 

Envoyer Imprimer Article paru le 19 septembre 2009 Envoyer à un ami E-mail du 1er destinataire E-mail du 2e destinataire E-mail du 3e destinataire E-mail du 4e destinataire Votre e-mail Votre nom et prénom Y joindre un message code Veuillez recopier le code, les lettres en majuscule L’Humanité des débats Jaurès Un homme de débat et de combat

L’Humanité des débats

Jaurès reste dans les mémoires comme un rassembleur, un homme de l’unité. Mais cette unité n’a pas été construite par le seul exercice de vertus privées et publiques, l’honnêteté, la bienveillance, la générosité, le désintéressement… Jaurès n’était pas un père Noël de la gauche mais un homme politique, un homme de débat et de combat. Comme il aimait à le dire lui-même : « Pour bien se comprendre, il faut d’abord se cogner un peu, en paroles bien entendu. »

Dès le début de son parcours politique, c’est l’originalité de Jaurès : Guesde est plus doctrinaire,

Lafargue plus ironique, Vaillant plus synthétique… Jaurès est un homme libre et fier, un intellectuel qui réfléchit et dit ce qu’il pense. Député républicain, il a voulu faire avancer des réformes sociales (sécurité pour les mineurs, premières retraites…), prenant au sérieux les promesses de fraternité citoyenne. Les résistances rencontrées l’ont fait devenir socialiste : il faut attaquer le mal à la racine, construire une organisation de la production qui empêche l’accaparement égoïste des richesses. Député de Carmaux, journaliste, il se bat intensément… et lui qui avait toujours voulu garder son indépendance se persuade, au fil des batailles politiques, de la nécessité du rassemblement et de l’organisation.

La première condition est la franchise et la sincérité des débats. D’où la fondation de l’Humanité, le 18 avril 1904, non pas le premier journal socialiste ni le seul prêt à accueillir des articles de Jaurès : il s’exprimait dans la Dépêche (de Toulouse), avait codirigé la Petite République, écrit au Matin et à la Lanterne… Mais l’Humanité, financièrement indépendante, est un journal libre. Jaurès cherche à y faire s’exprimer les divers courants socialistes et syndicaux. Cela ne sera jamais facile, mais le cap sera tenu. Malgré les polémiques, l’Humanité prépare l’unité socialiste (avril 1905) : celle-ci est un choix, de Jaurès et de nombreux autres dirigeants, des électeurs et des militants aussi… Jaurès aurait pu devenir ministre comme d’autres. L’ouverture aux personnalités de talent révélées par leur militantisme à gauche n’est pas une découverte de l’actuel président de la République ! Certaines de ces personnalités étaient honnêtes, d’autres moins… mais aucune ne change grand-chose à la société ou à la politique du moment. Jaurès, qui prend au sérieux la politique, en est convaincu : les difficultés sont telles que seulement un rassemblement organisé et construit avait une chance de peser, en faveur de réformes ou pour la paix, sans même parler de changements plus fondamentaux. D’où son engagement, avec sacrifices et compromis, pour faire vivre le Parti socialiste unifié ou section française de l’Internationale ouvrière, qui n’est pas une fin en soi, mais le moyen de donner force et vigueur aux milieux populaires, à la démocratie. Les temps ont changé, certaines priorités aussi, mais les objectifs et la méthode (débats, accords et rassemblement) restent pertinents.

Par Gilles Candar, historien, Coordonnateur des OEuvres de Jean Jaurès (Fayard).

Dernier tome paru : les Années de jeunesse 1859-1889.


Signatures: 0
Répondre à cet article

Forum

Date Nom Message