La BCE s’inquiète d’une crise bancaire en cas de récession prolongée

jeudi 30 juillet 2009.
 

Selon un expert de la BCE, les banques européennes ne seraient pas suffisamment capitalisées pour supporter les pertes qui seraient provoquées par une récession longue, en forme de « U ». 25 d’entre elles sont mises sous surveillance par la banque centrale, en raison de leur importance systémique. Pendant ce temps, sur le secteur est-européen, les pertes s’accumulent et les pays baltes sont sur la sellette.

Dejan Krusec, expert de la BCE dans le domaine de la stabilité financière, a déclaré que les banques sont suffisamment solides pour affronter le ralentissement dans le cas d’une reprise rapide en forme de de « V », mais pas dans celui où le redémarrage de l’économie serait plus long à se manifester.

« Si [la reprise] est en forme de « U », les banques auront des problèmes. Il y a 25 banques que nous surveillons et qui sont d’importance stratégique », a-t-il déclaré lors d’une conférence de l’agence Fitch Ratings portant sur l’Europe de l’Est.

« Le problème n’est pas pour 2009. Les banques de la zone euro sont suffisamment capitalisées pour couvrir les pertes. Le problème, c’est 2010. Nous sommes préoccupés par la longueur [de la récession]. »

La BCE a revu à la baisse ses prévisions, tablant sur une contraction de 4,6% cette année et une nouvelle chute de 0.3% l’année prochaine, sans redémarrage avant la mi-2010. Cela exclut toute possibilité d’une reprise en forme de V.

Il en ressort clairement que la BCE se prépare à une autre tempête, alors que la hausse des défaillances de paiement érode le capital des banques.

C’est là un alignement de la BCE avec les vues du Fonds Monétaire International, qui a appelé à une action d’urgence des autorités pour nettoyer les banques européennes et communiquer sur leurs difficultés vraisemblables.

Piroska Nagy, conseillère à la Banque Européenne pour la Reconstruction et le Développement, a déclaré que le danger serait que les banques d’Europe de l’Ouest se désengagent de l’Est européen, « provoquant un effondrement du secteur bancaire » dans cette région.

La BERD et la Banque mondiale ont mis en place un fonds de 25 milliards d’euros utilisé comme une « incitation » visant à prévenir que les banques abandonnent leurs filiales. « Il s’agit d’une somme respectable, mais insuffisante », dit-elle.

Quelque 30% des gestionnaires de fonds interrogés lors de la conférence de l’agence Fitch ont déclaré qu’ils s’attendaient à un défaut de paiement dans plusieurs pays d’Europe orientale. 11% s’attendent à un véritable effondrement « systémique ».

Les banques d’Europe de l’Ouest ont une exposition de 1 600 milliards de dollars dans la région, à commencer par les banques autrichiennes, belges, suédoises et néerlandaises. Si l’attention s’est focalisée sur la parité de la devise lettonne, de lourdes pertes s’amoncèlent en Hongrie, dans les Balkans, la Russie et la Turquie.

« La survie va être très difficile pour la majorité des banques privées en Ukraine », a déclaré James Watson, directeur de Fitch à Moscou. Dans un « scénario du pire », les dépréciations se montent à 135 milliards de dollars en Russie, 46 en Ukraine, et 38 au Kazakhstan. Même dans le « scénario de base » les pertes seraient de 122 milliards pour ces trois pays seulement. En Russie, les entreprises privées empruntent en dollars, car il est difficile d’émettre des obligations en roubles. Elles doivent refinancer 145 milliards de dette extérieure cette année, et payer les intérêts avec des bénéfices réalisés en roubles dévalués. Ce sont les entreprises du bâtiment qui font face aux pires difficultés.

Il n’y a pas de solution aisée pour l’Europe orientale. « Ça va être encore plus difficile pour eux de s’extirper de leurs problèmes en exportant que cela ne l’avait été pour l’est asiatique durant la crise de 1998 », a déclaré Edward Parker, le responsable de Fitch pour les pays émergents d’Europe.

Cette fois, le monde entier est en récession. Outre la Lettonie, l’Estonie, la Lituanie et la Bulgarie sont piégées par leurs taux de change fixes surévalués, qui impliquent une sévère déflation. « Il y a une limite à l’intensité de la douleur qui peut être supportée dans les démocraties », avertit-il.

par Ambrose Evans-Pritchard


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