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Poèmes contre la guerre

jeudi 14 mars 2024 par Jacques Serieys

- POEME 20 LA CROISADE DES ENFANTS 1939 (Bertolt Brecht)
- POEME 19 La gloire (Pierre Seghers)
- POEME 18 La guerre, folle immense (Victor Hugo)
- POEME 17 L’évadé (Boris Vian)


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Poèmes contre la guerre

mardi 26 février 2019

Chère Sophie,
Vos avez raison, le partage de mémoire est essentiel. Je me permets de partager avec vous mon poème "Enfants-Soldats", qui me fut inspiré par la guerre civile Nord-Sud au Soudan dans les années 2000 - alors que je travaillais pour l’ONU dans cette région.

ENFANTS-SOLDATS

Isabelle BALOT

Sous le soleil brûlant de l’éternelle Afrique
Il est un fauve-roi au manteau de lumière
Qui promène en son flanc une ardeur meurtrière
Tapi dans le désert ou au fond d’une crique.

Sous les feux de midi lorsque tout semble mort
Lors même que tout dort dans la chaleur safrane,
Ce guerrier guette encore au coeur de la savane
Avec une lueur dans sa pupille d’or.

Soudain le fauve clair en un saut fantastique
S’élance dans les airs et bondit sur sa proie :
D’une pulsion mortelle il l’abat et la broie
La tue en un éclair, par sa force magique.

Moi je sais d’autres rois sous le ciel africain
A qui l’on a volé l’espoir et le royaume,
Des guerriers trop menus, sans armure et sans heaume
Déguenillés, pieds nus, à peau de maroquin.

Nomades sans merci, au détour d’un chemin
- Car le sort est inscrit au fond de leurs yeux sombres
Comme dans une crypte où flotteraient des ombres -
Ils vont semer la mort, la grenade à la main.

Voilà l’enfant-soldat, l’enfant qu’on assassine
En bataillons épars sous le soleil brûlant
Pour le diamant, l’ivoire, et l’or noir et l’or blanc !
Un crayon dans la main, c’est la mort qu’il dessine.

Et sous son front têtu casqué de boucles noires
Les souvenirs venus du temps de l’innocence
- Ce baume répandu du flacon de l’enfance -
Sont un fil si ténu qu’il en perd la mémoire.

Au milieu des combats, rien et nul ne l’arrête
Plus tout-à-fait enfant, pas tout-à-fait un homme
Il est dieu, il est roi, déjà adulte en somme
Et se croit immortel, du meurtre plein la tête.

A la fin des combats, assis dedans la cendre,
De son fusil poisseux de sueur ou de sang
Il torture un grillon teinté d’or et d’argent,
Ecrase un scarabée ou une salamandre.

Que voit-il renversé sur un sac de cartouches
Dans ses yeux grand ouverts, le guerrier endormi ?
Qu’entend-il quand il meurt sous le feu ennemi,
Dans le tir des mortiers et sous le vol des mouches ?

Drogué, intoxiqué, écrasé de soleil
Rêve-t’il d’un lagon et d’une source claire,
Reçoit-il sur son front le baiser de sa mère ?
A quoi peut-il rêver dans son dernier sommeil ?

Pardonnez-moi, Seigneur, quand l’Afrique meurtrie
Pense à panser sa plaie et que renaît l’espoir
D’une éternelle paix sur le continent noir,
Quand brillent les autels à l’heure où l’on Vous prie,

Quand on promet la paix, et la paix l’on célèbre,
Dans les constellations brillant au firmament
Je crois voir malgré moi un lion de diamant
Aux yeux de dieu païen riant dans les ténèbres.

IsabelleBalot©Copyright2019



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