Crise " Je crains bien que tout va recommencer dans un avenir pas très lointain" (Paul Krugman, prix Nobel d’économie)

mardi 18 août 2009.
 

Le monde a échappé à une "Grande dépression 2.O" mais cela va prendre au moins deux ans avant que l’économie mondiale ne se redresse totalement, a estimé lundi 10 août le prix Nobel d’économie américain Paul Krugman, à Kuala Lumpur (Malaisie).

Bien que le pire de la crise financière soit passé, le monde fait face maintenant à un ralentissement économique durable comparable à la "décennie perdue" que le Japon a subie dans les années 1990, a-t-il ajouté lors d’un discours devant un forum international de chefs d’entreprise.

"Comment s’en sort-on ? La réponse technique est : « Dieu seul le sait. » Nous manquons terriblement de modèles", a dit M. Krugman, professeur d’économie à la prestigieuse université américaine de Princeton.

Dans le passé, des pays pouvaient se redresser rapidement grâce à leurs exportations, mais "à moins de trouver une autre planète pour y exporter, nous ne pouvons pas avoir un redressement économique porté par les exportations dans ce contexte de crise financière mondiale, ce qui signifie que nous sommes dans une situation grave", a-t-il ajouté.

Et il est hautement improbable que les autres solutions possibles — hausses des dépenses de consommation, des investissements des entreprises et de l’immobilier — puissent faire redémarrer l’économie américaine ou mondiale cette fois-ci, a estimé M. Krugman.

"Il semble que nous ayons évité la Grande dépression 2.0" mais "je suis persuadé qu’un redressement total ne pourra avoir lieu avant au moins deux ans et probablement même plus", a-t-il ajouté.

Il a comparé la situation de l’économie planétaire à "une version mondiale de ce qu’a subi le Japon quasiment tout au long des années 1990. Formellement, le Japon n’a connu que quelques périodes de récession au cours de sa décennie perdue, mais au final cela n’a été qu’une longue période de croissance molle", a-t-il dit.

Les autorités économiques devraient adopter davantage de mesures de relance, fixer des objectifs d’inflation plus élevés, et encourager les investissements des entreprises.

"Nous ne savons pas lesquelles de ces mesures pourraient fonctionner, nous devons donc toutes les essayer", a recommandé M. Krugman. Il a également préconisé de restructurer le système financier pour éviter une nouvelle crise, avec une régulation bancaire plus efficace et un encadrement des risques que les grandes institutions financières peuvent prendre.

"Le principe général, c’est que tout ce qui dans une crise a besoin d’être sauvé — par exemple une banque — doit être réglementé, à l’instar d’une banque quand vous n’êtes pas en crise", a ajouté M. Krugman.

"Je ne crois pas que cela arrivera. D’une certaine façon, la manière dont nous avons agi pour éviter une complète répétition de la Grande dépression a eu un inconvénient : nous avons probablement sauvé l’économie trop tôt, avant qu’une volonté politique en faveur d’une réforme fondamentale n’ait été suffisamment forte pour susciter des changements", a-t-il estimé.

"En d’autres termes, je crains bien que tout va recommencer dans un avenir pas très lointain", a conclu l’économiste.


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