Le PS à l’origine d’une nouvelle amnistie pour les politiques ? (article Rue 89)

mercredi 23 septembre 2009.
 

Un amendement à la loi pénitentiaire rendrait à nouveau éligibles les élus condamnés dans des affaires financières.

A l’Assemblée nationale le 12 mai 2009 (Charles Platiau/Reuters)

Les socialistes vont-ils être à l’origine d’une nouvelle amnistie pour les politiques ? C’est un riverain de Rue89, fin connaisseur des arcanes de l’Assemblée nationale, qui a découvert le pot-aux-roses.

Le 16 septembre dernier, un amendement déposé « au nom du groupe socialiste » pourrait abroger l’article 7 du code électoral. Un drame ? Non, juste une amnistie déguisée…

Pour ceux qui auraient dormi en deuxième année de droit, l’article 7 du code électoral prive automatiquement de leur éligibilité les élus condamnées dans des affaires financières. Plus précisément, les élus condamnés pour :

* corruption,

* prise illégale d’intérêts,

* violation des règles des marchés publics.

Malgré l’existence d’un débat juridique, à chaque fois que le cas se présente, cette disposition n’a jamais été remise en cause, notamment parce qu’elle se limite aux infractions économiques les plus graves.

Ce fut d’ailleurs la peine infligée à Alain Juppé en première instance dans l’affaire des emplois fictifs du RPR où il était poursuivi pour « prise illégale d’intérêts ». L’ex « meilleur d’entre nous » avait alors écopé de dix ans d’inéligibilité. Peine ramenée à un an d’inéligibilité en appel.

Le député socialiste Jean-Jacques Urvoas (DR)Pour éviter de nouvelles (mauvaises) surprises, le groupe PS a confié au député Jean-Jacques Urvoas, expert du code électoral, le soin de soutenir cet amendement adopté en commission des lois, sans le moindre débat. Comme cela s’est déroulé le 8 septembre, en marge des discussions sur la loi pénitentiaire.

Commentaire de l’intéressé (qui répond également sur son blog) :

« Mon argumentation est bêtement jurique. Je ne suis pas l’instrument du malin visant à blanchir quelque élu coupable… Nous avons deux textes, dont un arrêt de la cour de Cassation, qui disent que cet article n’est plus adapté, parce qu’il est d’application automatique. Or, il faut tenir compte du principe d’individualisation de la peine et des cirsconstances d’une affaire. »

Tout cela a pu se dérouler grâce à la réforme de la Constitution qui autorise l’adoption d’un amendement en commission des lois sans exposé des motifs par l’auteur, avec avis favorable du rapporteur et le silence du gouvernement. Ce qui s’est passé sur ce texte.

Au Palais-Bourbon, on appelle cela une affaire rondement menée… enfin, presque, car il reste la discussion en commission mixte, où certains pourront mettre les pieds dans le plat.

Réalisant sa bévue, Jean-Jacques Urvoas s’engage d’ailleurs à retirer son amendement dès la semaine prochaine en commission mixte :

« Juridiquement, cela se justifie, mais politiquement c’est une connerie. Je plaide la bonne foi sur cette affaire. »

Par David Servenay


Signatures: 0
Répondre à cet article

Forum

Date Nom Message